WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Service public, intérêt public et concurrence dans le domaine des énergies renouvelables

( Télécharger le fichier original )
par Marion COQUE
Université Montpellier I - Master I droit public général 2011
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

B- Des capacités techniques et économiques supérieures obligeant à l'intervention de la puissance publique

L'équilibre du marché passe par un système de libre production et de prix avec adéquation de l'offre et de la demande. Néanmoins, la position historique d'EDF utilisant principalement l'énergie nucléaire va engendrer des difficultés dans l'ouverture à la concurrence des producteurs utilisant d'autres énergies et ceux tentant d'utiliser le nucléaire.

Dans l'avis de l'autorité de la concurrence du 17 mai 2010 relatif au projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, celle-ci revient sur ces difficultés.64 Pour cela elle met en exergue les bouleversements pour le consommateur de cette transition entre monopole et libéralisation, ce qui influe également sur les opérateurs.

Le premier bouleversement serait celui du prix qui est facturé au consommateur qui n'est pas déterminé par le libre jeu de la concurrence entre tout les opérateurs. Pour l'autorité de la concurrence: «Sur les marchés de l'électricité, à court terme, le prix de l'électricité doit s'aligner sur le coût marginal de production. Or, l'électricité n'est pas stockable et les évolutions de la demande impliquent d'appeler un nombre variable d'unités de production pour la satisfaire. »

L'autorité de la concurrence poursuit plus loin « Cet effet est particulièrement marqué pour le marché français, dans lequel la production d'électricité d'origine nucléaire, qui représente près de 80 % de la consommation nationale, s'effectue actuellement à des conditions économiques caractérisées par un coût marginal significativement inférieur à celui des techniques de production concurrentes (à l'exception de l'hydraulique " au fil de l'eau "). Dès lors que les centrales nucléaires sont rarement les dernières centrales appelées, le prix de marché est inférieur. » Les différentes productions d'énergies ne coûtent en effet pas le même prix et cela entraîne des distorsions dans l'offre et la demande.

Du fait de ces prix supérieurs, les producteurs d'électricité autres que les énergies renouvelables se frayent difficile un accès à ce marché et c'est l'énergie nucléaire qui est utilisée en premier alors même que l'évolution de la demande impliquerait d'utiliser d'autres modes de production d'énergie.

EDF serait donc en position de monopole car son prix de production serait inférieur. La facture du consommateur ne serait alors pas déterminé par le libre jeu de l'offre et le demande car il n'y a pas de véritables concurrence entre tout les modes de production, le nucléaire étant systématiquement choisi du fait de ses coûts inférieurs. Le coût de la facture étant conditionné par le coût de production.

63 Décret n° 2000-456 JO du 30 mai 2000 p8102

64 Avis de l'autorité de la concurrence n°10-A-08 du 17 mai 2010 relatif au projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité dite « loi NOME »

21

Le deuxième bouleversement selon l'autorité de la concurrence, viendrait de la qualité et de la sécurité de l'approvisionnement. « Dans un marché libre, la décision d'investissement est d'une autre nature : elle repose sur un arbitrage économique dont l'objectif est la rentabilité de l'investissement. Cette rentabilité suppose que les nouvelles unités de production répondent à une demande d'électricité. Dans ce contexte, si la demande rend l'utilisation effective d'un moyen de production aléatoire, comme c'est le cas pour les périodes de demande de pointe, un producteur n'est pas incité à investir. ». Afin de permettre la sécurité d'approvisionnement, il est plus aléatoire de s'en remettre aux mode de productions autres que le nucléaire. Le problème de fond est que l'électricité n'est pas stockable et la quantité varie suivant le moment dans l'année. Le producteur devra donc prévoir une capacité matérielle suffisante pour faire face aux périodes de pointe mais les capacités déployées ne seront pas toutes utilisées toute l'année65. Comme les producteurs savent qu'ils devront faire face à cette demande en électricité mais qu'ils ne sont pas certain d'y parvenir avec d'autres énergies que le nucléaire, ils préfèrent alors renoncer à investir. Ils ne s'engagent pas dans un investissement à perte car ils savent que leur mode de production étant plus aléatoire, ils ne sont pas sûrs d'être appelés à produire.

Les consommateurs n'ont pas le droit à un marché libre car pour assurer la qualité et la sécurité de l'approvisionnement, il faut avantager un moyen de production au détriment des autres.

A travers le prisme des bouleversements occasionnés chez le consommateur dans l'ouverture à la concurrence, apparaît en filigrane la position dominante du nucléaire favorisé du fait de sa technique, son meilleur coût et sa capacité d'approvisionnement, ce qui déséquilibre le marché car l'offre est inégalitaire.

