B- Une transposition conforme des directives en droit
interne
La transposition en droit interne des directives montre
l'influence du droit communautaire sur ce secteur. Elles ont accompagné
une libéralisation qui sera nécessaire à l'apparition des
énergies renouvelables.
La transposition de la première directive s'est donc faite
par la loi du 10 février 2000 qui impose la création d'un service
de transport, à l'intérieur d'EDF « indépendant
sur le plan de la gestion des autres activités» ». Cela a
donné naissance à RTE (Réseau de Transport
d'Electricité). Également une séparation comptable a
été imposée par l'article 25 de cette loi. Elle se traduit
en droit interne par l'obligation pour Électricité de France et
les autres distributeurs non nationalisés de faire « figurer,
dans leur comptabilité interne, un bilan et un compte de résultat
pour chaque activité dans le secteur de l'électricité
devant faire l'objet d'une séparation comptable en vertu de
l'alinéa ci-dessus, ainsi que, le cas échéant, pour
l'ensemble de leurs autres activités » . Les activités
de production et de distribution doivent donc être dissociées au
niveau comptable. L'article 16 précise quand à lui que «
le gestionnaire du réseau public de transport préserve la
confidentialité des informations d'ordre économique, commercial,
industriel, financier ou technique dont la communication serait de nature
à porter atteinte aux règles de concurrence libre et loyale et de
non-discrimination imposées par la loi ».
Par la loi du 10 février 2000, on retrouve donc les trois
obligations posées par la directive de 1996: obligation de
séparation de gestion , séparation comptable et protection des
données récoltées dans le cadre de l'activité de
gestion. Il y a donc eu de la part de la France le souci de respecter ces
contraintes imposées par le droit interne. Cette transposition
même si elle s'est faite en retard n'a pas posé de
difficultés. Ce fut également le cas pour la suivante.
La deuxième transposition fut celle opérée
par la loi du 9 aout 200453. Pour être conforme à la
directive de l'Union qui imposait la séparation juridique, la loi
transforma RTE en une société anonyme dont le capital
était détenu par EDF(article 7). La séparation allait donc
plus loin. Cela correspondait aux exigences de la directive européenne:
à la séparation fonctionnelle, se substituait la
séparation juridique. De plus, les biens relatifs aux activités
de production furent transmis à RTE. De cette façon les biens n
'étaient plus la propriété de EDF. La transposition allait
même plus loin que les exigences européenne.
52 Idem note 47 fascicule 154 « Électricité
»
53 Loi n°2004-803 du 9 aout 2004, journal officiel 11 aout
2004
18
La troisième transposition fut celle de la directive la
plus exigeante de l'Union Européenne qui préconisait pour qu'une
séparation soit réellement effective, une séparation de
propriété. Cette directive est celle qui a posé le plus de
difficulté dans sa transposition. C'était inacceptable pour
certain pays comme la France54. Cela signifiait au niveau interne
que RTE perdait comme actionnaire minoritaire EDF. Un
« compromis » fut trouvée avec deux
possibilités. Les directives reconnaissaient la possibilité de
conserver la propriété du réseau pour l'entreprise
intégrée verticalement, si la gestion était confiée
à un opérateur indépendant, sur lequel aucun
contrôle n'est exercé55. La deuxième
possibilité offerte était celle de conserver la
propriété et la gestion mais à un prix, celui de les
confier à une entité juridiquement distincte par le biais par
exemple d'une filialisation. Des garanties supplémentaires sont alors
demandées par la directive: organe de surveillance, programme
d'engagement avec un cadre qui en assure le respect, et renforcement des
pouvoirs de l'autorité de régulation. La France a fait le choix
de transposer cette directive en dissociant les gestionnaires de réseaux
ayant été crées avant le 3 septembre 2009, date de la
directive et ceux appartenant déjà à cette date à
une entreprise verticalement intégrée. Ceux qui ont
été crées après le 3 septembre 2009 ont
été alors soumis à l'obligation de séparation de
propriété56. Pour ceux crées avant, la France a
décidé de choisir la possibilité du gestionnaire de
transport indépendant, ce qui revient à laisser la
propriété et la gestion à EDF. Le droit interne n'a pas
voulu toucher à EDF ni obliger RTE à transmettre la gestion
à une autre entité qui elle serait indépendante.
Dès lors que la France avait choisi cette option, elle était donc
obligée de se conformer aux exigences supplémentaires, ce qu'elle
a fait57.
Le droit communautaire en plus de procéder à une
réglementation dans ce secteur a également voulu la mise en place
d'une autorité de régulation. Celle-ci a été
créée en 2000, au départ commission de régulation
de l'électricité puis commission de régulation de
l'énergie (CRE) aux termes de la loi de 200358. Elle s'est
vue confier un pouvoir de décision et de sanction. La loi de
200659 institua en son sein un comité de règlement des
différends afin que cette activité soit séparée de
celle de sanction.
Malgré quelques hésitations dans la dernière
directive, le droit interne a donc transposé fidèlement les
directives du droit communautaire afin que l'ouverture à la concurrence
se fasse de la façon la plus efficace possible. Tout ces
impératifs étaient nécessaires pour qu'il y ait une
réelle concurrence. Peut-être que sans ces impératifs, la
France n'aurait pas ouvert le secteur et les énergies renouvelables
n'auraient jamais pu réellement se développer, le monopole d'EDF
utilisant principalement le nucléaire, ne permettant pas son essor. Elle
va donc être un facteur d'une véritable libéralisation car
l'ouverture à la concurrence du marché de
l'électricité ne semble pas au départ fonctionner sans son
intervention.
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