SECTION 2 : L'échange complémentaire ou
contraire des consentements en dehors du site internet.
Comme nous l'avons déjà évoqué,
l'acheteur a la possibilité de contacter son styliste par tout moyen de
son choix, entre les deux clics.
En effet, le numéro de téléphone et
l'adresse mail du styliste s'affichent à l'écran sur la page
récapitulant le détail de la commande que le destinataire de
l'offre a adressée à l'offrant, avant qu'il ne procède
à la confirmation de son acceptation.
Cette possibilité permet ainsi à l'acheteur de
préciser ses choix ou de les contredire et donc de modifier les termes
de l'accord pendant la phase d'acceptation ou après celle-ci. Cette
particularité démontre les failles de l'exigence d'une double
acceptation, dans la mesure où des échanges peuvent de nouveau
avoir lieu entre chacun des deux clics et modifier peu ou prou la commande dont
il est accusé réception. Ainsi, le deuxième clic
permettrait-il de conclure valablement le contrat électronique ?66
Nous pensons qu'il y a lieu de distinguer selon le support de
communication utilisé par les parties pour échanger entre les
deux clics. En effet, la procédure spécifique d'échange
des consentements consacrée à l'article 1369-5 du Code civil
s'applique pour les contrats conclus « par voie électronique »
comme le prévoit l'article 1369-4 du Code civil. La question est donc de
savoir si le téléphone mobile, l'email, et le
téléphone audiovisuel par Internet, sont des supports de
communication « électroniques ».
Deux strates de textes doivent êtes analysées pour y
répondre :
-la strate européenne composée de la directive
du 8 juin 200067 dite « Commerce électronique » qui
consacre une section 3 « Contrats par voie électronique »
(§1) ;
66 Il ne s'agit pas de savoir quel contrat a été
conclu, mais de savoir si la procédure d'échange des
consentements est respectée.
67 Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du
Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des
services de la société de l'information, et notamment du commerce
électronique, dans le marché intérieur, JOCE L
178, 17 juillet 2000, p. 1.
55
-la strate interne, l'article 11 de la directive ayant
été transposé par la LCEN du 21 juin 200468 aux
articles 1369-1 et suivants du Code civil, devenus les articles 1369-4
après qu'elle a été modifiée par une ordonnance du
16 juin 200569 (§2).
§ 1 L'exclusion européenne du
téléphone mobile et de l'email, des supports de conclusion d'un
contrat électronique.
La section 3 de la directive du 8 juin 2000, intitulée
« contrats par voie électronique », ne définit pas la
« voie électronique ». Il semble néanmoins que cette
notion puisse être définie au travers de la notion de «
service de la société de l'information ».
En effet, les articles 10 et 11 qui prévoient
respectivement les informations à délivrer et la procédure
de passation d'une commande, font référence successivement au
prestataire de service et au destinataire de service, qui semblent être
les parties au contrat électronique.
Or, l'article 2 de la directive, définit le «
prestataire » comme une personne qui fournit un « service de la
société de l'information », et le destinataire de service
comme la personne qui utilise un « service de la société de
l'information », de sorte qu'il y a tout lieu de considérer que le
contrat par voie électronique est celui qui a pour objet un «
service de la société de l'information ».
L'article 2 a) procède alors à une
définition du « service de la société de
l'information » par renvoi à l'article 1er paragraphe 2
de la directive 98/34/CE70, telle que modifiée par la
directive 98/48/CE, étant précisé qu'aux termes du
considérant 18 de la directive, la conclusion des contrats en ligne est
un service de la société de l'information en tant que tel.
68 Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans
l'économie numérique, JORF, 22 juin 2004, p. 11168.
69 Ord. n° 2005-674 du 16 juin 2005 relative à
l'accomplissement de certaines formalités contractuelles par voie
électronique, JORF n°140 du 17 juin 2005, p. 10342.
70 Directive 98/34/CE du Parlement européen et du
Conseil du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d'information
dans le domaine des normes et réglementations techniques et des
règles relatives aux services de la société de
l'information, Journal officiel, n° L 204 du 21/07/1998 p. 0037 -
0048.
56
Cet article définit le service de la société
de l'information comme :
Tout service presté normalement contre
rémunération, à distance par voie électronique et
à la demande individuelle d'un destinataire de services.
Ainsi, un service de la société de l'information
est en tout état de cause délivré à titre
onéreux, fourni à distance, c'est-à-dire, sans que les
parties soient simultanément présentes, et à la demande
individuelle d'un destinataire de services, ce qui ne pose cependant pas de
problème en l'espèce.
En revanche, les autres éléments de la
définition font l'objet de plus de difficultés.
En effet, on entend par « voie électronique »
aux termes de cet article « un service presté à
l'origine et reçu à destination au moyen d'équipements
électroniques de traitement (y compris la compression numérique)
et de stockage de données, et qui est entièrement transmis,
acheminé et reçu par fils, par radio, par moyens optiques ou par
d'autres moyens électromagnétiques ».
Au regard de cette définition, il semblerait que
l'utilisation du téléphone mobile nous empêche de
considérer qu'un service de la société de l'information
aurait été fourni par le vendeur à l'acheteur, dans la
mesure où cette technologie ne met pas en oeuvre une technique de
stockage et de traitement de données.
En effet, comme le confirme l'annexe 5 de la directive
98/34/CE qui fournit une liste - simplement indicative cependant - de services
« non fournis par voie électronique », doivent être
considérés comme « non fournis par voie électronique
» les services qui ne sont pas fournis au moyen de systèmes
électroniques de stockage et de traitement des données, ainsi des
services de téléphonie vocale. L'utilisation du
téléphone mobile entre les deux clics n'aurait donc pas
d'incidence en ce qui concerne le cas qui fait l'objet de la présente
étude.
En revanche, un service fourni par email serait tout de
même un service de la société de l'information de sorte
qu'on ne pourrait pas exclure l'application de la procédure
prévue à l'article 11 sur ce fondement.
57
Ainsi, s'il faut considérer qu'on peut délivrer
un service de la société de l'information par email, il faut
cependant exclure la procédure spécifique prévue à
l'article 11 car dans ce cas, l'article 11 3° considère qu'une
telle procédure n'est pas applicable aux « contrats conclus
exclusivement au moyen d'un échange de courrier électronique ou
au moyen de communication individuelles équivalente
»71.
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