2. L'ampleur du phénomène dans la zone
UEMOA
A l'instar de la dynamique qui caractérise le secteur
de la microfinance au plan mondial depuis quelques décennies, les IMF
africaines sont en pleine expansion. Il en est de même notamment pour les
pays d'Afrique de l'ouest qui ont enregistré des progrès
sensibles dans le secteur et qui ont vu leur tissu économique s'agrandir
avec le développement des initiatives micro-entrepreneuriales. Ce qu'il
convient d'appeler « la dynamique micro-financière »
en Afrique de l'ouest et spécifiquement dans l'UEMOA, s'observe
notamment à travers une croissance soutenue aussi bien du nombre d'IMF
qu'à travers la typologie des formes institutionnelles.
a) Evolutions du nombre d'institutions et de la
clientèle
A l'instar du mouvement observé au plan international,
les pays de l'UEMOA7 enregistrent depuis environ deux
décennies, une croissance rapide du secteur financier
7 UEMOA regroupe huit pays : Bénin, Burkina
Faso, Côte d'Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger,
Sénégal, Togo.
12
Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
dont les IMF deviennent les principaux acteurs. Le tableau 2
en donne une illustration. De ce tableau, il ressort d'une part une croissance
soutenue du nombre d'IMF qui a plus que quintuplé entre 1993 et 2001,
avant de se stabiliser avec une croissance relativement faible de 2001 à
2006. D'autre part, on note que le nombre de guichets a connu une forte
croissance dès les premières années (1993 à 1997),
puis une évolution en dents de scie (1997 à 2004) avant une
baisse de plus d'un tiers en 2005 suivie d'une légère reprise en
2006.
L'expansion observée du secteur au niveau
sous-régional traduit une plus grande accessibilité des IMF aux
personnes à faible revenu. Cependant, bien que les trois indicateurs
soient globalement croissants sur la période en valeur absolue, le fait
que les taux d'évolution soient décroissants traduit une
stagnation du secteur au niveau sous-régional. De plus, il faut
remarquer des signes d'une régression absolue de la clientèle
servie qui se manifestent déjà en 2005. Ce constat peut
résulter soit de la fermeture de certains points de service à
partir de 2003, soit des démissions de certains clients.
Tableau 2 : Evolution8 du secteur
microfinancier dans l'UEMOA
Années
|
Nombre d'institutions
|
Taux de variation
(%)
|
Nombre de points de service
|
Taux de variation
(%)
|
Nombre
de clients
|
Taux de variation
(%)
|
1993
|
107
|
-
|
1.136
|
-
|
309.545
|
-
|
1995
|
174
|
62,6
|
2.282
|
100,9
|
743.200
|
140,1
|
1997
|
188
|
08,0
|
2.628
|
15,2
|
1.440.979
|
93,9
|
1999
|
272
|
44,7
|
2.621
|
-0,03
|
2.339.071
|
62,3
|
2000
|
397
|
45,9
|
2.681
|
02,3
|
2.618.036
|
11,9
|
2001
|
555
|
39,8
|
2.626
|
-02,0
|
2.943.837
|
12,4
|
2002
|
565
|
01,8
|
2.549
|
-02,9
|
3.086.165
|
04,8
|
2003
|
598
|
05,8
|
2.827
|
10,9
|
3.594.912
|
16,5
|
2004
|
643
|
07,5
|
3.054
|
08,0
|
3.881.393
|
08,0
|
2005
|
652
|
01,4
|
1.989
|
-34,9
|
3.685.068
|
-05,1
|
2006
|
718
|
10,1
|
2083
|
4,7
|
3.688.185
|
0,1
|
|
Source : Statistiques de la BCEAO (2007).
8 Le tableau porte sur les institutions enregistrées qui
ont régulièrement fourni des données statistiques à
la BCEAO.
13
Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
b) Les formes institutionnelles
La classification des formes institutionnelles en
présence dans l'UEMOA varie en fonction des critères retenus.
