WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La protection des salariés face au harcèlement sexuel

( Télécharger le fichier original )
par Emeline LOREK
Faculté de Droit de Montpellier - Master 1 - Droit social 2015
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

PARTIE I - Les mécanismes de protection antérieurs

aux actes de harcèlement sexuel

Avant que ne soit découvert et établi un acte de harcèlement sexuel, l'employeur est tenu d'une obligation de prévention (Chapitre I).

En effet, il doit veiller à la sécurité de ses salariés et ces actes délictuels de harcèlement sexuel peuvent profondément toucher les victimes et causer de véritables atteintes à leur santé qu'elle soit physique et psychiques mais aussi à leur sécurité.

L'employeur n'est cependant pas le seul acteur de la prévention . Il est assisté par des institutions internes à l'entreprise mais aussi par des institutions externes spécialisées (Chapitre II).

La prévention tient une place très importante dans la vie d'une entreprise puisqu'elle permet de sensibiliser les différents sujets et parfois d'éviter le pire et toutes les conséquences néfastes qui en découleraient tant pour l'employeur que son salarié.

Pour bien travailler, il faut se sentir bien au sein de son entreprise et le proverbe « Mieux vaut prévenir que guérir » n'a jamais trouvé place plus pertinente.

12

Chapitre I - L'obligation de prévention pesant sur l'employeur

Afin de protéger au mieux ses salariés , l'employeur est tenu d'une obligation générale de sécurité. Cette obligation est prévue dans la quatrième partie du Code du travail intitulée « Santé et sécurité au travail » regroupant des dispositions alliant droit de la santé et de la sécurité, dispositions à vocation essentiellement préventive selon Messieurs M.-T Aubert-Monpeyssen et P.-Y Verkindt12.

De plus, l'employeur est aussi soumis à une obligation plus spécifique de prévention des actes de harcèlement sexuel prévue quant à elle par les articles L.1153-1 et suivants du Code du travail. Cette obligation de prévention est donc une obligation légale puisque prévue par les textes (Section 1) .

De plus, afin de matérialiser cette obligation, l'employeur doit adopter des mesures de prévention nécessaires (Section 2).

Section 1 - L'obligation légale de prévention de l'employeur

L'employeur est chargé d'une obligation de prévention prévue par les textes (A) et qui constitue une véritable obligation de sécurité de résultat pouvant engager sa responsabilité sans faute (B).

A) La base textuelle de l'obligation de prévention

Tout d'abord, la directive-cadre européenne 89/391/CDD du 12 juin 198913 a été transposée en droit français par la loi du 31 décembre 199114. Ainsi, l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité prévue par l' article L.4121-1 qui dispose que « L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels ,
·

2° Des actions d'information et de formation ,
·

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

12 ) Verkindt P.-Y., Les troubles psychosociaux dans l'entreprise in L'année de droit social, Lamy, coll.Axe Droit, 2010

13 ) Dir.Cons.CE n° 89/391, 12 juin 1989, JOCE 29 juin, n°L.183, modifiée par Dir. Parl. Et Cons. CE n° 2007/30, 20 juin 2007, JOUE 27 juin, n° L.165

14 ) Loi n° 91-1414 du 31 décembre 1991 modifiant le code du travail et le code de la santé publique en vue de favoriser la prévention des risques professionnels et portant transposition de directives européennes relatives à la santé et à la sécurité du travail

13

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. ».

Ainsi donc, l'employeur se doit de prendre des mesures , doit mettre en oeuvre des moyens dans le but d'assurer la sécurité et la protection de la santé physique mais aussi mentale de ses salariés.

Cette obligation de sécurité a été le fruit de débats houleux dès le moment où la Cour de cassation a considéré dans une série d'arrêts en date du 28 février 2002 (n° 99-18.389) que l'employeur était tenu d'une obligation de sécurité « en vertu du contrat de travail le liant à son salarié »15. La Chambre sociale a alors suivi ce raisonnement de maintes fois , suivie de près par la deuxième chambre civile concernant notamment les accidents du travail et les maladies professionnelles. L'Assemblée plénière est venue s'aligner dans cette optique par un arrêt du 24 juin 2005 (n°03-30.038).

Mais, la Chambre sociale a par la suite rectifié son idée en considérant tout simplement que l'employeur était « tenu envers ses salariés ». Elle ne donne plus la cause de cette obligation, que serait le contrat de travail, ce que se refuse encore à faire la deuxième chambre civile.

Donc, cette obligation est-elle imposée par la loi ou bien découle-t-elle du régime du contrat de travail ? Afin de répondre à cette interrogation, il convient de rappeler que l'employeur assume cette obligation certes à l'égard de ses salarié16 ou de « son personnel »17 mais aussi à l'égard des autres travailleurs qui se trouvent sous son autorité. La logique veut donc que cette obligation de sécurité ne dépende pas du contrat de travail mais soit une obligation légale à part entière.

