CHAPITRE 2 : DIFFICULTES ET PERSPECTIVES POUR
L'AMELIORATION DES
DITS CONTROLES
Beaucoup sont les difficultés que rencontrent
l'administration pour effectuer correctement ses fonctions et elles sont de
plusieurs ordres. Mais des solutions peuvent être apportées pour
une amélioration du service.
SECTION 1 : DIFFICULTES
L'administration des douanes, comme toute autre administration
du service public, rencontre des difficultés pour mener à bien sa
mission de contrôle des éléments de taxation. Ces
difficultés sont de plusieurs natures:
Paragraphe 1 : Difficultés par rapport au secteur
informel
L'analyse de l'ampleur du secteur informel a montré que
ce dernier constitue un dilemme pour l'Etat: d'une part, il constitue un acteur
économique important dont il ne serait pas souhaitable de freiner la
croissance et, d'autre part, il n'observe pas les règles et normes
édictées par la législation. Ce non-respect des
législations en vigueur et la non présentation de documents
fiables entraînent naturellement des difficultés sur le plan des
contrôles douaniers.
Cependant, si l'existence et la fiabilité des
éléments constituant la déclaration sont souvent exactes
pour le secteur structuré (ou formel) tel n'est pas le cas pour celui
non structuré (ou informel). En effet, ce dernier échappe
facilement aux contrôles douaniers. Ainsi, nous distinguons :
A. Les problèmes posés par le secteur
informel : Ils sont de deux ordres :
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DETAIL
a) Le défaut de visibilité
administrative :
Le secteur informel composé en général
d'acteurs non alphabétisés n'est pas structuré. C'est un
secteur qui manque de visibilité administrative (NINEA), de civisme
fiscal et est plutôt attiré par le gain facile. La bonne
connaissance du secteur informel est rendue difficile par la nature même
du processus de création des entreprises et du mode opératoire de
ses membres.
D'une part, la création n'obéit à aucune
législation, ce qui explique la difficulté de l'administration
à les identifier, à les répertorier et à exercer un
contrôle notamment fiscal sur leurs activités. Or, l'application
de la valeur transactionnelle et l'octroi d'un régime
préférentiel exigent que chacun des acteurs, en particulier les
importateurs, puissent être appréhendés à travers
leur identité (siège social, raison sociale, identification
fiscale, etc.), leurs activités et chiffres d'affaires, ainsi que la
tenue d'une comptabilité en bonne et due forme. D'autre part, il faut
connaître le mode opératoire de l'entrepreneur informel qui
fonctionne grâce à son sens des affaires. En effet, il
évolue par escalier : d'abord la Mauritanie, la Gambie puis le Maroc et
ensuite Dubaï, l'Europe et le reste du monde. Son manque d'instruction
fait qu'il ne calcule pas les risques de son entreprise et fait confiance
davantage à son intuition et à ses relations. Il ne
réfléchit pas souvent aux conséquences juridiques des
actes qu'il pose. L'essentiel est de réaliser une bonne affaire en usant
au besoin de tous les subterfuges possibles.
Toutefois certains acteurs du secteur ont tendance à
se conformer à la législation, ce qui est à encourager.
b) La recrudescence de la fraude sur la valeur :
Depuis, la mise en oeuvre de la valeur transactionnelle, il a
été noté une recrudescence de la fraude sur la valeur,
portant plus particulièrement sur des cas de minoration de valeur.
La sous-facturation à l'importation est devenue une
pratique courante au Sénégal et l'on s'accorde à dire
qu'elle touche aujourd'hui environ 60% des importations. Elle est le plus
souvent orchestrée à partir des pays tels que la Corée du
Sud, Chine, Thaïlande, Dubaï, Italie, Espagne...
La tendance à la sous-facturation est un
phénomène qui prend de l'ampleur. Elle s'appuie sur des factures
spécialement « confectionnées sur mesure » pour l'usage
de la douane. Celles-ci indiquent pour n'importe lequel des composants de la
valeur Caf, des montants nettement
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inférieurs aux valeurs réelles. Le but est de
faire baisser coûte que coûte la base taxable dans des proportions
assez variables selon les cas par rapport à la valeur en douane.
Le modus opérandi est très large et consiste le
plus souvent soit :
> à acheter les marchandises FOB et à porter
dans la facture un montant CAF,
> à diviser le prix unitaire CAF ou FOB par 2 ou 3,
> à faire transiter les marchandises dans d'autres
pays et d'établir une nouvelle facture minorée.