? Selon les critères de la loi
`Parmec'
La loi PARMEC qui régit le secteur micro-financier
dans l'UEMOA ne reconnaît que deux grandes catégories d'IMF,
notamment les structures mutualistes et celles non mutualistes. Toutefois, elle
permet de dissocier quatre catégories d'IMF, qui sont
résumées dans le tableau ci-après, en combinant deux
dimensions d'analyse, à savoir le degré de formalisation d'une
part, et le degré d'adoption des principes de la mutualité
d'autre part. Aussi faudrait-il signaler que la loi «PARMEC» ne
distingue pas les mutualistes des non-mutualistes dans la catégorie des
institutions non-agréées. Mais l'observation du terrain
révèle une cohabitation permanente entre les unes et les
autres.
Tableau 3 : Critères de classification des IMF
selon la loi PARMEC
DEGRE DE MUTUALITE
DEGRE DE FORMALI SATION
Mutualistes
|
Non mutualistes
|
Autorisées
|
Institutions mutualistes autorisées par
agrément
|
Institutions non mutualistes autorisées par
convention
|
Non
autorisées
|
Institutions mutualistes non autorisées
|
Institutions non mutualistes non autorisées
|
|
Source : Inspiré de la loi n° 97-027
dite `'Loi PARMEC» et de Lelart (1996). ? Selon les
critères de la Banque Centrale des Etats de l'Afrique de
l'Ouest
D'après les études de la BCEAO, les IMF
implantées dans les pays de l'UEMOA peuvent être classées
en trois catégories, à savoir : les institutions
mutualistes9 ou coopératives d'épargne et de
crédit (IMC), les institutions de crédit direct (ICD) et les ONG
ou projets à volet microfinance (BCEAO, 2000). Les premières qui
sont largement majoritaires
9 Selon la loi PARMEC (article 2, alinéa
1), « sont considérées comme institutions mutualistes ou
coopératives d'épargne et de crédit, un groupement de
personnes doté de la personnalité morale, sans but lucratif,
à capital variable, fondé sur les principes d'union, de
solidarité et d'entraide mutuelles et ayant principalement pour objet de
collecter l'épargne de ses membres et de leur consentir du crédit
».
14
Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
cumulent les opérations d'épargne et de
crédit, en référence à la loi PARMEC qui leur
accorde le privilège de collecter l'épargne.
? Selon les formes
organisationnelles
La catégorisation tenant compte des formes
organisationnelles existantes dans l'union rejoint dans une certaine mesure
celle de Lancelin (2001) et de Lelart (2002), avec cependant quelques nuances.
En effet, on y retrouve certaines catégories d'institutions pour
lesquelles la loi PARMEC ne prévoit explicitement qu'une reconnaissance
juridique simple, à l'instar des structures villageoises
d'épargne et de crédit qui pourtant se révèlent
prépondérantes surtout dans les zones rurales isolées
(Djefal, 2007). On y distingue :
Les Coopératives et les Mutuelles d'Epargne et de
Crédit (IMC) : Elles sont généralement
constituées en liaison avec les structures de refinancement externes. La
particularité de ce système est qu'il exige la constitution d'une
épargne préalable avant l'accès au crédit. De plus,
en raison du principe de la propriété des membres qui les
caractérise, les IMC qui sont en général à but non
lucratif, appartiennent à leurs membres qui en conservent le
contrôle. Par ailleurs, au lieu de réaliser un profit pour les
actionnaires (comme le ferait une banque), les IMC reversent à leurs
membres une part des revenus excédant leurs coûts d'exploitation,
souvent sous diverses formes : dividendes distribués aux membres, taux
d'intérêt plus élevés pour l'épargne ou
réduits pour les prêts, prestations nouvelles ou
améliorées (Helms, 2006).
Les Caisses Villageoises d'Epargne et de Crédit
Autogérées (CVECA) . · Ces caisses dont les
premières expériences ouest-africaines sont apparues au Mali,
sont nées, en général, des initiatives endogènes.
Leur promotion dans la sous- région a bénéficié de
l'appui de l'organisation française CIDR, et visait à «
améliorer le modèle traditionnel des coopératives »
(Helms, 2006). Les possibilités d'octroi de crédit dans ces
structures se heurtent au niveau relativement faible de l'épargne
collectée. Ici, le champ d'action est souvent limité à un
village.
