EPN
Le Code Civil, dans ses articles 1689 et suivants
définit les modes du transfert de propriété des titres de
créances. Mais en ce qui concerne le transfert des EPN, le Cameroun a
mis sur pied une procédure particulière (A). Au regard de la
diversité de ces modes, l'analyse de leur régime juridique
s'impose comme un impératif (B).
A. LES DIFFERENTS MODES DE TRANSFERT DE PROPRIETE DES
TITRES DE CREANCES
Certains modes de cession de créances sont
définis par le code civil (1). Cependant la cession de certains titres
négociables en général et des EPN en particulier n'est pas
soumise aux exigences de l'article 1690 du même code (2).
1. LA CESSION DE CREANCES DEFINIE PAR LE CODE
CIVIL
La transmission de créances par voie de cession est un
contrat dont la formation est régie par le droit commun des contrats. Ce
qui en principe exclue d'office la compétence du juge administratif en
matière de cession de créances comme le montre l'affaire
MOMBELLE
320 Art. 1690 du Code Civil op.cit.
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MA BERNARD C/ Etat du Cameroun
(MINFI)321. Ainsi, pour que la transmission soit
valable entre le cédant et le cessionnaire, elle doit respecter les
conditions générales de validité d'une
convention322. A cette exigence, il faut ajouter celle du respect
des conditions et règles spéciales posées par les articles
1689 à 1701 relatives aux « transports de
créances ». La difficulté qui se pose est non
celle de la validité de l'opération mais plutôt celle de
l'opposabilité de la cession ou de la vente d'une
créance.323En effet, l'article 1690 du même code
dispose que : « le cessionnaire n'est saisi à
l'égard des tiers que par la signification du transport fait au
débiteur ».
Néanmoins, le cessionnaire peut également
être saisi par acceptation du transport fait par le débiteur dans
un acte authentique324. En effet, si le débiteur ou le
créancier du cédant ne sont pas informés, ils ne pourront
tirer les conséquences pratiques d'un tel accord et le cessionnaire
risque avoir du mal à obtenir le paiement de la créance
cédée. L'article 1690 a prévu deux modes de
publicité au choix du cessionnaire. Pour contourner cette
difficulté, la cession peut être signifiée au
débiteur cédé soit par acte d'huissier, soit dans un acte
authentique. Seul l'accomplissement de l'une ou l'autre de ces
formalités peut rendre l'opération opposable aux tiers et
garantir au cessionnaire la « qualité du seul
créancier »325. Ce qui lui confère
également le droit de profiter « de toutes les
suretés326 et il subira toutes les exceptions
bénéficiant aux débiteurs
»327. Jugé trop lourd328, ce
formalisme a été allégé notamment en ce qui
concerne le transfert des titres négociables.
321 C.S/C.A, jugement N°323/2010 du 27 octobre 2010, affaire
MOMBELLE MA BERNARD C/ E.C. MINFI, op.cit.
322 TERRE (F), SIMLER ( Ph.) et LEQUETTE (Y), Droit civil des
obligations, Dalloz, collection précis,2002, P.1186 et s.
323 Article 1692 du code civil op.cit.
324 Les tiers au sens de cet article sont ceux qui n'ayant pas
été partie à l'acte de cession ont intérêt
à ce que le cédant soit encore créancier.
325 GRANIER (T) et JAFFEUX (C), La titrisation, aspects
juridique et financier, op.cit P. 91.
326 Article 1692 du Code Civil.
327 En droit civil, le cessionnaire ne peut avoir plus de droits
que le cédant. Voir GRANIER (T) et JAFFEUX (C) op.cit 91
328 De LAPASSE, « Le moment du transfert lors de la vente
des valeurs mobilières et d'autre droits incorporels », JCP,
éd. E., suppl. n°5, 1995, p. 18.
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2. LES AUTRES FORMES DE CESSION DES TITRES NEGOCIABLES ET
LE CAS DU CAMEROUN
Ces titres se caractérisent par le fait qu'ils
contiennent une clause à ordre. C'est-à-dire qu'ils sont payables
soit aux créanciers soit à une tierce personne
désignée par lui. Il est possible de citer parmi ces titres les
effets de commerce tels que la lettre de commerce, le billet à ordre ou
même le chèque329. La formalité de cession des
créances en la matière est différente de celle soumise aux
règles du code civil en son article 1690. En l'espèce, la
formalité d'endossement s'exprime par une mention écrite au dos
du titre. Le cessionnaire est saisi à l'égard du débiteur
qui ne pourra s'acquitter qu'entre les mains du porteur
bénéficiaire du titre. Ici, l'endosseur est garant de
l'acceptation et du paiement conformément au principe de
solidarité d'une part et d'autre part en vertu d'un second principe,
celui de l'inopposabilité des exceptions fondées. Le
débiteur ne peut opposer les exceptions fondées sur leur rapport
personnel avec le tireur ou avec les porteurs antérieurs.
Un autre mécanisme de cession des créances
repose sur la technique dite « cession Dailly
». Née en France à la faveur de la loi
n°81-1 du 02 janvier 1981, cette loi vise à faciliter le
crédit aux entreprises330. C'est cette dernière qui a
instauré la cession des créances par bordereau. Le
mécanisme ici est simple. Un établissement de crédits
reçoit de son client un bordereau qui représente les
créances professionnelles non échues de ce dernier. En
contrepartie, le banquier remet au cédant le montant de la valeur des
créances cédées majorées des frais financiers
occasionnés par l'opération de sa rémunération. La
cession est effective et donc constatée par un bordereau qui contient
les mentions particulières : la dénomination «
acte de cession des créances professionnelles ».
AU Cameroun, la cession des EPN se fait suivant une
procédure originale définie par l'Instruction
n°006/CGEPN/CAA relative aux procédures de rachat des EPN, contenue
dans
329 JEANTIN (M), Le CANNU (P), Instrument de paiement et
de crédit et entreprise en difficulté, Dalloz (Coll.
Précis), 2003, PP. 147 et s.
RIPERT et ROBLOT, Traité de droit commercial
par DELEBECQUE (Ph.), GERMAIN (M), Tome 2, LGDJ, 2000, PP. 131 et s.
330 STOUFFLET (V.J), CHAPUT (Y), «
l'allègement de la forme des transmissions de créances
liées à certaines opérations de crédit »,
JCP 1981, éd. G,I, 3044
VASSEUR (M), « L'application de la loi Dailly
», D. 1982, chr. P. 273.
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la Revue de la procédure des transactions et
élaboration des procédures d'utilisation des titres publics de la
CAA. Cette procédure fait suite à une autre : l'Instruction
n°004/CGEPN/CAA relative à l'utilisation des titres publics
négociables par les agents économiques qui définit la
cession des EPN sur le marché secondaire. Conformément à
cette dernière Instruction, seules les OTZ peuvent faire l'objet d'une
cession boursière selon les règles établies par l'Acte
Uniforme OHADA du 17 avril 1997 relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d'intérêt économique, d'une
part. D'autre part, la cession des EPN se fait par transfert matériel
des titres sur le marché monétaire. Cela est davantage vrai en ce
qui concerne les OTZ et les 2OT en faveur des assurances à l'exclusion
des BOT qui sont des titres nominatifs. L'exclusion des BOT dans ce
mécanisme trouve sa justification dans le fait que ces titres sont
inscrits dans le livre de la dette publique.
Les relations parfois tumultueuses entre le cédant et
le cessionnaire amène à analyser le régime juridique de la
cession de créances.
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