II) Les sanctions en dehors de l'Afrique
Les instances internationales non africaines jouent
également un rôle dans la promotion de la démocratie et du
respect des règles constitutionnelles en Afrique. L'Organisation des
Nations unies est considérée par beaucoup comme « un
rempart important pour la promotion des valeurs constitutionnelles
standardisées155 ». Son action est
complétée par celle des organisations régionales du reste
du monde et par les États individuellement.
Les Nations unies manifestent un intérêt certain
pour la lutte contre les détournements constitutionnels, et notamment
pour ceux qui touchent à la question électorale. L'Organisation
craint que les actes anticonstitutionnels ne déstabilisent un pays et,
du même coup, déstabilisent les États limitrophes. Il y
aurait, en effet, « un rapport dialectique qui existe entre droits de
l'homme, démocratie et sécurité
internationale156 ». L'Organisation n'hésite donc
plus à émettre recommandations, avis et résolutions
à l'encontre des chefs d'État cherchant à se maintenir au
pouvoir par tous les moyens, juridiques et non juridiques. Pour ce qui est de
la prise de sanctions par l'organisation, celle-ci doit se faire
théoriquement uniquement lorsque les agissements du chef de
l'État constituent une cause de déstabilisation de plusieurs
États, puisqu'il faut que la paix internationale soit menacée.
Néanmoins, ces dernières années, on a vu
155 Séni Mahamadou Ouédraogo, La lutte
contre la fraude à la Constitution en Afrique noire francophone,
op. cit., p. 229.
156 Ibid., p. 229 citant Nacer-Edine Ghozali, «
Le droit des peuples à déterminer librement leur système
politique, économique social et culturel », Recueil des cours de
l'Académie internationale de droit constitutionnel, vol. XVI, p. 312.
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l'Organisation intervenir dans des États où le
conflit était purement interne157. Les sanctions des
agissements d'un chef d'État ne sont pas prises à l'encontre de
sa personne mais de l'État, et c'est le chapitre de la Charte des
Nations unies qui met en place le dispositif de mesures visant à
sanctionner. Il y a une gradation dans les prises de sanctions ; celles-ci
doivent être d'abord économiques ou politiques, le recours
à la force ne se faisant qu'en dernier ressort.
À côté des sanctions possiblement
applicables par des organisations politiques, on trouve les sanctions dans des
politiques de coopération pour le développement entre les
États du Nord et les États du Sud. En effet, ces politiques
intègrent dorénavant des considérations politiques
là où elles n'étaient avant qu'économiques. Ainsi,
on peut citer en exemple les relations de coopération de l'Union
européenne avec les États africains. La CEE avait
déjà posé les bases des règles de la
coopération avec les États du Sud, par le règlement
européen n° 443/92 du Conseil du 25 février 1992,
introduisant l'idée selon laquelle le respect des libertés
fondamentales et principes démocratiques était une condition
préalable au développement économique et social, principe
qui sera réaffirmé dans l'accord de Cotonou du 23 juin 2000, un
accord de partenariat unissant l'UE et les pays d'Afrique, des Caraïbes et
du Pacifique (ACP). Cet accord est accompagné d'un dispositif de
sanctions à l'encontre des manquements à la démocratie.
Ces sanctions doivent être en conformité avec les droits
internationaux et proportionnels à la violation158. Il s'agit
de sanctions d'ordre économique.
On constate que malgré le panel de sanctions
susceptibles d'être portées à l'encontre d'un États,
celles-ci ne permettent pas de remplir leur fonction dissuasive à
l'égard des chefs d'État désireux d'instrumentaliser les
textes fondamentaux de leur État.
157 C'est le cas de la Côte d'Ivoire lors des troubles
postélectoraux de 2011.
158 Séni Mahamadou Ouédraogo, La lutte
contre la fraude à la Constitution en Afrique noire francophone,
op. cit., p. 230-233.
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