L'autorité de la concurrence développe ensuite sur les facteurs qui ont empêché l'émergence d'offres compétitives sur le marché, ce qui rejoint les constatations qu'elle a émises sur les bouleversements occasionnés chez le consommateur. Néanmoins, cela permet de mieux saisir la situation de blocage dans laquelle se trouvait le marché. L'institution s'appuie sur les constatations qu'elle avait elle-même émises lors d'affaire dans lesquelles elle a dû se prononcer, lorsque des opérateurs l'avaient saisi du fait d'atteinte présumée au droit de la concurrence par EDF.66

Pour l'Autorité, l'utilisation du nucléaire s'est imposée comme un facteur indispensable à la pratique de prix compétitifs, de ce fait « la concentration des centrales nucléaires dans les mains de l'opérateur historique confère donc à EDF un avantage de coûts vis-à-vis de concurrents, qui ne disposent pas de ces moyens de production. ». Les autres moyens de production peuvent alors difficilement s'imposer du fait de coûts supérieurs. Cela pose un problème supplémentaire : Dans la vente d'électricité au consommateur, la moitié du prix correspond au coût de production de l'énergie or les producteurs qui ne peuvent assurer leur propre production doivent se fournir en énergie nucléaire mais au prix de gros. De ce fait, il y avait distorsion des prix entre les producteurs car le prix de gros ne correspond pas au prix au détail. Le prix au détail est fixé par l'Etat dans l'optique « de faire bénéficier la clientèle de masse d'une énergie électrique relativement

65 Jean-Yves Chérot « Droit public économique » 2007 deuxième édition. Édition économica. P843

66 Décisions n° 07MC-01 du 25 avril 2007, relative à une saisine de la société KalibraXE à l'encontre des contrats à long terme conclus par EDF avec certains clients, n° 07-MC-04 du 28 juin 2007 et n° 07-D-43 du 10 décembre 2007, concernant les conditions de concurrence sur le marché des petits consommateurs

22

bon marché », il est donc beaucoup plus bas. Une alternative dévellopée plus bas sera alors proposée par la Commision « Champsaur ».

Pour les concurrents qui n'utilisent pas le nucléaire, ils deviennent donc finalement tributaires de l'énergie nucléaire et de son coût. De ce fait, ils ont des difficultés à émerger et à concurrencer EDF et son monopole du nucléaire.

La solution pourrait alors être de concurrencer le nucléaire par le nucléaire mais cela a également été rendu difficile.

Une barrière économique figurerait à l'entrée du marché du fait de « l'importance des investissements requis et l'absence de besoin massif de renouvellement du parc à court terme. ».

Pour un nouveau producteur, il est difficile de concurrencer un parc nucléaire implanté depuis de nombreuses années. D'abord donc par le coût engendré par les installations nucléaires. EDF a pu progressivement implanter et financer son parc nucléaire. Un nouvel opérateur pour s'imposer sur le marché devrait faire face à un financement économique majeur s'il veut avoir ses chances de disposer des mêmes capacités de production qu'EDF. Ensuite parce qu'il n'y a pas besoin de nouveaux parcs de productions. Thierry Thuot conforte ces positions, il estime que « L'investissement est extraordinairement coûteux et le développement d'un parc permettant de concurrencer EDF supposerait des investissements nucléaires massifs pouvant escompter des coûts de production encore plus bas grâce aux gains de productivité »67. C'est-à-dire que pour escompter produire de l'électricité à un coût plus bas qu'EDF, l'investissement des opérateurs devra être encore plus important qu'un investissement a minima dans un parc nucléaire et le coût sera bien trop important pour qu'ils puissent y faire face.

Il paraît donc extrêmement difficile de concurrencer EDF dans son propre secteur. Comme il n'y avait pas non plus de possibilité de concurrencer EDF par d'autres énergies, la situation paraissait bloquée.

L'autorité de la concurrence a donc pointé du doigt les facteurs techniques qui conduisent à une difficulté de l'émergence d'offres concurrentes viables. Afin de débloquer la situation, la loi NOME en s'appuyant sur le rapport de novembre 200868 de la commission présidée par M. Paul Champsaur, va tenter de remédier à ces difficultés. Ce rapport avait conclu que « sans régulation de la base produite par le parc historique, les fournisseurs concurrents d'EDF n'ont pas les moyens de concurrencer l'opérateur historique par des offres compétitives aux consommateurs finals. Une régulation spécifique sur le marché de la production en base est donc nécessaire afin de garantir l'égalité de tous les fournisseurs et le développement effectif de la concurrence sur le marché de la fourniture ». Pour cela, il préconise un certain nombre de réformes qui seront reprise sous la forme d'objectifs par la loi NOME69, celui de « préserver les tarifs réglementés de vente de l'électricité (dénommés « tarifs bleus ») pour les ménages et les petites entreprises », c'est-à-dire un tarif avec un cout garanti moins élevé.

Mais également « assurer le financement du parc de production existant et favoriser les nouveaux investissements conformément aux engagements pris lors des négociations «

67 Thierry Tuot « nouvelle organisation du marché électricité- à propos de la loi NOME du 7 décembre 2010 La Semaine Juridique Edition Générale n° 10, 7 Mars 2011, doctr. 283

68 Rapport de novembre 2008 d'une commission présidée par M. Paul Champsaur, qui avait la charge de faire des propositions d'organisation du marché de l'électricité demandé conjointement par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, et la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

69 Loi n°2010- 1488 du 7 décembre 2010

23

Grenelle » sur l'environnement ». Dans ces propositions, apparaît donc le fait de favoriser les nouveaux investissements en faveur de la protection de l'environnement puisque c'est ce que propose les loirs Grenelle I et II. En réponse au blocage, il y a donc l'aide à l'émergence des énergies renouvelables.

