9.1.1.5. Concurrence dans
l'utilisation des céréales entre la fabrication de la
bière locale et l'alimentation
Le nombre de transformatrice de bières locales est
important dans les villes et par conséquent, il y a une forte
consommation des céréales pour cette activité. En effet,
la crise économique de la fin des années 80, puis la
dévaluation (janvier 1994), ont fortement stimulé la demande de
bières artisanales, en substitution de la bière industrielle.
Toutes les couches sociales en consomment. Dans la ville de Maroua par exemple,
23 359 kg de céréales sont transformés par jour en
boissons alcooliques (CDD, 1999) et en milieu rural cette quantité est
de 5 833 kg (Yonga, 1998). La présence importante dans ces villes des
peuples Massa, Toupouri, Sara, Moundang, Guiziga... traditionnellement
consommateurs de bières locales explique cette situation. La
transformation de bière locale est si importante qu'il existe dans ces
villes des quartiers réservés pour cette activité qui ne
désemplissent pas tous les jours de l'année (Joli soir à
Yagoua, Pont et Domayo à Maroua, Bakassi à
Kaélé...). Les transformatrices de bières locales se
ravitaillent en détail sur les marchés locaux au jour le jour. En
plus, la quantité de céréales utilisée pour cette
activité ne diminue pas même en période de pénurie.
9.1.1.6. Des pratiques
spéculatives sur les marchés urbains
Les pratiques spéculatives existent surtout dans les
marchés urbains où il existe de grands magasins de stockage. Ces
marchés sont également stimulés par une importance demande
des consommateurs et des transformateurs. D'après le témoignage
des commerçants sur les marchés, le nombre de stockeurs a
doublé depuis la disette de 1998. Cette augmentation va de paire avec la
quantité de céréales stockée provoquant un
déficit ou un excédent artificiel selon les années et
faussant ainsi les conditions naturelles d'ajustement de l'offre à la
demande. Ceci nous amène à considérer que
l'instabilité sur ces marchés n'est pas toujours le
résultat des aléas climatiques. Elle est aussi provoquée
par les spéculateurs. Cette pratique à double revers peut
provoquer deux situations tout à fait contraire : la hausse ou la
chute des prix à des moments inattendus. Ainsi, les
références aux prix passés entretiennent voire accroissent
l'instabilité du marché. En effet la pratique du stockage
spéculatif ne produit pas toujours la hausse des prix sur le
marché. Cela veut tout simplement dire que les commerçants
n'arrivent pas toujours à tirer bénéfice de cette pratique
même lorsqu'ils font un stockage sur plusieurs mois, afin de profiter de
la « soudure » (mai/juin à septembre/octobre) pour
vendre plus cher. Il faut noter que le marché est sensible à la
récolte suivante. En cas de bonnes récoltes, les producteurs
ainsi que les commerçants mettent sur le marché des
quantités importantes de céréales stockées afin de
faire de la place pour la nouvelle récolte, ce qui justifie une baisse
des prix pendant la soudure en juillet/août. Certaines années,
comme en 1999 et 2000, les prix moyens pendant la soudure peuvent même
être inférieurs à ceux de la période de
récolte précédente. C'est un risque inhérent
à la spéculation.
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