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Conditions d'éligibilité du président de la république et démocratie en Afrique subsaharienne

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par Eveline RODRIGUES PEREIRA BASTOS
Université Paris I Panthéon-Sorbonne - Master 2 droits africains 2011
  

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Chapitre 2 : L'existence de sanctions des détournements des

conditions d'éligibilité ?

La faiblesse de l'État de droit en Afrique, corrélée à l'hyperprésidentialisme existant dans de très nombreux États nous amène souvent à avoir l'impression d'une impunité totale à l'égard des dirigeants sur le continent. Néanmoins, au-delà des impressions et des apparences, il serait intéressant de s'interroger sur l'existence de mécanismes institutionnels, sociaux ou politiques permettant de lutter contre ce problème d'impunité. Il faut, dans un premier temps, s'interroger sur l'existence de ces mécanismes et leur efficacité en interne, c'est-à-dire à l'échelon étatique, car il s'agit de l'échelon le plus proche du chef de l'État (Section 1), puis s'interroger sur leur existence et leurs influences au plan international, un échelon incontournable à notre ère de mondialisation (Section 2).

Section 1 : La recherche de sanctions internes aux États

La question des sanctions doit être abordée largement et, ainsi, englober à la fois les sanctions juridiques et les sanctions politiques. Lorsque l'on parle de sanctions juridiques, il faut nécessairement aborder la question de la responsabilité de l'individu susceptible de faire l'objet de sanctions. En effet, sans responsabilité, il n'y a pas de sanction et vice-versa. Néanmoins, la question de la responsabilité du président de la République ne va pas de soi en droit constitutionnel, puisque, par exemple, la Constitution française de la ye République, qui a servi de modèle à de nombreuses Constitutions africaines, consacre l'irresponsabilité comme règle de principe. Aujourd'hui, l'option pour la responsabilité juridique du président de la République est largement partagée par les États du continent. Il faut donc étudier la forme que prend cette responsabilité, ainsi que son effectivité (I), le politique n'étant pas non plus à négliger, puisque dans le contexte des États africains, il faut rappeler que de nombreuses évolutions institutionnelles ont été initiées non pas par des actes juridiques, mais par des actes politiques. Ces actes politiques prennent diverses formes : coup d'État, soulèvements populaires, réprobations par les urnes, etc., et il faudra s'interroger sur l'efficacité des sanctions non juridiques en interne (II).

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I) La sanction juridique : la question de la responsabilité du président de la République

La responsabilité du président de la République, en Afrique francophone, est fortement tributaire du legs de la Constitution française de 1958, par la référence quasi unanime à la haute trahison. En effet, dans de nombreux États, la « haute trahison » est la seule cause permettant d'engager la responsabilité du chef de l'État. Dans cette mesure, on peut se demander si cette cause d'engagement de la responsabilité permet de mettre en accusation un président dans le cas où il aurait porté atteinte à la Constitution, par une violation pure et simple du texte ou une instrumentalisation de celui-ci à des fins personnelles, par exemple. Néanmoins, on constate que, souvent, l'expression de « haute trahison » n'est pas définie par les textes et que ceux-ci ne permettent donc pas de savoir si la violation constitutionnelle est considérée comme telle. Ce silence constitutionnel se retrouve au Sénégal, au Togo et en Côte d'Ivoire. Mais, fort heureusement, il y a des États dans lesquels on apporte plus de précisions sur la notion. Il s'agit, par exemple, de la Constitution centrafricaine, laquelle, à son article 96, énumère une liste non exhaustive d'actes susceptibles d'être qualifiés de « haute trahison ». Parmi ces actes, on trouve la violation du serment et, si on examine le serment reproduit à l'article 25, on constate bien que celui-ci fait promettre au président investi « de ne jamais exercer les pouvoirs qui [lui] sont dévolus par la Constitution à des fins personnelles ».

En revanche, d'autres États ont su s'affranchir de la simple responsabilité pour haute trahison et proposent, en plus de celle-ci, d'autres causes d'engagement de la responsabilité, autonomes et qui, pour certaines, sanctionnent directement la violation constitutionnelle. Ainsi, la Constitution malgache prévoit, à l'article 131, trois cas d'engagement de la responsabilité présidentielle, parmi lesquels le cas de « violation grave, ou de violations répétées de la Constitution ». On retrouve également ce type de responsabilité dans les Constitutions non francophones, comme c'est le cas en Angola, où la Constitution, à l'article 129, prévoit la destitution du président de la République pour crime de violation de la Constitution. Seulement, dans ce cas, seule la violation aboutissant à la violation de l'État de droit démocratique, la sûreté de l'État ou le bon fonctionnement des institutions est incriminée. On pourra estimer que l'État de droit démocratique est violé lorsqu'un opposant est empêché de se présenter aux élections, car celui-ci fait peur au pouvoir en place.

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La sanction déterminante prévue en cas de condamnation, suite à l'engagement de la responsabilité du président de la République, est la révocation. Cependant, en ce qui concerne l'effectivité des textes en la matière, il faut faire plusieurs remarques. Tout d'abord, la mise en accusation du président de la République reste très rare sur le continent africain. Ainsi, Ismaïla Madior Fall ne manque pas de « souligner le caractère illusoire et chimérique de la haute trahison ». Selon lui, ce qui rend difficilement applicable les textes sont « la rationalisation de la procédure de mise en oeuvre de la responsabilité combinée avec le phénomène majoritaire, [et] d'autre part aux conséquences infamantes de la destitution pour haute trahison151 ». En effet, il est important de souligner que les instances chargées de mettre en accusation le président de la République sont généralement les députés de l'Assemblée nationale et/ou du Sénat, qui sont, dans la plupart des cas, dévoués à celui-ci.

L'auteur précédemment cité reprend une observation intéressante selon laquelle « il est admis en fait et en doctrine que la seule forme de responsabilité présidentielle qui vaille est, ainsi que le souligne Claude Emeri152, celle qui se joue devant le corps électoral à l'occasion de consultations électorales (nationales) ou référendaires153 ». La menace de la sanction politique serait donc la seule à dissuader le président de la République de frauder la Constitution ? Ce qui est sûr, c'est que la sanction politique n'est pas la seule à pouvoir être mise en jeu.

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