Les organismes de crédit solidaire . ·
Ils ciblent la couche vulnérable de la population, notamment les
pauvres qui sont uniquement pris en compte dans ce type de programme.
L'objectif est de réduire l'écart de pauvreté entre les
différentes couches d'une population.
15
Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
Les programmes d'appui au microcrédit: En
général, ils émanent soit des pouvoirs publics sous forme
de volet de programmes multidimensionnels, soit des institutions
internationales, en liaison avec les ONG locales. Ces ONG se chargent de la
gestion des microcrédits financés souvent de l'extérieur,
dans l'espoir qu'à long terme l'épargne locale prenne le relais
de l'aide extérieur.
Néanmoins, les classifications qui viennent
d'être énumérées ne constituent pas une liste
exhaustive. De plus en plus, on voit apparaître une nouvelle
classification qui semble privilégier la structure de
propriété des institutions (Cellule de microfinance, 2005). Cette
typologie qui est reprise en partie par Boyé & al. (2006) distingue
cinq types d'IMF à savoir: les mutuelles et coopératives
d'épargne et de crédit, les associations et ONG
spécialisées en microfinance, les sociétés à
capitaux privés, les groupements d'épargne et de crédit,
puis les projets et programmes publics à volet microfinance.
1- La microfinance au Bénin
Nous présenterons la microfinance au Bénin
à travers d'abord la finance informelle source d'inspiration de la
microfinance au Bénin, ensuite la structure de l'offre et enfin une
analyse SWOT10 du secteur de la microfinance au Bénin.
a) La finance informelle : une source d'inspiration de
la microfinance au Bénin
Depuis l'époque coloniale, l'exclusion bancaire a
souvent conduit les ménages à adopter des circuits de
proximité pour assurer le financement de leurs projets (Bekolo-Ebe,
1993). Mais au Bénin, c'est la dérive économique et
financière des années 1980 qui a stimulé
l'intérêt des divers acteurs économiques pour la finance
informelle. Plusieurs travaux (Lelart, 1989, 1997 ; Lelart & Gnansounou,
1990 ; Gentil & al. 1992; Adechoubou, 1996 ; Agbodjan, 1997) ont
évoqué deux groupes de pratiques. Le premier regroupe les
circuits commerciaux dans lesquels le prêt est
rémunéré par un taux d'intérêt effectif qui
varie en fonction des systèmes. On peut en citer quatre parmi les plus
courantes au Bénin : la tontine commerciale, la tontine
financière (les banquiers ambulants), la
10 Forces, faiblesses, opportunités et
menaces
16
Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
tontine d'affaires11, puis enfin les
prêteurs individuels (usuriers). Le second groupe est quant à lui
constitué des circuits non commerciaux caractérisés par
des prêts sans intérêt ou des dons (Lelart, 1997 ; Robinson,
1998). On peut citer entre autres : la tontine mutuelle, les aides (dons ou
prêts sans intérêt) provenant de la proximité
familiale ou des amis. Cependant, en dépit de sa pertinence, la finance
informelle ne permet pas de satisfaire les besoins variés des PME dans
leur entièreté. De plus, l'émergence de la microfinance et
sa réglementation au niveau de l'UEMOA n'est pas sans effet sur le
rayonnement de la finance informelle au Bénin (Lelart, 2000). En effet,
la Loi PARMEC autorise les IMF agréées sous forme de
Coopératives ou de Mutuelles d'épargne et de crédit,
à recevoir de l'épargne de leurs membres ou adhérents. De
cette autorisation, il résulte implicitement que l'activité de
collecte d'épargne très développée chez les
banquiers ambulants (Lelart, 1989) est considérée comme
illégale. «Cette disposition a amené des banquiers ambulants
à se transformer en mutuelles factices pour prétendre à la
légalité » (Lanha, 2006).
b) La structure de l'offre
De ce point de vue, la microfinance se distingue au
Bénin par une diversité dans l'offre des services financiers aux
ménages économiquement faibles. Mais la multiplicité des
critères de classification et les similitudes existantes entre les
institutions, rend difficile l'élaboration de typologies exactes dans le
secteur.