De plus, il semble utile de rajouter que la notion d'employeur est prise dans un sens très large . En effet, la notion d'employeur a supplanté celle de « chef d'établissement ». Il se trouve que cette dernière semblait mal adaptée car il ne fallait pas considérer que dans le cas d'une entreprise comprenant plusieurs établissements distincts, seuls les chefs d'établissement étaient responsables et ce, seulement à l'échelle de leur établissement. C'est ainsi que le nouveau code du Travail a préféré user de la notion d'employeur, beaucoup plus adaptée. Les dispositions du Code du travail relatives à la santé et à la sécurité visent les employeurs du secteur privé mais aussi les établissements publics qu'ils soient à caractère administratif, à caractère industriel et commercial, les établissements de santé sociaux et médico-sociaux ainsi que les ateliers des établissements publics dispensant un enseignement technique ou professionnel. C'est donc en touchant une majorité d'employeurs, que les dispositions décuplent leur efficacité et leur effectivité.

15 ) P. Sargos, L'évolution du concept de sécurité au travail et ses conséquences en matière de responsabilité, JCP 2003, Doct.104

16 ) Cass.soc. 17 mai 2006 ; 21 juin 2006

17 ) Cass.soc. 5 mars 2008, n°06-45888

14

Ensuite , l'article L.4121-2 du Code du travail se rapproche davantage d'une obligation de prévention à proprement parler .

Il prévoit que « L'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

1° Eviter les risques ,
·

2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ,
·

3° Combattre les risques à la source ,
·

4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ,
·

5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ,
·

6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ,
·

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L.1152-1 et L.1153-1 ,
·

8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ,
·

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs. ».

Ici, l'obligation de prévention de l'employeur est visiblement encadrée et les champs d'application sont délimités. Parmi cette énumération, est clairement visé le harcèlement sexuel dans la mesure où l'employeur doit planifier la prévention en intégrant dans celle-ci les risques liés au harcèlement sexuel. Cette disposition n'était pas présente dans le texte d'origine 18 et a été rajoutée par la loi du 6 août 201219 relative au harcèlement sexuel et son article 7, emportant modification de plusieurs dispositions du Code du travail.

L'employeur doit aussi dans le cadre de cet article procéder à une évaluation des risques 20.

Puis, texte bien plus spécifique concernant le harcèlement sexuel , l'article L. 1153-5 du

18 ) L'ancien article L.4121-2 , 7° du Code du travail disposait alors « (...) 7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral, tel qu'il est défini à l'article L. 1152-1 »

19 ) Loi n° 2012-954 du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel

20 ) Infra Titre I, Chapitre I, Section 2 a)

15

Code du travail prévoit que « L'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel, d'y mettre un terme et de les sanctionner.

Dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l'embauche, les personnes mentionnées à l'article L. 1153-2 sont informées par tout moyen du texte de l'article 222-33 du code pénal21 . ».

Cet article a subi de nombreuses modifications au fil des lois portant sur les risques psychosociaux au travail.

En effet, tout d'abord, la loi du 6 août 2012 publiée au Journal officiel du 7 août 2012 et entrée en vigueur le 8 août 2012 a eu pour objectif principal de rétablir dans le code pénal l'incrimination de harcèlement sexuel prévue par l'article 222-33 de ce code, qui avait été abrogée par le Conseil constitutionnel dans sa décision QPC du 4 mai 2012 22 en raison de l'imprécision de sa rédaction. Cette loi est aussi venue modifier l'article L.1153-5 du Code du travail en prévoyant que « L'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel.

Le texte de l'article 222-33 du code pénal est affiché dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l'embauche. ».

Puis ,la loi du 4 août 201423 est venue apporter des précisions en énumérant les personnes devant être informées . Il s'agit de celles énumérées par l'article L.1153-2 du Code du travail soit, les salariés et les candidats à un recrutement, à un stage ou à une période de formation en entreprise. De plus, elle précise l'obligation de l'employeur qui doit prévenir les faits de harcèlement sexuel mais aussi y mettre un terme et les sanctionner. Son obligation est donc élargie et ne touche plus de manière restrictive la prévention.

21 ) L'article 222-33 du Code pénal dispose : « I. - Le harcèlement sexuel est le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

II. - Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d'user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers.

