2.1.4.1. La durée de séjour
Il semble évident que la durée de séjour
joue un rôle crucial, susceptible d'affecter les transformations
socioculturelles dans toute leur ampleur. Au plus la présence de
l'étudiant dans la société d'accueil est longue :
· Au plus il a d'opportunités de
s'imprégner de la symbolique d'ensemble qui lie la société
; d'observer, de reproduire, d'intégrer les significations
partagées localement, y compris la langue, les attitudes, les
comportements et pratiques divers.
· Au plus son réseau social est susceptible de
s'étendre, de se diversifier, de se renforcer ; la somme de ses
interactions de croître et les bénéfices qui en
découlent de s'accumuler.
· Au plus la marge de manoeuvre pour gérer le
choc culturel est large. La nouveauté s'estompant graduellement au
profit du familier, l'incertitude se réduit, les situations et les
évènements se répètent. Fort de son
expérience, l'individu peut fonctionner plus efficacement (Adler,
1975).
Cependant, il faut bien reconnaître que l'impact de la
durée de séjour sur les transformations socioculturelles n'est
pas systématique. Il est d'ailleurs impossible au demeurant de
déterminer une durée optimale de séjour, tant chaque
expérience est différente et si nombreux sont les facteurs
à entrer en jeu dans le processus de transformations
socioculturelles.
2.1.4.2. L'exposition interculturelle
antérieure
Le séjour à l'étranger en
général, vaste ensemble dont l'échange universitaire
international fait partie, constitue l'archétype de
l'expérience interculturelle, c'est une voie privilégiée
pour rencontrer l'Autre, découvrir de nouveaux horizons et se
transformer. Pourtant, on ne doit pas confondre
interculturel avec international. Il n'est pas
nécessaire de séjourner hors des frontières de son pays
pour bénéficier d'une expérience interculturelle : ce
n'est qu'un moyen parmi d'autres d'ouverture à la différence.
À vrai dire, l'interculturel c'est de l'interpersonnel, la communication
en est un ingrédient capital. Nous savons que nos sociétés
ne sont pas monolithiques, que le tissu social est
hétérogène et que de multiples origines culturelles
s'entrecroisent. Autrement dit, chaque culture d'ensemble se décompose
en une myriade de subcultures. C'est bien là, précisément
dans la richesse de ce vivier subculturel, que peuvent se trouver les
opportunités d'exposition interculturelle au sens large. Puisque la
diversité est en tout le monde, autochtone, étranger ou voisin de
palier, toute rencontre peut être (trans)formatrice. En effet, interagir,
échanger, avec des personnes d'horizons culturels et sociaux divers ;
participer à des évènements trouvant leurs ancrages
à l'extérieur des groupes avec lesquels on partage un large
ensemble de significations communes ; apprendre une langue
étrangère, lire des livres, regarder des films d'auteurs et
réalisateurs issus d'autres sociétés ; se
préoccuper de questions politiques ou sociales extra-territoriales et
bien d'autres choses encore sont autant de modalités d'exposition
interculturelle. Au sujet des médias, certains chercheurs
considèrent qu'ils offriraient une ouverture sur certaines dimensions
constitutives de leur société et qu'ils fourniraient des points
de repères au regard desquels les « étrangers »
pourraient auto-réguler leurs comportements et attitudes, adoucissant
ainsi la transition entre les sociétés (Kim, 2001). L'enjeu de
l'exposition interculturelle est bien de se défaire (autant que faire se
peut) des oeillères qui nous ont immanquablement été
collées tout au long du processus de socialisation, de s'affranchir le
plus possible de l'ethnocentrisme sous-jacent à notre vision du monde.
C'est pourquoi l'exposition interculturelle antérieure contribue
à préparer l'individu à la mobilité, elle lui donne
un aperçu de la différence culturelle. Bien entendu, toute
confrontation à l'altérité n'est pas significative de
fait. Par exemple, « De nombreuses études ont
démontré que les échanges ne réduisent pas
systématiquement les stéréotypes et les
préjugés » (Abdallah-Pretceille 1999). Les rencontres
interculturelles peuvent être un agent d'infléchissement de
l'ethnocentrisme, tout comme elle peuvent ne pas l'être. Notons
malgré tout que certaines études ont établi une
corrélation positive entre exposition interculturelle, réduction
du stress et gestion du choc culturel à l'étranger (Mapp et al.
2007).
|