? Le classement par mode
d'intervention
Au Bénin comme dans les autres pays de l'UEMOA, la
typologie des IMF repose d'une part sur la forme juridique (loi PARMEC) et
d'autre part sur les critères harmonisés relatifs au domaine
d'activité. Ces derniers critères restent les plus usités
au sein de l'UEMOA et par la BCEAO qui distingue trois types d'institutions
dont le tableau 2.12 donne une importance relative de 2002 à 2005. Il
s'agit des institutions mutualistes ou coopératives
d'épargne-crédit (IMC), des institutions de crédit direct
(ICD) et des ONG et projets à volet microfinance (ONG).
11 Importée du Cameroun, cette forme de
tontine est relativement récente au Bénin.
17
Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
Tableau 4 : Typologie des IMF par domaine
d'activité
Caractéristiques
|
Année
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
|
IMC
|
82,47%
|
79,38%
|
78,49%
|
80,20%
|
Part de clients
|
ICD
|
17,17%
|
20,10%
|
21,24%
|
19,29%
|
servis
|
ONG
|
00,36%
|
00,52%
|
00,27%
|
00,51%
|
|
IMC
|
82,84%
|
79,97%
|
74,79%
|
72,44%
|
Proportion des
|
ICD
|
16,89%
|
19,75%
|
25,07%
|
27,37%
|
dépôts
|
ONG
|
00,27%
|
00,28%
|
00,14%
|
00,19%
|
|
IMC
|
45,87%
|
39,75%
|
29,36%
|
28,80%
|
Proportion des
|
ICD
|
53,79%
|
59,87%
|
70,52%
|
70,98%
|
crédits
|
ONG
|
00,34%
|
00,38%
|
00,12%
|
00,22%
|
|
Source : Cellule de Microfinance du Bénin
(CMF, 2006).
Les institutions mutualistes ou coopératives
d'épargne et de crédit (IMC) : Cette catégorie
regroupe les IMF qui sont légitimées au niveau faîtier par
un agrément et au niveau local par une reconnaissance du
ministère des finances. Il s'agit des coopératives, des
mutuelles, ainsi que des groupements autogérés d'épargne
et de crédit. A titre d'exemple, le Bénin compte plusieurs
fédérations d'IMC dont les plus importantes sont FECECAM (101
caisses), UNACREP (35 caisses) et RENACA (25 caisses). Comme le montre le
tableau précédent, cette catégorie est largement dominante
dans le secteur (en nombre de clients ou de dépôts
collectés), avec à sa tête le réseau FECECAM. Ce
réseau compte 73,2% de la clientèle, 76,4% des
dépôts et 37,1% de l'encours de crédit du secteur (CMF,
2004). Selon une étude de MIX (Microfinance Information eXchange), la
FECECAM occupe simultanément le deuxième rang des IMF d'Afrique
subsaharienne, après TEBA en Afrique du Sud, sur la base du total de
l'encours brut de prêts, et le deuxième après KPOSB au
Kenya, sur la base du nombre d'épargnants (Lafourcade & al. 2005,
p.20). Cependant, les IMC sont en perte progressive de part de marché
depuis quelques années. En effet, ce constat n'est qu'un reflet des
difficultés auxquelles la plupart des réseaux sont
confrontés.
Les institutions de crédit direct (ICD) :
Cette catégorie regroupe les associations et les
sociétés spécialisées dans la microfinance, qui
sont quant à elles soumises à une convention renouvelable
(Arrêté n°465/MF/DC/MICROFIN du 7 juin 1999) signée
avec l'autorité de tutelle, à savoir le ministère des
finances. Bien que faible au départ, la proportion de ces institutions
augmente depuis quelques années, surtout en termes
18
Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
d'encours de crédit. Cette croissance résulte
du fait que la majorité des IMF de cette catégorie
réalisent des performances remarquables dans le secteur, voire à
l'échelle sous-régionale. Pour preuve PADME, FINADEV et Vital
Finance figurent parmi les vingt IMF africaines les plus productives
(Lafourcade & al. 2005, p.22).