Les multinationales et leurs filiales ou toutes autres formes
d'association de firmes en affaires peuvent constituer un cadre favorable
à de telles pratiques. En effet, la sous-facturation suppose une entente
ou tout au moins une tacite complicité entre le fournisseur et
l'importateur. Ces ententes peuvent revêtir plusieurs formes :
> indication de prix faux sur la facture établie
à l'acheteur ;
> cession de facture vierge laissant à l'importateur
l'initiative de la remplir selon ses convenances.
Il est constaté que, de façon
systématique, les importations de marchandises en provenance des pays
asiatiques notamment la Chine par le biais du secteur informel
précisément sont, à plus ou moins 100% des marchandises
sous-facturées. Les circuits bancaires officiels sont contournés
ou ne sont exploités que pour les montants déclarés
à la douane. La différence entre le prix réellement
payé et le montant minoré porté sur les factures sera
tenue à la disposition du fournisseur dans un pays préalablement
convenu et qui pourrait être le pays d'importation de la marchandise.
Ces pratiques, si elles présentent pour l'importateur
un intérêt évident, grèvent considérablement
les recettes de l'Etat, occasionnant d'importants manques à gagner.
Aussi, contribuent-elles à annihiler les protections mises en place par
la Douane et au bout du compte, les statistiques du commerce extérieur y
perdent de leur fiabilité. En outre, elles faussent le jeu de la
concurrence sur le marché intérieur. L'importateur qui se livre
à de telles pratiques a le choix entre :
> vendre ses marchandises au même prix que sur le
marché : dans ce cas, il engrange d'énormes profits ;
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> vendre moins cher que sur le marché
intérieur, ce qui conduit à la longue à éliminer
ses concurrents.
En tous les cas, les moyens de lutte contre de telles
pratiques doivent être renforcés. Cela appelle une très
grande vigilance lors du contrôle immédiat et surtout une
rationalisation des contrôles a posteriori. En sus, des sanctions
très sévères devraient être appliquées
à ceux qui se rendraient coupables de tels actes frauduleux.
B. La problématique des transitaires «
ambulants » et des petites maisons de transit :
Le phénomène nouveau constaté ces
dernières décennies est l'apparition, à côté
des commissionnaires en douane agréés, d'une catégorie
d'acteurs appelés « transitaires ambulants » qui sont, en
fait, des intermédiaires entre les propriétaires des marchandises
et les commissionnaires agréés. Ces « transitaires ambulants
» constituent aujourd'hui une corporation informelle très dynamique
qui a réussi à constituer un écran entre les
commissionnaires en douane agréés et les importateurs du secteur
informel. Ces « facilitateurs » non répertoriés,
perturbent les procédures de dédouanement et accroissent le
niveau de la fraude commerciale.
Le procédé est simple. Ils vont démarcher
des clients au Port ou à l'Aéroport, leurs établissent la
déclaration en essayant toujours de jouer sur la valeur et, moyennant le
paiement d'une certaine somme d'argent, obtiennent le cachet du commissionnaire
agréé. Ce dernier, conscient du fait qu'il reviendra toujours
à l'importateur en cas de contentieux de payer les droits compromis, ne
mesure pas toujours la gravité de son acte et les conséquences de
droit qui pourraient en découler. Aussi, sans une étude
approfondie de la déclaration, il signe et appose son cachet sur la
déclaration et la remet au « transitaire ambulant » qui se
charge du reste de la poursuite des opérations de
dédouanement.
En somme, il existe une véritable inorganisation voire
une désorganisation dans ce secteur. L'existence de ces « passeurs
de pièces » et le nombre croissant des maisons de transit qui se
créent, font régner une concurrence malsaine au sein de la
profession. C'est la logique commerciale qui l'emporte le plus souvent. La
grande majorité des contentieux portant sur la valeur sont
relevées sur les déclarations levées par ces
sociétés. Les plus grands courants de fraude
démantelés par la Douane ont toujours été
perpétrés avec la complicité active de
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DETAIL
certains commissionnaires en Douane agréés, peu
soucieux de leur image de marque et de la préservation des
intérêts supérieurs de la nation.
Dans un tel contexte, une bonne application de l'accord sur
l'évaluation dont le fondement repose sur la confiance entre la douane
et les opérateurs, apparaît quasiment impossible. En outre, la
complexité et la technicité des règles de
procédures à suivre appellent de la part des commissionnaires en
douane agréés une formation solide et un équipement
informatique performant. Toutes choses qui restent encore à
réaliser.
Aussi, faudrait-il pousser voire contraindre les
commissionnaires en douane à mieux s'organiser.
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