II) Les conditions d'éligibilité relatives
à l'environnement du futur candidat
Cette catégorie comprend l'ensemble des autres
conditions qui sont demandées à un candidat. Ces conditions ont
en commun de ne pas toucher directement la personne du candidat, mais le cadre
dans lequel il s'insère. Ainsi, par exemple, certaines Constitutions
obligent le candidat à être membre d'un parti politique, faute de
quoi il ne pourra se présenter à l'élection. C'est le cas
notamment en Zambie50, où il est fait obligation aux
candidats d'être membres d'un parti politique ou sponsorisés par
un parti politique. Néanmoins, lorsque les candidatures
indépendantes ne sont pas rejetées, elles sont encadrées
par l'obligation d'être supportées par un certain nombre
d'électeurs. Les Constitutions mozambicaine et
sénégalaise51 exigent toutes deux que le candidat
indépendant ait été proposé par au moins 10 000
électeurs. Ces conditions d'éligibilité sont
considérées comme servant de rempart aux candidatures
fantaisistes52, lesquelles peuvent polluer le jeu politique. Elles
permettent aussi de lutter contre l'inflation des
48 Respectivement article 44 de la Constitution du
11 décembre 1990, article 35 de la Constitution du 23 juillet 2000 et
article 99 de la Constitution du 4 juin 2003.
49 Respectivement article 35 de la Constitution du
23 juillet 2000 et article 80 de la Constitution du 18 mai 1994.
50Article 34 (3) de la Constitution du 30 août
1991.
51 Respectivement article 147 de la Constitution du
16 novembre 2004 et article 29 de la Constitution du 22 janvier 2001.
52 Ismaïla Madior Fall, Le pouvoir
exécutif dans le constitutionnalisme des États d'Afrique,
op. cit., p. 53.
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candidatures, qui ne favorisent pas une bonne
compréhension pour les électeurs des différents programmes
proposés. L'obligation de cautionnement généralement
contenue dans les codes électoraux, dans la mesure où elle impose
le dépôt d'une somme d'argent conséquente, répond
aux mêmes objectifs53.
Parmi les conditions d'éligibilité tenant
à l'environnement du candidat, on trouve une condition importante qui
est celle de la résidence. En effet, il est très largement
considéré, à travers la condition de résidence,
l'idée que pour gouverner un pays, il faut bien connaître les
réalités de celui-ci et, ainsi, y avoir vécu un certain
temps et ou y vivre au moment du dépôt de sa candidature. Il
existe une graduation dans l'obligation de résidence. Certains
États, comme le Rwanda54, exigent uniquement que le candidat
à l'élection réside dans le pays au moment du
dépôt de sa candidature. La Constitution malgache, en revanche,
demande que chaque candidat à l'élection réside dans le
pays « depuis au moins six mois avant le jour de la date limite
fixée pour le dépôt des candidatures55
». Il existe une grande diversité dans les durées de
résidence exigées. Celles-ci peuvent être de vingt-quatre
mois56, de cinq ans57 ou, dans un cas extrême, de
vingt ans, comme l'exige la Constitution zambienne58. De
façon plus originale, la Constitution centrafricaine exige que tout
candidat ait une propriété bâtie sur le territoire
national59.
On trouve également, dans le constitutionnalisme
africain, des cas d'incompatibilité qui veulent que pour être
candidat, il ne faille pas faire partie du corps militaire, ou en faire partie
mais être en position de disponibilité, une condition dont
l'origine serait la « phobie des régimes
militaires60 ». On la retrouve notamment à
l'article 62 de la Constitution tchadienne du 14 avril 1996.
L'abondance des conditions d'éligibilité en
Afrique témoigne d'une volonté de voir celles-ci jouer un
rôle actif dans la prédétermination de ce que l'on estime
être un « bon candidat », surtout à une
époque où l'on prône l'importance de la bonne
gouvernance.
53 Aux dernières élections
présidentielles au Cameroun, on dénombrait 51 prétendants
à la candidature, dont, finalement, 21 furent retenus. Dans le nouveau
code électoral, le cautionnement a été augmenté de
6 fois le montant précédemment demandé.
54 Article 99 de la Constitution du 4 juin 2003.
55 Article 46 de la Constitution du 11 décembre
2010.
56 Article 58 de la Constitution congolaise
(Brazzaville) du 20 janvier 2002.
57 Article 35 de la Constitution ivoirienne du 23
juillet 2000.
58 Article 34 (3) de la Constitution du 30 août
1991.
59 Article 24 de la Constitution du 5 décembre
2004.
60 Ismaïla Madior Fall, Le pouvoir
exécutif dans le constitutionnalisme des États d'Afrique,
op. cit., p. 52.
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Cependant, les conditions d'éligibilité ne
trouvent pas toutes un succès égal dans la réalisation de
cette tâche. Attention, donc, à ne pas les multiplier de
façon excessive, au risque de voir trop restreint l'accès
à la compétition politique. Une telle restriction se ferait au
détriment de l'intérêt collectif.
La fonction des conditions d'éligibilité est
complétée par celle d'une condition d'éligibilité
particulière : il s'agit de la limitation de mandat. En effet, cette
condition d'éligibilité remplit, quant à elle, un
rôle de bornage du pouvoir présidentiel.
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