Les ONG et les projets à volet microfinance :
Cette catégorie qui détient une part de marché
très faible (moins de 1%), semble privilégier la dimension
sociale. Cela s'explique par le fait que, pour la plupart des IMF de ce type,
l'intermédiation financière ne constitue pas le but principal.
Cependant, dans le cadre de leurs activités de microfinance, elles
signent, tout comme la catégorie précédente, une
convention avec le ministère des finances.
? L'implantation
géographique
De fait, on distingue trois groupes d'institutions. Le
premier désigne les institutions implantées exclusivement en
zones urbaines et périurbaines, souvent marquées par une forte
densité de la population: il s'agit en majorité des institutions
de crédit direct qui sont beaucoup plus axées sur les objectifs
de viabilité. Ceci confirme le principe généralisé
dans les pays d'Amérique latine et d'Asie, suivant lequel, le
succès de l'activité de microfinance exige une forte
densité de population. Néanmoins depuis ces quatre
dernières années, certaines d'entre elles (dont PADME, PAPME,
CFAD et FINADEV), dans le cadre d'une stratégie de croissance, disposent
de quelques guichets dans les grandes agglomérations des zones rurales.
Le deuxième groupe comprend les IMF ayant une couverture nationale :
c'est le cas du réseau FECECAM qui dispose d'au moins un guichet dans
chacune des 77 communes que compte le Bénin. Ce faisant, il a l'avantage
de couvrir une clientèle plus large. Enfin, le troisième comprend
celles dont la présence est plus marquée dans les zones rurales :
on retrouve ici certains réseaux mutualistes tels que le RENACA et
l'UNACREP, ainsi que les ONG et les projets à volet microfinance qui
sont bien plus axés sur les objectifs sociaux. Le tableau 2.13 et la
carte (voir page suivante) indiquent la présence des différents
types d'IMF dans les 12 départements du Bénin, ainsi que du
degré de pauvreté qui caractérise chacun d'eux.
D'après les données de CMF (2005), le Bénin compte 1.308
guichets de microfinance. Les institutions mutualistes ou coopératives
(IMC) viennent en tête avec 1.036 guichets, dont 786 sont
implantés par les groupements d'épargne et de crédit (dont
48 pour FECECAM) et 250 par les caisses affiliées ou non à un
réseau
19
Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
(parmi les 250 caisses, 101, soit 40% sont membres du
réseau FECECAM). Les ONG et projets à volet microfinance, puis
les institutions de crédit direct (ICD) viennent ensuite avec
respectivement 189 et 83 guichets.
Tableau 5 : Répartition des IMF par
catégorie dans les 12 départements du Bénin
Départem ent
|
Nombre de
communes
|
Population rurale (%)
|
Indice de
Pauvreté
|
Nombre de guichets des
|
Total par départem ent
|
Ratio de Goldsmith
(%0)
|
|
ICD* *
|
ONG* **
|
|
6
9
8
|
78,3
62,3
62,0
|
65,7
60,9
42,8
|
36
128
111
|
3
4
9
|
2
18
13
|
41
150
133
|
0,06
6
0,23
|
Brgou Collines Couffo Donga
|
8
6
6
4
|
56,6 780 79,4 69,1
|
55,1 473 54,8 60,9
|
75 140 103 45
|
9
3
2
2
|
26 33 2 20
|
10 176 107 67
|
6
0,28
1
1
5
0,17
|
Littora Mono
Ouémé Plateau Zou
|
1
6
9
5
9
|
0,0
78,6
55,7
70,1
71,7
|
20,9
44,
44,2
51,7
47,0
|
50
85
128
51
84
|
25
7
10
4
5
|
9
27
14
10
15
|
84
119
152
65
104
|
012
2
,9
8
,15
7
0,18
,12
|
Ensemble pays
|
77
|
61,2
|
47,6
|
1.036
|
83
|
189
|
1308
|
7
0,167
014
|
|
(*) IMC : Institutions Mutualistes et Coopératives
d'Epargne et de Crédit (**) ICD :
01
Institutions de Crédit Direct
(***) ONG : Organisations Non Gouvernementales et Projets
à Volet Microfinance Source : Synthèse issue des
données de CMF (2005) et d'INSAE (2005). c) Analyse SWOT du
secteur de la microfinance au Bénin
Les problèmes actuels du secteur de la microfinance au
Bénin tels que relatés par le Consortium Alafia12 lors
de sa dernière assemblée générale tenue en 2008 se
rapportent beaucoup plus aux défis actuels à relever par les
diverses institutions de microfinance pour la pérennité du
secteur. Il s'agit notamment de deux catégories de problèmes :
les problèmes récurrents et les difficultés
émergentes. Pour ce qui concerne les problèmes récurrents,
il s'agit de :
12 Association nationale des praticiens de la
microfinance au Bénin.