De même, le rapport propose de « favoriser la concurrence par un dispositif de régulation qui permettra à tous les fournisseurs d'électricité en France de s'approvisionner auprès d'EDF aux conditions économiques du parc nucléaire historique. La dynamique du marché en résultant permettra la disparition des tarifs réglementés pour les grands clients en 2015, et la concurrence fera émerger des offres innovantes, en particulier en ce qui concerne l'amélioration de la gestion de la demande d'électricité ». En effet, « La libéralisation complète du marché de la fourniture d'électricité au 1er juillet 2007 n'a pas remis en cause l'existence des tarifs

réglementés. En effet, l'article 3.2 de la directive électricité du 26 juin 2003 reconnaît aux États la possibilité d'imposer des obligations de service public aux fournisseurs d'électricité, pouvant notamment prendre la forme d'une réglementation des prix de vente au consommateur. »70 Or comme il a déjà été évoqué, les prix trop bas pratiqués par EDF du fait de la réglementation ne permettent pas de concurrencer cette ancienne entreprise monopolistique.

Ce qu'il est donc préconisé c'est de remplacer les tarifs réglementés faisant barrière à l'introduction du marché, par une possibilité ouverte aux producteurs de s'approvisionner auprès d'EDF pour compléter leur production mais à des coûts accessibles. De ce fait leur production sera moins chère du fait du rachat à un prix moins élevé et il sera moins difficile économiquement d'assurer la production car ils pourront compléter la leur à un prix moindre. Cela devrait donc avoir pour conséquence de mieux équilibrer le marché. Il est donc conseillé d'aider les nouveaux producteurs que sont notamment les producteurs d'énergies renouvelables.

Dans sa décision n° 07-D-43, l'autorité de la concurrence a suivi le rapport instaurant au profit des fournisseurs concurrents, une possibilité d'achat de l'énergie nucléaire au prix de détail pour les petits fournisseurs concurrents. « Pour mieux éviter ce paradoxe qui consiste à lier ouverture effective des marchés et hausse des prix, le Conseil de la concurrence s'est engagé dans une autre voie. Il entend faire échapper les concurrents d'EDF à un « effet de ciseau » sur certaines offres du marché de détail, et cela par la baisse des prix de gros. »71

Dans cette situation de blocage, ce rapport fait donc paraître la nécessité de l'intervention publique en aide aux nouveaux producteurs pour pallier aux carences. Cette situation de monopole du fait de qualités techniques et nucléaires suffisantes ne pouvait être débloquée seule.

Et de même, le fait de permettre l'accès au nucléaire au prix du marché est dans l'intention de permettre l'émergence « d'offres innovantes ». Ce rapport préconise donc une alternative au nucléaire. En permettant l'accès moins cher à la production de nucléaire, cela permet aux producteurs de compléter leur offre parfois insuffisante pour le marché et de ce fait en palliant à leur carence, ils deviennent enfin des concurrents viables sur le marché. Des prix trop haut et une insuffisante de production par rapport au nucléaire étant les principaux facteurs empêchant leur émergence.

70 Avis de l'autorité de la concurrence n°09-A-43 du 27 juillet 2009 relatif à un projet de décret concernant les tarifs réglementés de l'électricité.

71 Martine Lombard « L'État face à l'ouverture des marché de l'électricité et du gaz: un pompier pyromane? » RJEP n°646 octobre 2007 repère 3

24

Puisqu'elles ne peuvent émerger toute seule et que la concurrence par le nucléaire n'est pas possible, du fait de capacités techniques et économiques supérieures, l'alternative qui voit alors le jour est donc entre autres celle de favoriser l'émergence de d'autres opérateurs et notamment ceux utilisant les énergies renouvelables puisqu'il est difficile de concurrencer le nucléaire par le nucléaire.

Des difficultés techniques ont donc appuyé le monopole d'EDF et notamment du nucléaire. Il semble dès lors que la meilleur façon de permettre un marché concurrentiel soit l'aide à une autre forme d'énergie. L'insuffisance de l'ouverture à la concurrence s'explique également par un certain choix du gouvernement. Cette ouverture à la concurrence qui a été fortement influencée par le droit communautaire, ne va donc pas fonctionner sans l'aide de la puissance publique. Cette intervention dans le secteur de l'énergie est historique et il semble qu'elle tende à pallier les insuffisances du marché qui seul ne peut s'équilibrer.

La reconnaissance d'une forme de service public de l'électricité par le droit communautaire a été majeure car c'est pas ce biais que la puissance publique va pouvoir poursuivre son action et promouvoir les énergies renouvelables. Elle va pouvoir proposer ce qui semble être une alternative au nucléaire et peut-être un moyen de véritablement ouvrir à la concurrence ce secteur.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand