2.2.1.1 « Dépoussiérer l'image de
l'Armagnac » (S. Lacroix)
Pour étayer notre argumentation, nous nous appuyons sur
les campagnes annuelles financées par le BNIA dans la presse et par voie
d'affichage. La principale difficulté est l'absence du produit vendu, le
BNIA n'est pas un commerçant. Il ne peut s'appuyer sur le visuel du
produit vendu. Il recherche à susciter le désir du consommateur
en s'adonnant à l'imaginaire et accroître la
notoriété du produit générique Armagnac.
L'année 2001 a donné lieu à une nouvelle
campagne de communication de l'Armagnac avec un changement d'image
déclinée jusqu'à aujourd'hui en différentes
campagnes. La communication maximise une sobriété
caractérisée par le fond noir avec une simple insertion se
référant au cadeau pour la fête et un jeu de
représentation avec une grappe de raisin. L'Armagnac n'est pas
représenté : ni le breuvage, ni le verre si
caractéristique, ni une référence régionale. La
volonté de toucher un nouveau public en le provoquant façon
« porno chic ». Un nouveau slogan accompagne la campagne :
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www.ricard.fr
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« l'Armagnac un rythme bien à lui ». Si cette
campagne a été récompensée par un prix de la part
des professionnels, peut-être s'est-elle éloignée du
produit et de la capacité d'identification par le consommateur.
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Campagnes fête des pères et fête des
mères 2001
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Slogans :
« Rendons hommage à ceux sans qui nous ne serions
rien »
« Rendons hommage à celles à qui nous devons
tout »
La campagne 2003 a repris les mêmes
caractéristiques en remplaçant la grappe de raisin qui
évoque plutôt le vin dans l'imaginaire collectif par le verre
galbé rempli au tiers d'Armagnac à la couleur ambrée. La
référence au produit gagne en visibilité. Le verre
identifie la consommation traditionnelle de digestif, mais ne repose pas sur
une table,
symbole du repas, comme dans les campagnes des années
1980. Le contenant différencie l'eau-de-vie de vin des autres alcools,
c'est un élément fédérateur et
caractéristique qui est repris dans tous les visuels.
La campagne 2004 joue avec ce verre dans un jeu d'ombres et
lumières et quelques gouttes glissant sur les parois. Le nouvelle
message est « larmes de joie » dans le but de symboliser la
convivialité. Ces campagnes sont publiées dans la presse
traditionnelle et masculine (Figaro magazine, l'Equipe, Auto-Plus) et
par voie d'affichage dans des zones urbaines Toulouse, Bordeaux et Paris et des
aéroports.
Encore faut-il comparer ces communications avec celles des
concurrents. Par exemple huit annonces pleine page de spiritueux ou champagnes
publiées dans les Figaro magazine de fin d'année 2006,
au milieu des publicités pour parfums, montres et voitures haut de
gamme. Toutes montrent le produit ou une partie symbolique (bouchon,
étiquette) sur un fond monochrome sombre en général. La
moitié des représentations sont accompagnées d'un court
slogan comme « laissez votre empreinte », « l'art d'être
soi-même ». Pas de présence humaine n'est constatée,
tout comme un minimalisme absolu centré sur le produit. La promotion de
l'Armagnac ne se distingue en rien mais elle souffre de l'absence de l'objet
vendu. Elle est la seule à ne pas montrer le produit à acheter.
Si l'Armagnac s'inscrit dans la même démarche que de produits
prestigieux comme Grand-Marnier, Dom Ruinart ou Laurent
Perrier sans la même force de frappe.
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Ressemblances entre les communications de Champagne et
d'Armagnac
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Il est donc nécessaire de rechercher d'autres moyens de
communication que de simples campagnes annuelles classiques aux coûts
élevés et aux retombées incertaines auprès du
consommateur comme le constate Sébastien Lacroix.
L'association avec le festival « tempo-latino » de
Vic-Fezensac, le premier festival européen de musique afro-cubaine,
déjà sponsorisé par Havana Club, s'inscrit dans
cette même logique de toucher des univers différents. Une musique
festive, tropicale et dansante contraste avec l'austérité de
l'Armagnac traditionnel consommé assis, entre intimes et de
manière solennelle. L'Armagnac y est présenté comme une
boisson pour « long drink » à l'égal du rhum. Le
cocktail vendu cette occasion « Gascon'Gas » permet de mettre en
contact un public plus jeune avec des eaux-de-vie accessibles au moyen d'une
formule mix-drink pour une consommation différente. Cette tentative se
renouvelle lors des fêtes traditionnelles de la ville de Vic-Fesanzac,
« pentecôtavic ». Ces expériences ne sont pas toujours
très concluantes malgré les succès d'un soir, le suivi
semble difficile à estimer. Loin des chais poussiéreux, de la
basquaise et du grand-père au béret, l'Armagnac rentre dans le
cercle des boissons internationales. Cela ne suffit pas à le rendre
différent et surtout demandé.
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