20
Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
· la mobilisation et du recyclage des ressources
financières locales car les IMF en générale n'ont pas une
bonne politique de mobilisation de l'épargne et ne respectent pas
toujours les normes de la loi PARMEC notamment l'instruction n°06 relative
aux modalités de détermination des ratios prudentiels ;
· la mobilisation et de la gestion des lignes de
crédit extérieurs entrainant la mauvaise foi des
bénéficiaires qui considèrent lesdits crédits comme
des dons ;
· l'appréciation de l'impact de leurs
activités car les IMF doivent pouvoir mesurer l'impact de leurs
activités sur l'institution d'une part et sur les
bénéficiaires d'autre part ;
· l'organisation de l'assistance technique au
bénéfice du secteur ;
· la mauvaise gouvernance due au non respect des
dispositions de la loi PARMEC, notamment en son chapitre V relatif aux
dispositions communes au Conseil d'Administration, au Comité de
Crédit et au Conseil de Surveillance, et le système mis en place
dans les SFD souffre de beaucoup d'insuffisances et ne permet pas de renseigner
de façon fiable certaines données nécessaires pour
l'établissement des statistiques sectorielles ;
· la mauvaise qualité de l'information
financière ; cause de la non-exécution ou des retards
constatés dans la mise en oeuvre des recommandations formulées
à l'issue des inspections de la cellule qui empêche parfois la
CSSFD de disposer des données fiables pour l'établissement des
statistiques ;
· la conformité à la réglementation
dans la mesure où beaucoup d'entre elles exercent sans un
agrément.
Les difficultés émergentes
s'énoncent comme suit :
· la perte de crédibilité de plus en plus
croissante des institutions due à des communications non favorables au
secteur ;
· la dégradation de l'image internationale du
secteur béninois de la microfinance qui rend plus difficile la recherche
de partenaires étrangers pour les institutions de microfinance ;
· l'acharnement du fisc contre certaines institutions de
microfinance mettant ainsi en cause les conventions et agréments
signés par ces dernières.
A la lecture de tous les problèmes
sus-énoncés, il apparaît que les acteurs de la microfinance
au Bénin se préoccupent plus des problèmes liés
à la pérennité des SFD qu'à
21
Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
ceux liés à ses objectifs fondamentaux qui sont
de financer les personnes les plus pauvres exclues du système financier
classique et de contribuer à la réduction de la pauvreté.
Mais très rapidement, l'effondrement voire la disparition de certaines
institutions de microfinance ont tôt fait de révéler la
fragilité de ces institutions qui, pour la plupart, n'étaient pas
financièrement viables et donc exposées à la faillite. Les
bailleurs de fonds ont donc placé cette exigence au coeur de
l'activité de microcrédit. Pendant une dizaine d'années,
cette exigence a relégué au second plan les objectifs sociaux que
la plupart des IMF se sont assignées. Aujourd'hui, l'impact social entre
dans les exigences des bailleurs de fonds qui s'interrogent de plus en plus sur
la portée sociale de leurs actions. Certes les objectifs sociaux ne
peuvent être atteints si la viabilité financière voire la
pérennité de l'institution n'est pas garantie13.
Néanmoins nonobstant les insuffisances et contraintes, le secteur
présente également des atouts et opportunités
présentés dans le tableau ci-dessous.
