4. Conséquences de l'économie
informelle
Nous avons déjà eu à démontrer que
les agents qui travaillent dans l'économie informelle oeuvrent en marge
de la loi ou tout le moins, exercent à la lisière de la
légalité. L'économie informelle apparaît ainsi
être une réalité sans légalité. Cette
situation est présumée favorable aux individus qui y oeuvrent,
cependant elle porte atteinte aux intérêts des pouvoirs publics
que nous allons analyser au niveau fiscal, au niveau de l'économie et au
niveau social.
Au plan fiscal affirme le Professeur BAKANDEJA wa MPUNGU,
qu'il est unanime pour épingler parmi les conséquences de
l'économie informelle, le fait de priver les pouvoirs publics de revenus
importants. En effet, il est évident que l'informel donne lieu à
l'évasion fiscale généralisée, le mépris des
lois. Ceci sape la légitimité de l'Etat et la morale politique et
contribue à la baisse de l'efficacité de l'action administrative.
Lorsque dans un pays, le secteur informel est plus développé que
le secteur formel, cela dénote sinon la faillite de l'Etat, du moins son
incapacité à assurer la promotion des activités
économiques et donc le développement du pays.
En 1990, selon un rapport de la Conférence Nationale
Souveraine, le secteur informel représentait près de 60% des
activités économiques. Douze ans après, il est
évident que ce pourcentage se ramène à plus de 80% des
activités actuellement. L'hypothèse de la salle d'attente
d'HARRIS et TODARO qui considère le secteur informel urbain
comme un lieu d'étape, une halte temporaire que les
travailleurs quitteront en prenant un emploi dans le secteur moderne
semble être battue en brèche en République
Démocratique du Congo.
Au plan économique, l'informel a conduit entre autre au
développement du marché de change non officiel avec son
corollaire le non rapatriement des devises provenant des activités
d'exploitation frauduleuse, la thésaurisation, l'inaccessibilité
au système bancaire pour la distribution de crédit à
l'économie, la non-maîtrise de stocks de production qui conduit
à la fixation de prix fantaisistes. Tout ceci, contribuant au
dérèglement des fondations de l'économie nationale.
Néanmoins, il contribue à sa façon à réduire
le degré d'extraversion de l'économie et renforce l'atomisation
de certains segments du système économique.
Au plan social, malgré les avantages que peut procurer
l'économie informelle congolaise notamment pour la survie
disent certains auteurs par le fait de pallier les carences de
l'économie officielle en matière de distribution
d'emplois et de salaires ! Mais quel emploi ? Emplois
précaires et salaires de misère.
L'économie informelle comporte de nombreux inconvénients au
plan des droits humains. Les pratiques informelles énervent le
principe à la fois général et constitutionnel de
l'égalité des citoyens devant la loi. Sous l'angle
strictement fiscal, les acteurs de l'économie informelle sont
source d'injustice et d'inégalité de traitement dans la
mesure où ils échappent à l'imposition et
obligent les agents économiques formels déjà victime
de concurrence déloyale à supporter un fardeau fiscal
additionnel.
Cette économie emploie ou mieux exploite les enfants,
les privant ipso facto de l'éducation, les femmes qui y
oeuvrent sont employées au mépris de toutes dispositions
relatives au droit du travail. Les travailleurs de ce secteur doivent
être réintégrés dans l'économie formelle,
dans la vie économique et sociale, afin qu'ils soient reconnus et
respectés en tant que travailleurs, et protégés contre
toute forme d'abus et d'exploitation.
Le gouvernement congolais doit marquer concrètement son
intérêt pour l'économie informelle en mettant en oeuvre un
train de mesures qui, à terme, faciliteraient l'encadrement des
activités informelles et leur insertion progressive dans
l'économie formelle. C'est seulement lorsque les opérateurs
informels apprécieront les avantages que leur offre l'économie
formelle qu'ils n'hésiteront pas à franchir le pas.
Abordons à présent le point sur les acteurs qui
évoluent dans ce secteur et leur motivation.
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