Section 2: Les difficultés d'ordre sociologique et
culturel
Il convient dans cette section, de relever d'une part les
limites portées par les acteurs du développement (I), avant de
noter celles émanant des populations locales (II).
I. Les limites portées
par les acteurs du développement
Les limites portées par les acteurs du
développement concernent le manque de moyens financiers et
matériels pour réaliser le développement des baka (A) et
la conception du développement par ces acteurs (B).
A- Le manque de moyens financiers
et matériels pour réaliser le développement des baka
La limite liée au manque de moyens financiers et
matériels se retrouve dans la majorité des cas auprès des
ONG locales oeuvrant pour le développement des baka, telles que le
CADDAP. En effet, cette ONG doit couvrir toute la région de l'Est
Cameroun, et dispose pour le faire, de moyens extrêmement limités.
Certes, elle reçoit la contribution de bailleurs de fonds, mais cela
n'est pas suffisant.
L'Etat affirme accorder des subventions aux ONG, au CADDAP en
particulier. Mais, la somme annoncée est souvent réduite de
moitié, voire plus. Ainsi, lorsqu'on annonce à la directrice du
CADDAP que cette ONG bénéficie d'un financement de 300 000
FCFA par exemple, quand elle se rend dans les locaux du Ministère pour
percevoir la somme promise, elle se voit remettre 75 000FCFA. De cette
façon, les financements que procure l'Etat n'ont pas une incidence
considérable sur l'avancée des projets de développement.
Pourtant, le Chef de la Section des groupes marginaux et de l'organisation de
l'action communautaire d'appui aux initiatives locales de solidarité du
Centre social du MINAS d'Abong Mbang a révélé lors de
l'entretien passé avec lui, que l'Etat du Cameroun a prévu un
budget de près de 900 millions de FCFA au profit des populations
autochtones du Cameroun.
En outre, dans le cadre du financement, il convient de relever
la pratique selon laquelle des ONG élaborent des projets, mais pas dans
le but de venir en aide aux baka, plutôt dans celui de se faire de
l'argent. Pour cela, toutes les techniques sont utilisées pour tromper
la vigilance des bailleurs de fonds, telles que la production de fausses
pièces justificatives des dépenses, la construction des
infrastructures en matériau de mauvaise qualité, etc. Tout cela
part de la mentalité des acteurs du développement des baka.
Même si ces derniers obtiennent des financements, ceux-ci seront
utilisés en fonction de la conception qu'ils ont du droit au
développement au profit des baka.
B- La conception du
développement par les acteurs de développement
Les acteurs du développement n'ont pas souvent la
même conception du développement. Le débat en cours est
celui de savoir si le développement nécessite qu'on s'y adapte
ou consiste à apporter à une société ce dont elle a
besoin. Les acteurs ne sont pas unanimes sur la question, mais à l'Est
Cameroun, l'on observe que les stratégies de développement sont
sensiblement semblables. Et cela constitue un frein à la
réalisation du développement des baka dans la mesure où
les acteurs du développement ont pour souci majeur d'uniformiser le
développement de tous les citoyens camerounais. Ils pensent à
sortir les baka de leur situation de
« sous-humanité » pour leur permettre au même
titre que les autres, d'accéder au développement. Or, de
nombreuses études auxquelles s'ajoute la présente, ont
démontré à suffisance que le développement tel
qu'il est perçu pour le groupe dominant, doit être
considéré différemment en ce qui concerne les peuples
autochtones.
Les acteurs qui affirment même être conscients de
l'enjeu qui existe autour du développement des peuples autochtones,
n'adoptent pas une stratégie strictement différente des autres.
Bien plus, tous les acteurs sont caractérisés par une impatience
prononcée à l'endroit des baka. Cela s'illustre par le fait que
les projets de développement élaborés le sont de
manière périodique. Leur durée est
déterminée à l'avance, ce qui pousse les acteurs à
souvent accélérer le processus de réalisation pour
atteindre les objectifs fixés à la date prévue. Cela
démontre qu'à ce moment là il ne s'agit plus de la
recherche de l'intérêt des peuples autochtones, mais plutôt
de celui des acteurs en question. D'où l'importance de leur conception
du développement des baka.
Il convient néanmoins de relever les limites provenant
des populations locales elles mêmes.
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