Tableau 6 : Synthèses SWOT
Forces
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Faiblesses
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Existence dans l'ensemble d'une gamme
|
Trop grande proportion d'IMF non enregistrées
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variées d'IMF apportant des services
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selon la réglementation en vigueur ;
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financiers diversifiés à la plupart des
|
Non maîtrise de la gestion des risques et des
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couches sociales ;
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impayés dans un environnement où la cavalerie
|
Evolution très soutenue des indicateurs du
|
des clients se développe très rapidement ;
|
secteur depuis dix ans avec des prestataires
|
Insuffisance de ressources financières devant
|
de services financiers de proximité qui font
|
permettre aux IMF de satisfaire les demandes
|
progressivement émerger un nouveau
métier, celui du microfinancier ;
|
solvables de crédit qui adressées ;
|
|
Surveillance du secteur par l'autorité de tutelle
|
Existence de dispositifs d'accompagnement,
notamment du Consortium Alafia, qui
|
non étendue sur tout le territoire et avec une
fréquence qui limite la prévention des risques
|
offrent des services de formation et d'appui conseil de bonne
qualité ;
|
systémique ;
|
|
Absence de politiques spécifiques de
|
La sécurisation du secteur évolution
|
financement du monde rural dans un cadre
|
positivement du point de vue de la maîtrise
|
concerté regroupant les IMF (professionnels du
|
des contrôles internes par les IMF et
|
domaine), l'Etat et les partenaires au
|
l'utilisation quasi généralisée des SIG
;
|
développement ;
|
La maîtrise des charges et la culture de la
|
Intervention directe de l'Etat dans la pratique de
|
viabilité financière commencent par rentrer
dans les habitudes des microfinanciers.
|
l'activité de microfinance
|
|
Pratique de taux d'intérêt assez
décriée de nos jours.
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13 Acclassato, 2006
22
Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
Tableau 7 : Synthèses SWOT (suite et
fin)
Opportunités
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Menaces/Contraintes
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L'existence d'un marché potentiellement
|
Population pauvre, enclavée en zone rurale avec
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porteur pour les IMF, qui innovent sur leurs
|
des niveaux de scolarisation ou d'alphabétisation
|
modes opératoires et sur leurs services
|
faible freinent la pénétration des prestataires
des
|
financiers ;
|
services financiers ;
|
L'engagement de l'Etat pour trouver une
|
Les interventions directes de l'Etat en matière de
|
solution au financement de l'économie
|
fournitures de services financiers dérégulent
le
|
rurale pour la promotion d'une révolution
|
marché financier rural ;
|
verte peut se traduire par des mesures
|
La viabilité des IMF en milieu rural est
perturbée
|
incitatives aux opérateurs qui trouveront des
|
par plusieurs facteurs imprévisibles comme les
|
solutions adaptées au financement du
monde rural ;
|
aléas climatiques.
|
Les évolutions des nouvelles technologies de
l'information sont une opportunité pour les IMF opérant ou
voulant opérer en milieu rural.
|
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Source : inspiré du diagnostic
approfondi14 du secteur de la microfinance au Bénin
II. La performance sociale
Pendant longtemps la performance a été
analysée dans sa dimension financière alors que, des
études plus récentes montrent la nécessité
d'intégrer, dans la performance, une dimension sociale. En fait,
l'évolution de l'environnement des entreprises, en
générale, et des institutions de microfinance, en particulier,
fait que de plus en plus les bailleurs ainsi que les investisseurs demandent
aux IMF de rendre compte sur la population réellement touchée.
En plus de cette pression externe, ces IMF s'interrogent sur
comment elles peuvent concilier les objectifs sociaux et la viabilité
financière. Certaines IMF ont même pensé que le
renforcement de la performance sociale, pourrait conduire sur le court terme
à un renforcement de la performance financière. En effet,
beaucoup d'études sur la performance incluent la dimension sociale de la
performance. Pourquoi performance sociale ? La réponse à cette
question vise à voir d'abord l'attention croissante à la
performance sociale
14 PNUD Bénin, 2007
23
Réalisé par Olivier
NOUKPOKINNOU
Évaluation de la performance sociale du
programme de microfinance d'APHEDD-BAVEC BENIN
qui vise dans un second temps à expliquer comment les
services financiers influent sur la vie des pauvres.
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