L'instabilité des marchés des céréales dans l'extrême-nord Cameroun( Télécharger le fichier original )par Natali KOSSOUMNA LIBAA Université de Ngaoundéré Cameroun - Maà®trise de géographie 2001 |
9.1.2. Des mécanismes de régulation insuffisants et mal utilisésPour réguler les variations du marché des céréales, un Office céréalier a été mis en place par décret n°75/440 du 21 juin 1975 à Garoua. Très rapidement, les objectifs de l'Office se sont révélés trop ambitieux et son comportement vis-à-vis du marché n'est guère différent de celui des commerçants. Les achats sont opérés après la récolte au moment et aux endroits où les cours sont les plus bas. Les ventes sont faites à des prix trop proches de ceux pratiqués ailleurs et en quantités trop faibles pour peser vraiment sur le marché. Aujourd'hui, les moyens financiers manquent à l'organisation pour constituer un véritable stock régulateur. De plus, ces stocks de réserve coûtent cher, non seulement parce qu'ils immobilisent des quantités de céréales et donc des sommes d'argent considérables et, mais surtout parce qu'il faut les protéger, les garder, lutter contre les insectes, les déplacer et que finalement, malgré ces précautions, il y a des pertes inévitables et une diminution de la valeur. Partagé entre la volonté d'assurer un prix suffisamment rémunérateur aux producteurs et d'assurer la sécurité alimentaire des consommateurs, l'Etat n'a pas su maintenir un différentiel suffisant entre les prix officiels d'achat (aux producteurs) et de vente (aux consommateurs) pour permettre à l'Office de couvrir ses coûts de fonctionnement et ceci d'autant moins que le principe des prix pan-territoriaux et pan-saisonniers est de nature à augmenter l'importance des fonds pour supporter les coûts de régulation. Les pertes inhérentes aux stocks de sécurité destinés à couvrir les aléas climatiques et l'approvisionnement des populations pauvres et des zones enclavées, deux fonctions souvent mal assurées par le commerce privé, participent bien entendu, au déficit de l'Office. Les emprunts destinés à l'aide aux populations sinistrées ne sont pas remboursés par l'Etat. Plus reprimables encore est le gaspillage, les détournements en nature et en argent en plus des effets pervers inhérents aux modes de décision et d'intervention de l'Office (décisions centralisées, prix uniformes, spéculation risquée, politisation des interventions...) qui ne tiennent pas compte des contraintes et des risques des producteurs, et compromettent ainsi une intervention durable et efficace dans ce secteur. En plus, en cherchant à évincer les commerçants privés du marché, mais incapable de trouver la juste mesure des prix compte tenu d'une dispersion de l'information pertinente, l'Etat ne parvient qu'à placer l'Office dans une situation délicate. Loin de réduire l'incertitude des producteurs, l'incapacité de l'Office à tenir ses engagements et les contraintes imposées à l'intervention experte des commerçants privés participent, au contraire, à augmenter les risques et à décourager la production. Les distributions gratuites des aides alimentaires visant en principe à secourir les populations vulnérables ont aussi des effets pervers sur le marché des céréales. Compte tenu des difficultés de ciblage des populations nécessiteuses, les céréales distribuées dans le cadre d'opérations d'urgence sont parfois réintroduites dans les circuits marchands engendrant des risques dépressifs sur les prix. En plus, le ciblage des périodes d'octroi de l'aide alimentaire ne correspond pas toujours à des périodes de pénurie. Ces aides arrivent parfois en retard au moment où les populations n'en n'ont plus besoin. Les quantités souvent importantes7(*) entraînent une baisse des prix des céréales sur les marchés décourageant ainsi les productions. Et ceci d'autant plus que s'agissant de dons et non d'achats, la commercialisation de ces céréales n'est pas soumise à la même contrainte de rentabilité que celles des circuits marchands. Aussi, les commerçants ou autres bénéficiaires ne perdent-ils rien en les vendant à des prix bas si en plus ces aides ne correspondent pas aux habitudes alimentaires des populations. * 7 12 040 tonnes en avril 1998, 2 651,1 tonnes en août 1999 (Rapport d'activités PAM, avril 1998 et août 1999) |
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