C'est en raison de l'exclusivisme, de la «
quête du typique » communautaire, réelle ou
supposée, des associations dites communautaires que le qualificatif
« communautaristes » leur est quelques fois assigné.
Une assignation à
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géométrie variable, selon les communautés
en présence130et la catégorie socio-professionnelle et
le statut de ceux qui expriment ce discours.
Les critiques sont portées par des acteurs tant du
monde institutionnel qu'associatif, y compris certains immigrés
eux-mêmes, qui y voient les germes du cloisonnement ethnique,
l'expression du repli identitaire, de la non-fluidité interculturelle
dans une société culturellement plurielle, de la non-ouverture
à d'autres communautés migrantes africaines ou autres et
non-migrantes, et du risque réel du cloisonnement des associations de
migrants. Ceci explique d'ailleurs en partie l'attitude frileuse des pouvoirs
publics à subventionner les associations d'entraide et de
solidarité intracommunautaires qui sont du coup le parent pauvre de
l'octroi des financements publics. Sans doute en raison d'un
préjugé fort tenace des instances politiques et administratives,
que résume fort à propos un élu communal du Grand Lyon
:
« Il y a une espèce de volonté de ne
pas passer par les associations communautaires au nom de la lutte contre le
communautarisme&moi je fais très clairement la différence
entre communautarisme et l'existence des communautés. Ce n'est pas tout
à fait la même chose. Mais la réaction politique
très fréquente est quand même d'assimiler les deux et donc
de se méfier. Du coup, on a tendance à reléguer les
associations communautaires dans un rôle d'entraide interne, dans un
rôle folklorique&Elles participent aux fêtes et font la
cuisine&Mais l'idée qu'elles peuvent jouer un rôle vraiment
dans l'intégration est beaucoup moins fréquente. Du coup
ça se retrouve... .Euh&j'ai peu d'exemples à part les
Sénégalais de l'association SOPE »131.
Ainsi, d'après ces acteurs, les associations
d'entraide intracommunautaire ont plutôt mauvaise presse car, de l'avis
de leurs contempteurs, elles ne rechercheraient pas de liens extérieurs,
ni une ouverture à d'autres associations, ne serait-ce que par
curiosité de ce qui s'y fait, et bien, et ils considèrent par
conséquent qu'en dirigeant leurs actions exclusivement vers la
communauté, elles ne mènent pas nécessairement des actions
d'intérêt général et se disqualifient des chances
d'obtenir des subventions.
Conséquence de ces réticences de politiques,
les associations communautaires d'entraide fonctionnent pour l'essentiel sur
des fonds propres, qui sont bien modestes du reste. D'où un taux
d'activité annuel moyen relativement bas et la difficulté
qu'elles ont à fournir des cahiers de compte et des rapports
d'activités à jour, justifiant des actions
réalisées, des capacités financières
endogènes et des compétences fortes; conditions extrêmement
sélectives pour l'accès aux subventions publiques que ne
remplissent pas toujours ces organisations, fatalement marginalisées.