La performance sociale est l'approche de la performance
développée par l'école des relations humaines. Pour les
auteurs comme Quinn, Rohrbaugh (1981), cette approche ne prend pas le contre
pieds des autres approches mais y intègre un certain nombre
d'activités jugées nécessaires au bon maintien de
l'organisation. Ainsi, pour les défenseurs de cette thèse en
l'occurrence, Bass (1952) le point focal reste la morale et la cohésion
de l'organisation considérée. Pour Lapenu et al (2004), on peut
globalement entendre par performance sociale d'une institution, les effets de
ladite institution sur les conditions sociales de ses clients : effet sur le
niveau de vie (pauvreté), logement, santé, éducation,
etc.
La performance sociale est souvent perçue à
travers la responsabilité sociale des
entreprises (RSE) qui selon ALLOUCHE et LAROCHE (2005), n'est
rien d'autre que le fait de s'engager au-delà de ses obligations
légales mais aussi économiques. En fait, il s'agit d'honorer ses
obligations à l'égard de la plupart des parties prenantes, de
répondre aux demandes sociales qui émanent de l'environnement
socioéconomique et enfin d'utiliser le concept de responsabilité
sociale et son contexte d'application comme outil de gestion.
Par ailleurs l'importance du nombre d'intervenants ainsi que
les différentes démarches font souvent apparaitre un certain
nombre de problèmes qui sont considérés comme des flous
méthodologiques voire épistémologiques. Ce qui pose avec
acuité le besoin d'une définition ou de définitions
opératoires de la performance sociale. Dans la littérature
existante, nous avons noté de nombreuses études autour de cette
tentative sans pour autant qu'on ait un consensus.
Par ailleurs, il faut noter qu'un état des lieux sur
les évolutions et mutations sémantiques prises au sens de Gond et
de Mullenbach (2004)15 permet d'avoir une perception assez claire
sur la RSE et par conséquent sur la performance sociale. En fait ces
deux auteurs ont
15 Menel BEN MLOUKA et Ezzedine BOUSSOURA
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Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
dégagé trois grandes phases marquant le
renforcement des concepts qui s'opèrent à travers l'accumulation
progressive des connaissances autour de la RSE.
La première phase correspond à une
conceptualisation renvoyant aux discours sur les principes ou sur la
portée voire le contenu de la RSE. Dans cette conception, nous avons
plusieurs définitions notamment celle de Friedman (1970)16
qui place la RSE dans une optique économique ou de profit. D'autres
auteurs comme Jones (1980)17 se sont interrogés sur les
engagements auxquels l'entreprise est tenue et vont au-delà des
obligations légales mais aussi contractuelles. En ce qui concerne les
définitions de Preston et post, 1975 cités par Carroll, 1999,
elles mettent l'accent sur les principes de la responsabilité publique
des entreprises (RPE).
La deuxième phase est plutôt transitoire et
retrace la migration des discours vers la notion de sensibilité ou la
« corporate social responsiveness ». Cette nouvelle
représentation, qui selon Carroll (1979) décrit la
capacité d'une firme à répondre aux pressions sociales,
relève d'une vision processuelle. Dans cette conception, la RSE n'est
plus considérée en tant que contenu mais plutôt un
processus de réponse.
La troisième phase de cette évolution est
considérée comme la phase d'intégration de l'ensemble des
conceptualisations antérieures (principes et processus) au sein de la
notion de performance sociétale des entreprises (PSE). Cette approche
intégrée est inscrite dans le modèle de la PSE
développée par Carroll (1979) et cela a fait de lui une
référence incontournable dans la littérature.
L'analyse de ces trois phases montre que l'on est
passé d'une vision restreinte et centrée sur les obligations ou
les principes de la RSE à une vision élargie et
intégrée appelée performance sociétale des
entreprises (PSE) ou « Corporate Social Performance » qui
prend en compte les résultats des comportements sociétaux en
passant par une vision intermédiaire axée sur les processus et
qui privilégie les actions de réponse aux pressions
sociétales (corporate Social Responsiveness).
16 Cité par José ALLOUCHE et Patrice
LAROCHE, 2005
17 Cité par José ALLOUCHE et Patrice
LAROCHE, 2005
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Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
De ces différentes définitions de la
performance sociale, nous pouvons retenir celle de la « Social Performance
Task Force » selon laquelle, la performance sociale peut être
considérée comme « la mise en pratique de ses ambitions
sociales afin qu'elle puisse durablement servir un nombre croissant de
personnes pauvres ou exclues, améliorer tant la qualité que la
pertinence des services financiers proposés, agir sur l'environnement
socio-économique de ses clients tout en garantissant à ces
mêmes clients, à leurs employés, et d'une manière
générale, à la communauté que les principes de
responsabilité sociale sont pleinement respectés »
Ceci conduit un certains nombre de chercheurs comme
Cécile Lapenu, Manfred Zeller, Martin Greeley, Renée
Chao-Béroff, Koenraad Verhagen (2004) à affirmer que,
contrairement aux performances financière et économique, la
performance sociale d'une organisation prend en compte la nature des relations
internes entre ses employés et des relations qu'elle entretient avec ses
clients et autres acteurs avec qui elle interagit.
Une définition plus large et plus consensuelle a
été forgée et mise en place par un groupe de travail de
150 membres de grands réseaux de microfinance, de prestataires de
services financiers, d'agence de notation, de bailleurs de fonds et
d'investisseurs sociaux. Ce groupe de travail a été mis sur pied
en 2007 grâce aux initiatives développées, en 2005 et de
manière conjointe par la fondation Argidius, le CGAP et la fondation
Ford. Ce groupe de travail a la volonté d'évaluer et de mesurer
la performance sociale de leurs organisations ou de celles qu'il soutienne. De
ce fait, « La performance sociale est la traduction effective dans la
pratique des objectifs sociaux d'une institution, conformément aux
valeurs sociales reconnues; ces objectifs sont notamment de servir durablement
un nombre croissant de pauvres et d'exclus, d'améliorer la
qualité et l'adéquation des services financiers,
d'améliorer la situation économique et sociale des clients et de
garantir la responsabilité sociale envers les clients, les
employés et la communauté servie » CGAP, 2007.