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Le marché des restes humains. Etude sur le fétichisme politique à  Libreville

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par Lionel Cédrick IKOGOU-RENAMY
Université Omar Bongo Libreville - Maà®trise en sociologie de la connaissance 2008
  

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2-Les universitaires gabonais et africains face à la sorcellerie ou le rapport politique et fétichisme

Joseph TONDA55 propose le concept de Souverain moderne qui, d'après Florence BERNAULT, est une figure mi-Hobbesienne, mi-marxiste d'un Léviathan remis au goût du jour. Il décrit « l'ensemble des rapports qui, pour Joseph TONDA, gouvernent la production du monde de l'après colonial, et impose à ceux pris dans ses rêts, une culture du tourment, de la persécution, et de la violence retournée sur soi. Le Souverain moderne met en évidence les rapports de force qui gouvernent hiérarchies sociales et imaginaires en Afrique centrale ».56

Il existerait donc des relations entre symbolique et fétichisme. Ces relations sont livrées, parfois dispersées, dans plusieurs parties du livre. « Pour Joseph TONDA, le concept de violence symbolique emprunté à BOURDIEU, est impuissant à rendre compte de la violence publique et privée en Afrique centrale. Selon lui, la violence symbolique à l'oeuvre dans la plupart des sociétés occidentales stables, sauf cas limites, est en effet, une violence structurante, permettant aux autres formes de violence, violence physique et matérielle, d'être contenues. En Afrique centrale, en revanche, ce qu'il appelle la violence de l'imaginaire procède à une extraordinaire fusion confusion de tous les modes de violence. ».57

Parce que cette violence confond matériel et imaginaire, à l'instar des charmes païens capturant le matériel-immatériel des esprits, Joseph TONDA, choisit de l'appeler « fétiche ». Selon le Souverain moderne donc, les dynamiques d'assujettissement des colonisés se résument et s'incarnent dans des « fétiches » ou des « fétichismes », qui voilent les gens à eux-mêmes, obscurcissent les inégalités dont ils souffrent, et les rendent impuissants autrement que par la production de violence sur euxmêmes, par l'effet d'un véritable recyclage des brutalités coloniales.58

55 Joseph TONDA, le Souverain moderne, le corps du pouvoir en Afrique centrale (Congo, Gabon), Paris, Karthala, 2005, p.251.

56 Florence BERNAULT, Compte rendu de lecture, « Autour d'un livre : le Souverain moderne, le corps du pouvoir en Afrique centrale (Congo, Gabon), Paris, Karthala, 2005, 297 p., de Joseph TONDA », p.1.

57 Ibid., p.6.

58 Joseph TONDA, le Souverain moderne, le corps du pouvoir en Afrique centrale (Congo, Gabon), ibid., p.56.

L'envers de cette hypothèse est que l'imaginaire fétichiste du Souverain moderne, n'a ni limites raciales, ni spécificité culturelles, ni prédicat religieux, ni incarnation intellectuelle donnée. Il est une structure de causalité historiquement formée, inaugurée en Afrique centrale, par la venue de l'ordre capitaliste et colonial, et par la résonance de celui-ci avec les imaginaires locaux. Ainsi l'imagination théologique des missionnaires, l'imagination profane des indigènes et l'imagination scientifique de MARX s'entendent pour faire du fétichisme [...] ce qui unit au-delà de leur différence, le christianisme, le capitalisme et la sorcellerie.59

De plus, Joseph TONDA précise que « la criminalisation populaire des mandataires ou de manière générale, de tout homme politique, soupçonnés ou accusés d'attenter pour les des raisons et par des moyens fétichistes, mais aussi par la violence physique, à l'intégrité physiques des mandants, est un phénomène ordinaire au Gabon. Cette criminalité se caractérise par des « meurtres rituels » ou, comme il se dit aussi et suivant une logique de redoublement symbolique, des « sacrifices rituels ». L'objectif étant de prélever des organes humains appelés significativement « pièces détachées » : langues, mains, oreilles, crânes, coeurs, organes génitaux ».60

Nous ne pouvons poursuivre l'argumentaire avec l'auteur sans évoquer, et cela est crucial pour notre travail, qu'«aussi bien pendant les périodes électorales qu'entre deux élections, des témoignages de familles, des observations que l'on peut faire ainsi que des articles de presse permettent de se rendre compte de la réalité de ces « crimes » ou « sacrifices rituels ». Des noms des commanditaires et des exécutants sont cités et l'on évoque toujours soit par des allusions, soit ouvertement des hommes politiques, dont certains sont directement proches des hauts lieux du pouvoir ».61 Le constat de l'accroissement exponentiel de cette criminalité politico-fétichiste par des temps électoraux est donc particulièrement banal. Par ailleurs, et ce qui enrichit sa démonstration sur