III. - Les faits mentionnés aux I et II sont punis de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende.

Ces peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende lorsque les faits sont commis :

1° Par une personne qui abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;

2° Sur un mineur de quinze ans ;

3° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience

physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur ;

4° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique

ou sociale est apparente ou connue de leur auteur ;

5° Par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice. »

22 ) Décision QPC n° 2012-240

23) Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes

16

Enfin, un accord national interprofessionnel (ANI) a été conclu en avril 2007 par l'organisation patronale Business Europe Business , l'Union Européenne de l'artisanat et des PME (UEAPME), le CEEP (Centre européen des employeurs et entreprises fournissant des services publics ) et la CES (Confédération européenne des syndicats) sur le harcèlement et la violence au travail. La transposition de cet accord au niveau national est l'occasion, pour les partenaires sociaux français, de s'emparer de ces problématiques et parfois d'aller plus loin que les dispositions prévues à l'échelle européenne. Syndicats et patronat sont ainsi parvenus à un accord sur le harcèlement et la violence au travail le 26 mars 201024. Complétant la démarche lancée par l'accord national interprofessionnel sur le stress au travail du 2 juillet 2008, il permet de transposer l'accord-cadre européen sur ce même thème. Il définit les notions de harcèlement et de violence au travail, et propose un cadre pour leur identification, leur prévention et leur gestion. Il a pour but d'améliorer la sensibilisation, la compréhension et la prise de conscience des employeurs, des salariés et de leurs représentants à l'égard du harcèlement et de la violence au travail afin de mieux prévenir ces phénomènes, les réduire, voire les éliminer et d' apporter aux employeurs, aux salariés et à leurs représentants un cadre concret pour l'identification, la prévention et la gestion des problèmes de harcèlement et de violence au travail.

Cet ANI s'apparente davantage à un code de bonne conduite qu'à un accord imposant des mesures contraignantes à l'égard des employeurs. Ces derniers restent libres dans leurs moyens de prévention et de gestion des faits délictueux 25.

B ) Une obligation de sécurité de résultat

D'après ces normes , il appartient donc à l'employeur de prendre les mesures nécessaires afin de prévenir les risques psychosociaux dans son entreprise et plus précisément en ce qui nous intéresse , les risques de harcèlement sexuel.

Cette exigence est très stricte car il est tenu d'une obligation de sécurité de résultat, obligation contenue dans l'article L.4121-2 du Code du travail. Si le risque se réalise, l'employeur aura donc manqué à cette obligation sauf si il invoque un cas de force majeure26. Il n'a donc pas de droit à l'erreur.

C'est la jurisprudence qui lui a imposé une obligation de résultat et non pas une obligation de moyen. Il ne suffit donc pas qu'il prenne des mesures nécessaires pour assurer la santé et la sécurité

24 ) Annexe 2

25 ) Infra Titre I, Chapitre I, Section 2

26 )Situation imprévisible, insurmontable et extérieure.

17

des salariés. Il doit absolument empêcher la réalisation du risque. En effet, le simple constat qu'un dommage est survenu et que le résultat n'a pas été atteint , suffit à engager sa responsabilité, peu importe qu'il n'ait commis aucune faute 27et, peu importent les mesures prises ultérieurement pour faire cesser la situation28.

L'arrêt le plus marquant en la matière est celui de la chambre sociale du 3 février 201029. Dans cette affaire, une salariée victime de harcèlement moral puis sexuel prend acte de la rupture de son contrat de travail. Afin de dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de la salariée a produit les effets d'une démission, les juges de la Cour d'Appel retiennent que l'employeur n'encourt une obligation de sécurité de résultat que dans l'hypothèse où, ne pouvant ignorer le danger auquel était exposée la salariée, il n'a pas pris les mesures nécessaires pour la protéger .Or, ces juges considèrent que l'employeur aurait satisfait à son obligation car il aurait pris des mesures afin que la salariée victime et son harceleur ne se croisent plus dans l'entreprise. Cependant, suite à leur rencontre, qualifiée par la Cour d'Appel de « fortuite » la salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

La Cour de Cassation vient donc casser l'arrêt de la Cour d'appel en considérant que « l'employeur tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, manque à cette obligation, lorsqu'un salarié est victime sur le lieu de travail d'agissements de harcèlement moral ou sexuel exercés par l'un ou l'autre de ses salariés, quand bien même il aurait pris des mesures en vue de faire cesser ces agissements. ». Ainsi donc, c'est en raison de faits reprochés à son employeur que la salarié aurait pris acte de la rupture de son contrat de travail , de ce fait la rupture doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse car les faits invoqués justifiaient bien la prise d'acte.

D'une sévérité et d'une dureté extrêmes, la Cour de Cassation consacre dans cette décision l'obligation de sécurité de résultat qui pèse sur l'employeur . Cette décision est bel et bien en adéquation avec la jurisprudence antérieure et notamment des arrêts du 21 juin 2006 (n° 05-43.914 à 05-43.919) qui rattachaient alors les dispositions relatives au harcèlement à l'obligation de sécurité de résultat.

