Les tensions entre l'union africaine et la cour pénale internationale à l'occasion de la poursuite des chefs d'état africains( Télécharger le fichier original )par Stephanie Laure Anguezomo Ella Université de Limoges - Master 2 2015 |
Paragraphe II) Une nouvelle complémentarité avec la compétence de la CourLa création d'une Cour pénale régionale (CAJDH) aura pour conséquence directe de créer une nouvelle forme de complémentarité entre la CPI et la juridiction régionale. L'article 46H du Protocole de Malabo précise que la Cour fonctionnera en complémentarité avec les juridictions nationales et avec les cours des communautés économiques régionales quand cela est expressément prévu par lesdites communautés. Cette complémentarité vient se joindre à la précédente qui existait entre la CPI 143Mutoy MABIALA, L'élargissement du mandat de la Cour Africaine de Justice et des droits de l'homme aux affaires de droit international pénal, Revue Internationale de Droit Pénal, Vol 85 2014/3, p.749 - 758, https://www.cairn.info/revue-internationale-de-droit-penal-2014-3-page-749.htm, (consulté le 26/12/2015) Page 62 | 97 et les juridictions nationales, en ce sens que ce n'était qu'en cas d'inaction des États (incapacité ou manque de volonté) dans la répression des crimes internationaux que la CPI grâce à cette règle de la complémentarité pouvait s'estimer compétente conformément à l'article 17 du Statut. Dorénavant, cette complémentarité jouera en priorité pour la juridiction régionale sur celle de la juridiction internationale. Toutefois le Protocole ne mentionne pas le devenir des relations entre la Cour africaine et la CPI mais l'article 46L alinéa 3 évoque la possibilité d'une coopération avec les cours internationales dont la CPI. D'aucuns ont estimé que la régionalisation de la justice pénale internationale par la création d'une cour pénale régionale compétente pour des crimes internationaux porterait un coup fatal au devenir de la CPI. Une telle affirmation est inexacte, car il s'agit d'une institution judiciaire subsidiaire. Si à ce 1er degré de complémentarité l'on met en place un second degré de complémentarité (c'est-à-dire entre elle et la CAJDH), cela n'affectera en rien sa survie ni son efficacité, car le Statut a toujours prévu ce mode de fonctionnement. Que la complémentarité « change de main » (des États- CAJDH-CPI) revient simplement à assurer plus efficacement la lutte contre l'impunité en cas d'inaction des États mais aussi à décharger la CPI de la lourdeur de son travail qui cause actuellement des retards dans le traitement de ses affaires. Désormais comme l'a précisé l'article 46H du Protocole de Malabo, la complémentarité se présente désormais sous cette forme, en cas de réticence ou d'incapacité de l'État à juger, l'affaire est recevable devant la Cour mais si l'auteur n'est poursuivi devant aucune des juridictions. Cependant la CPI risque d'être à un moment ou à un autre être en conflit avec la CAJDH quant à l'immunité accordée aux chefs d'États par l'article 46H à l'instar du Statut de Rome en son article 27 qui ne la prend pas en compte. En définitive, la création de la CAJDH par l'UA à travers le Protocole de Malabo marque une véritable avancée dans le développement de la justice pénale internationale en Afrique. C'est une émergence. Jusqu'ici le seul cas de régionalisation était les chambres extraordinaires africaines au sein des juridictions sénégalaises, mais la CAJDH contrairement à celles-ci est permanente, ce qui signifie qu'elle fixera les bases en Afrique de la justice internationale et de l'implication de l'Afrique dans la lutte contre l'impunité des crimes internationaux. Cependant comme l'a fait remarquer l'auteur Mutoy MABIALA, l'on se demande également si cette double complémentarité facilitera la lutte contre l'impunité ou assurerait plutôt un répit à celui-ci144. L'on ne pourra apporter une réponse à cette 144Mutoy MABIALA, L'élargissement du mandat de la Cour Africaine de Justice et des droits de l'homme aux affaires de droit international pénal, Revue Internationale de Droit Pénal, Vol 85 2014/3, p.749 - 758, https://www.cairn.info/revue-internationale-de-droit-penal-2014-3-page-749.htm, (consulté le 26/12/2015) Page 63 | 97 interrogation qu'après l'entrée en vigueur du Protocole de Malabo, jusque-là la CPI reste encore compétente sur les affaires en cours145. |
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