§ 2 Le doute sur l'inclusion française du
téléphone mobile dans le support de conclusion d'un contrat par
voie électronique
La transposition de la directive européenne par la
LCEN72 modifiée par une ordonnance du 16 juin
200573 n'est pas exactement fidèle.
Ainsi, il nous faut se reporter à l'article 1 II du
chapitre 1 intitulé « la communication au public en ligne »,
pour trouver des dispositions semblant définir la « voie
électronique ». En effet, cet article modifie la loi du 30
septembre 198674 relative à la liberté de
communication pour considérer qu'on entend par « communications
électroniques les émissions, transmissions ou réceptions
de signes, de signaux, d'écrits, d'images ou de sons, par voie
électromagnétique » et « par communication au
public par voie électronique toute mise à disposition du public
ou de catégories de public, par un procédé de
communication électronique, de signes, de signaux, d'écrits,
d'images, de sons ou de messages de toute nature qui n'ont pas le
caractère d'une correspondance privée. »
La première phrase nous semble donc être
suffisamment générale pour inclure tout moyen de communication
dès lors qu'il est technologique.
71 Il y aurait tout lieu d'exclure le téléphone
et skype également sur ce point dans la mesure où par analogie,
un tel moyen de communication nous semble être un moyen de communication
individuelle, équivalent à l'email.
72 Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans
l'économie numérique, JORF, 22 juin 2004, p. 11168.
73 Ord. n° 2005-674 du 16 juin 2005 relative à
l'accomplissement de certaines formalités contractuelles par voie
électronique, JORF n°140 du 17 juin 2005, p. 10342.
74 Loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 dite Leotard,
relative à la liberté de communication, JORF du 1
octobre 1986, p. 11755.
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Cependant, la deuxième phrase fait appel à la
notion de public et de catégorie de public, pour exclure notamment les
moyens de communications qui relèvent d'une correspondance
privée. Tout l'enjeu est de savoir si « la voie électronique
» dont il est question à l'article 1369-4 du Code civil doit
être définie en appliquant cumulativement ces deux phrases ou
uniquement la première qui semble être plus
générale.
L'article 1369-6 alinéa 1er du Code civil
doit nous conduire à favoriser la deuxième hypothèse dans
la mesure où cet article n'exclut pas le contrat conclu par
échange d'emails de la définition du contrat électronique
- à la différence des conséquences qu'il faudrait tirer de
l'application de la deuxième phrase précitée - mais
uniquement du régime juridique prévu aux articles 1369-4 et
suivants.
Ainsi il y aurait tout lieu de penser qu'un contrat conclu par
voie électronique est un contrat conclu via un moyen de communication
conforme à la première phrase de l'article 1 II de la LCEN, ce
qui englobe les contrats conclus directement sur un site internet ou par emails
ou par téléphone mobile, mais que les règles
prévues aux 1° à 5° de l'article 1369-4 et aux deux
premiers alinéas de l'article 1369-5 du Code civil, ne sont pas
applicables aux contrats conclus par email.
Au vu de ce qui vient d'être dit, le styliste devrait
donc respecter la procédure prévue à l'article 1369-5 du
Code civil lors de sa conversation avec l'acheteur si ce dernier venait
à préciser ou modifier sa commande. Ainsi, il lui appartiendrait
de récapituler à la fin de la conversation, toutes les demandes
que l'acheteur a formulées, et de lui faire accepter une deuxième
et dernière fois le contenu de sa commande complémentaire ou
modificative.
Cependant, une question autrement plus importante se pose.
En effet, il s'agirait de savoir si le vendeur doit accuser
une nouvelle fois réception de sa commande en faisant apparaître
un récapitulatif modificatif à l'écran, pour permettre
à l'acheteur de valider valablement son achat. Il nous semble qu'une
telle conclusion devrait être tirée dans la mesure où
à défaut, l'acheteur confirme accepter une commande qui aura
pourtant été modifiée.
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Si cependant l'échange a lieu par email, le respect de
la procédure prévue à l'article 1369-5 du Code civil ne
nous semble pas devoir être remis en question dès lors qu'une
telle procédure est exclue pour les contrats qui sont conclus par
échange d'emails.
Ainsi, comme on le voit, la procédure d'échange
des consentements applicable au contrat électronique n'est pas sans
poser de nombreuses difficultés à la vente surprise à
l'essai lorsque cette dernière est conclue à distance et que,
pour compliquer le tout, le vendeur offre à l'acheteur la
possibilité d'échanger avec lui en dehors du site Internet.
D'autres difficultés sont également
suscitées par le caractère indéterminé des
éléments essentiels qui sont l'objet du contrat, dans la mesure
où, en particulier dans la vente, le législateur exige que le
prix et la chose soient précisément déterminés au
stade de la conclusion du contrat.
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