Il y a donc une responsabilité sans faute qui est reconnue pour l'employeur. Il doit répondre à la fois des conséquences du harcèlement et prendre les mesures de prévention qui s'imposent ; la sanction du harcèlement étant la rupture du contrat de travail à ses torts et ce, même si il avait pris des mesures adéquates. La jurisprudence de la Cour de cassation semble pérenne puisqu'un arrêt de

27 ) Cass.soc, 21 juin 2006, n°05-43.914 à 05-43.919

28 ) Cass.soc.,3 février 2010 , n°08-41412 et 7 juin 2011 , n° 09-69903

29 ) Cass.soc., 3 février 2010, n° 08-40.144

18

la chambre sociale en date du 26 septembre 2012 (n° 11-21003 ) et un autre du 18 février 2014 ( n° 12-17.557) délivrent la même solution.

De plus, il n'y a pas besoin d'établir que l'employeur n'a pas pris les mesures nécessaires pour assurer de manière effective la sécurité et la santé des salariés. Il suffit juste de démontrer que le résultat n'a pas été atteint pour qu'il en découle que la prise d'acte est justifiée et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse30. Il y a donc ici un réel désir de protection du salarié.

Il semble utile de rajouter aussi que le même raisonnement est retenu en cas de demande de résiliation judiciaire du contrat de travail. En revanche, la Cour de Cassation considère que la résiliation ne se justifie pas lorsque les faits invoqués ont cessé au moment où les juges statuent 31.

Ensuite, de manière générale la tolérance d'un employeur ou son inaction sont de nature à tempérer la nature de la faute commise par une salarié. Ceci est le cas en cas de tolérance d'un employeur vis à vis des horaires fantaisistes d'un de ses salariés dans un arrêt de la Chambre sociale du 13 juillet 1989 (n°86-43.113) ou de l'usage du téléphone portable à des fins privées , pratique largement tolérée dans l'entreprise dans un arrêt de la Chambre sociale du 1er février 2011 (n°0942.786). Dans ces deux exemples, le licenciement pour faute grave ne saurait être justifié et ce, en raison de la tolérance et de l'inertie trop longtemps constatée de l'employeur.

Toutefois, ce n'est pas le cas en présence d'une situation de harcèlement au travail. En effet, en cas de harcèlement au travail, la tolérance de l'employeur doit rester sans effet sur le degré de la faute commise. La justification d'un tel raisonnement tient en l'article L.4121-1 du Code du travail et son obligation de sécurité de résultat.

Il ne saurait être admis que le manquement d'un employeur à son obligation aboutisse à sanctionner moins fermement l'auteur des faits sachant que la jurisprudence considère traditionnellement qu'il s'agit d'une faute grave. Dans un arrêt du 1er décembre 2011(n° 10-18.920) , la Chambre sociale a donc décidé que le fait que l'employeur n'ait pas sanctionné par le passé le salarié pour des faits identiques n'empêchait pas le licenciement pour faute grave du harceleur.

Cependant, bien que l'employeur puisse voir sa responsabilité engagée même sans faute il peut tout de même s'exonérer de sa responsabilité par un seul et unique moyen : démontrer l'existence d'une cause extérieure présentant les caractères de la force majeure. Il devra alors établir le caractère irrésistible et imprévisible de l'événement. Cependant, elle est très peu retenue en droit du travail32.

30 ) Cass.Soc., 12 janvier 2011 , n° 09-41139

31 ) Cass.soc., 22 mars 2006 n°03-44.750

32 ) Lefebvre F., Harcèlement et risques psychosociaux, Ed. Francis Lefebvre, 2012

19

Elle ne peut pas être admise lorsque les agissements sont le fait de tiers à l'entreprise si ils exercent une autorité de fait ou de droit sur le personnel. L'employeur doit alors répondre de mauvais traitements et insultes infligés à un salarié par l'épouse du gérant 33 ou encore de l'agression d'un salarié par son conjoint 34.

Enfin, il peut sembler utile de rajouter ici très succinctement que le travailleur est lui aussi tenu d'une obligation de sécurité affirmée d'ailleurs par la directive cadre du 12 juin 198935 , obligation secondaire voire complémentaire de celle de son employeur. Le travailleur ne bénéficie donc pas d'une immunité ou d'une irresponsabilité en matière de santé et de sécurité au travail. Le Code du travail prévoit alors qu'il incombe à chaque travailleur de prendre soin de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celle des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail et ce , en fonction notamment de la formation ou des consignes reçues36. De plus, la responsabilité du travailleur n'exclut pas celle de l'employeur selon le dernier alinéa de l'article L.4122-1 du Code du travail ; un même accident, un même harcèlement sexuel peut donc entraîner la responsabilité de chacun.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand