Interactions et ancrage territorial des industries créatives: le cas de la Belle-de-Mai à Marseille( Télécharger le fichier original )par hélène sEVERIN Université Aix-Marseille - Master 2 géographie du développement 2015 |
c) Le développement de ces projets culturels a-t-il profité au quartier sur le plan économique ?Comme nous le savons, pour qu'il y ait ancrage territorial économiquement parlant entre entreprise et territoire, il faut qu'il y ait une certaine synergie entre ces deux ensembles. Pour qu'il y ai une synergie, il faut de la proximité géographique et de la proximité organisée, elle même composée d'une proximité organisationnelle et d'une proximité institutionnelle. Concernant la proximité géographique, elle a été établie, d'abord avec le territoire, puis pour les pôles entre eux. Concernant la proximité organisée, s'il est prouvé qu'elle existe, alors les entreprises doivent se développer de façons parallèles et complémentaires. Emilie GERARD, Directrice des réserves du MUCEM, nous explique qu'elle « espère tout de même qu'il y a un apport du Pôle Belle-de-Mai sur le quartier. Mais aussi un apport des pôles les uns par rapport aux autres. La proximité est importante avec les autres pôles. La réhabilitation est une réussite d'un point de vue urbain. Mais est-ce que c'est un mélange social ou plutôt un vernis social ? C'est la population aisée qui vient ici, elle repart tout aussi vite et ne prend pas le temps de s'intéresser au quartier. »114(*). Il semblerait donc qu'un des problèmes énoncés par les acteurs soit le fait qu'il y ai trop de différences sociales entre les habitants du quartier et les visiteurs du Pôle Belle-de-Mai. Mais nous pensons que cet écart est tout aussi important entre les habitants et les salariés. Le 3ème arrondissement de Marseille est le plus précaire (devant le 1er et le 2ème arrondissement) avec un indice de 26,2 points alors que la moyenne nationale est de 8 points.Cet indicateur calculé par l'INSEE prend en compte les formes les plus fréquentes de précarité : monétaire, liée à l'emploi, des familles en difficulté et au logement. Cet indice augmente entre 1999 et 2009 soit en même temps que la population. Le 1er et le 3eme arrondissement sont les plus défavorables au niveau de l'emploi sur la métropole de Marseille. La question de la formation et de l'accès à la mobilité est une question centrale. 25 % des personnes ayant terminé leurs études se retrouvent sans emploi. L'insertion professionnelle est donc un réel problème dans la question de l'emploi. La hausse du chômage progresse plus vite à la Belle-de-Mai qu'en moyenne sur Marseille. 29,4% de la population déclare être au chômage en 2009, contre 17,3% à Marseille. En 2010, on comptait 2 147 demandeurs d'emploi de catégorie ABC115(*) sur une population de 13 629 personnes (chiffre 2009). Les femmes et les plus de 50 ans sont particulièrement concernés par cette hausse. On relève une hausse de 11,2% pour les femmes par rapport à 2009 contre 7% à l'échelle de Marseille. Cela peut s'expliquer par la faiblesse des niveaux de qualifications qui rend les habitants du quartier particulièrementvulnérables à la crise économique. Le décrochage scolaire est également important sur ce territoire.Parmi les 18-24 ans, seuls 36,7% sont scolarisés (60,1% à Marseille). De plus, 64% des demandeurs d'emploi n'ont qu'un niveau baccalauréat, contre 56,6% à l'échelle de Marseille.En 2009, 35,1% de la population est sans diplôme, ce qui reste particulièrement élevé (24.4% à Marseille). À l'échelle du troisième arrondissement, en 2009, les cadres ne représentent que 2,3% des 15 ans et plus, les artisans et commerçants 2,55%, les professions intermédiaires 8,56%, les employés 18,6% et les ouvriers 15,1%. Au Pôle Belle-de-Mai, on trouve 40,98% de cadres, 41,8% d'employés, 0,82% d'ouvriers, 6,97% de professions intermédiaires et 9,43% d'artisans, commerçants et chefs d'entreprises (selon notre enquête réalisée auprès des salariés du pôle, avec 244 réponses). Il semble finalement compliqué que le Pôle Belle-de-Mai profite au quartier en matière de développement économique en vue de ces chiffres. En effet, les entreprises ne peuvent par exemple pas fournir d'emplois aux habitants du quartier qui n'ont pas du tout les mêmes qualifications que les salariés des îlots. Il semble également compliqué de fournir une formation qui, premièrement, conviendrait aux niveaux d'études des habitants du quartier et, deuxièmement, profiterait au développement de l'entreprise. Nathalie AVERSENQ nous confirme également que le développement économique du quartier par les projets du Pôle Belle-de-Mai est impossible. Concernant le Pôle Média par exemple, le but est de « créer de l'emploi pour le marché, et non pour le quartier ». L'objectif de départ était finalement de rassembler des entreprises sur un seul territoire et créer un écosystème. Mais il y a eu un problème d'explication entre les pouvoirs publics et le quartier, car le but n'était pas de développer le quartier, mais simplement un écosystème d'industries créatives. Finalement, les entreprises et plus globalement les projets que sont la Friche, le Pôle Média et le Pôle Patrimoine, ne semblent pas avoir d'encastrement territorial. Le seul encastrement territorial que les entreprises ont est dû au fait qu'elles soient implantées à la Belle-de-Mai et donc qu'elles ont une proximité géographique avec celle-ci. Par contre, il n'y a pas vraiment de directive concernant une intégration de la population et une incitation au développement local. Bien que la Friche soit de plus en plus proche du quartier, le Pôle Belle-de-Mai reste très en retrait par rapport à son territoire. * 114 Propos recueillis le 07 avril 2015 * 115Demandeurs d'emploi de catégories A, B, C : demandeurs d'emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d'emploi, et étant sans emploi (A) ou ayant exercé une activité courte (B) ou longue (C ; plus de 78 h. au court du mois) |
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