B. LE TRANSFERT DES SURETES ATTACHEES A LA CREANCE
L'analyse de l'objet de la cession des créances (1)
constitue un prétexte pour mettre en évidence les principes qui
gouvernent l'opposabilité de cette opération aux tiers (2).
1. LE TRANSFERT DES SURETES OBJET DE LA CESSION DES
CREANCES
L'article 1692 du Code Civil dispose que : «
la vente ou cession d'une créance comprend les accessoires de la
créance, tels que caution, privilège et hypothèque».
Cette disposition est reprise dans le code monétaire et
financier français en son article L. 214-43 en ces termes :
« la remise du bordereau entraîne de plein droit le
transfert des sûretés, des garanties et des accessoires
attachés à chaque créance y compris les
sûretés hypothécaires, et son opposabilité aux tiers
sans qu'il soit besoin d'autres formalités ». Cette
position est également contenue dans le chapitre III de l'Acte Uniforme
OHADA qui traite des obligations338.
Toute cette législation vise à simplifier la
technique de cession des créances par le contournement du formalisme du
droit commun du transfert des sûretés réelles. En effet, la
transmission des créances et des sûretés qui y sont
attachées facilite et a une influence sur l'aspect financier de
l'opération de titrisation des créances.
En effet, aux yeux du créancier, une créance
aura d'autant plus de valeur si elle est garantie par une sûreté.
La sûreté s'entend ici d'un mécanisme qui permet aux
créanciers de ne pas souffrir de l'insolvabilité de son
débiteur. Ainsi, selon l'article 1692 du code civil, la
sûreté est un accessoire attaché à une
créance déterminée. C'est la raison pour laquelle, un
régime spécifique prévoit sa transmission avec la
créance à laquelle elle est liée. Se trouve donc
codifiée la maxime « accessorium sequitur principal
suum ». Plusieurs raisons ont étés
avancées pour justifier cette maxime. L'une d'entre elles consiste
à dire que le cessionnaire ne peut avoir de droits plus étendus
ni moindres que ceux du cédant. Une autre explication est
338Acte uniforme du 17 avril 1997 relatif au droit
des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt
économique, op.cit. PP.538 et s.
Mémoire présenté et soutenu publiquement par
NYANGOE Guy Arsène Page 111
Les mécanismes de gestion de la dette publique
intérieure du Cameroun : le cas de la titrisation
apportée par le principe de la conservation des titres
transmis qui a pour conséquence le fait que la créance passe au
cessionnaire avec tous ses attributs, positifs et négatifs. Cela est
d'autant plus vrai que les agences de notation en tiennent compte pour
apprécier les risques inhérents aux créances
titrisées.
Aussi, la garantie ou la caution qu'offre l'Etat pour les
dettes de ses démembrements provoque le changement de la personne du
créancier. La prise en compte de cet élément est
nécessaire pour une meilleure transmissibilité des cautionnements
dans le cadre de transmission universelle du patrimoine.339
2. L'OPPOSABILITE DE LA CESSION DES CREANCES AUX
TIERS
La notion de « tiers » est
diversement appréhendée en droit et particulièrement par
le lexique des termes juridiques. Un tiers est une « personne
n'ayant été ni partie ni représentée à un
acte où à un jugement, par conséquent non liée par
effet obligatoire »340. Dans le cas
d'espèce, par tiers, il faut entendre soit les créanciers de
l'établissement cédant soit les débiteurs
cédés.
En ce qui concerne l'opposabilité de la cession de
créances aux créanciers de l'établissement cédant,
Thierry GRANIER et Corynne JAFFEUX énoncent le principe
selon lequel « les créanciers ne pourront exercer un
droit quelconque sur les créances cédées qui sont
effectivement sorties du patrimoine de l'établissement cédant
».341 En d'autres termes, la remise du bordereau
de cession a bloqué la procédure de mise en oeuvre d'un vote
d'exécution en matière d'opposabilité de la cession.
Cependant, ce principe n'est pas d'application absolue. En effet, la cession
peut être remise en cause par un créancier de
l'établissement cédant par le biais de l'action
paulienne342. Cette action permet aux créanciers d'attaquer
un acte fait par leurs débiteurs en fraude de leurs droits prévus
dans l'article 1167
339 Voir le décret n° 99/2010 du 22
décembre 1999 portant certaines entreprises du secteur public et
parapublic à la procédure de privatisation.
340 GUILLIEN (R), VINCENT (J) et les autres, Lexique des
termes juridiques, op.cit. P. 704.
341 GRANIER (T) et JAFFEUX (C), La titrisation, aspects juridique
et financier, op.cit, P.101.
342 TERRAY (J), DE KERGOMMEAUX (X), Fonds Commun de
Créances, Rép. Sociétés, Encyclopédie,
Dalloz, N°159.
Mémoire présenté et soutenu publiquement par
NYANGOE Guy Arsène Page 112
Les mécanismes de gestion de la dette publique
intérieure du Cameroun : le cas de la titrisation
du Code Civil. Aussi, si la cession intervient pendant une
période suspecte fixée par le tribunal en cas de cessation de
paiement de l'établissement cédant, elle entre dans la
catégorie des actes susceptibles d'être annulés.
Par ailleurs, la cession est également opposable aux
débiteurs cédés. A l'origine, la notification du
débiteur par simple lettre de cession suffisait à valider
l'opération. C'est du moins ce qui ressort de l'article 34 de loi de
1988 portant création du FCC. En effet, de vifs débats et
interrogation des professionnels et de la doctrine on été
suscités par la rédaction initiale de cet article. Cette
technique s'est avérée inefficace dans le transfert des
sûretés même si l'opposabilité aux tiers à
été supprimée par la suite. C'est la raison pour laquelle
une autre technique lui a été préférée.
Suivant celle-ci, seul le changement de la personne chargée du
recouvrement devrait être notifié par le débiteur
cédé. Le bémol ici est la portée imprécise
de cette notification. L'analyse de la théorie qui encadre la cession
des créances donne l'opportunité d'envisager la gestion
boursière de celle-ci d'une manière générale et
singulièrement les EPN.
|