59 Ibid., p.90.

60 Joseph TONDA, Fétichisme politique, fétichisme de la marchandise et criminalité électorale au Gabon, op.cit., p.3.

61 Joseph TONDA, Fétichisme politique, fétichisme de la marchandise et criminalité électorale au Gabon, ibid., p.3.

laquelle d'ailleurs nous nous appuyons pour notre analyse, c'est que « de jour comme de nuit, les cimetières sont visités. Les ossements humains foisonnent. Et il semble que dans cette affaire là, les parties génitales sont recherchées et que les « clitos » sont devenus des barres d'or ».62

Pour conforter les recherches de Joseph TONDA, les profanations des tombes au cimetière de Mindoubé de Libreville sont illustratives de ce fétichisme politique en tant que pratique courante à l'approche des élections politiques au Gabon.

Toujours pour rester dans cette mise en évidence de ce rapport, ce lien étroit entre le fétichisme et politique, nous avons retenu également la contribution de Fidèle Pierre NZE-NGUEMA63, qui nous présente que le succès du feu président Léon MBA résidait dans ses relations avec les pratiques culturelles et ésotériques du Gabon. Car pour Fidèle Pierre NZENGUEMA, le chef de l'État gabonais n'était pas que le chef de l'État, il devait aussi être le chef dans les cérémonies initiatiques. L'initiation de Léon MBA par exemple au culte Bwiti en est la parfaite illustration, car cela lui a permis d'assurer l'image d'un futur chef dont on ne saurait craindre la partialité. Trois facteurs sont mis en exergue par l'auteur, dans le rapport étroit et consubstantiel de la sorcellerie et le pouvoir, dont retenons le troisième. En effet, « le troisième facteur se résume dans l'imagerie populaire qui le percevait comme dépositaire d'une puissance spirituelle : l'évus ou évur (Fang), ignemba (Myènè), dikundu (Punu). Puissance sans laquelle il n'aurait pas pu assumer les fonctions de président de la République. L'évus participerait de l'assise sociale : la relation de sorcellerie renvoie au tissu existentiel au quotidien, dans les rapports intra-communautaires. L'on se trouve en présence d'une dialectique, dont les termes sont la force spirituelle et la lutte pour le pouvoir ».64 On comprend ainsi que « seuls peuvent se montrer forts, sans trop s'exposer, qu'il s'agisse de revendication de pouvoir, d'étalage de richesse, ou de multiplication d'alliance, ceux qui sont en situation sociale

62 Ibid., p.4.

63 Fidèle Pierre NZE-NGUEMA, L'Etat au Gabon. De 1929 à 1990. Le partage institutionnel du pouvoir, Paris, (coll. « Etudes africaines »), l'Harmattan, 1998, 239 p.

64 Fidèle Pierre NZE-NGUEMA L'Etat au Gabon. De 1929 à 1990. Le partage institutionnel du pouvoir, Paris, (coll. « Etudes africaines »), l'Harmattan, 1998, p.73.

de le faire »65 ; on soupçonnerait les hommes politiques par exemple. Loin de conclure ce débat sur le rapport de consubstantialité entre le fétichisme ou sorcellerie et pouvoir politique, l'identification du pouvoir à travers un individu gagne davantage en consistance qu'elle s'intègre dans un cadre de cohérence plus vaste, c'est-à-dire les sectes. « Sectes dont nous savons maintenant qu'elles ont joué et continuent de jouer un rôle cardinal dans la codification et la structuration de l'univers symbolique du pouvoir politique en Afrique dont le Bwiti, entre autres.

Ainsi les sociétés politiques africaines associent largement la domination physique matérielle des forces de contrainte (l'armée, la police, la justice...) à une dimension immatérielle : le sacré ».66 Si on devait conclure sur les facultés dévolues par la société à cette force mystique (l'évus, ignemba, dikundu, etc.) dans la consolidation de l'assise sociale du pouvoir, il importe ainsi de faire ressortir que celle-ci serait cause d'un certain fatalisme des populations face au phénomène politique en Afrique. C'est-à-dire que le phénomène ne reposerait que sur la violence physique et symbolique ; qu'enfin des comptes, il s'agit d'un pouvoir politique mortifère. A cet égard, « n'est-il pas indifférent de penser que des rivaux potentiels ou avérés de Léon MBA, se fussent peut-être mis en réserve de la présidence, conscients qu'il bénéficiait- à tort ou à raison-, d'une puissance spirituelle supérieure à la leur, ou dont ils auraient été dépourvus ».67

Autre contribution, dans cette dialectique entre fétichisme et /ou sorcellerie et le pouvoir politique en Afrique, c'est celle de Comi TOULABOR. En effet, pour lui, l'accent est mis sur des exemples contemporains en Afrique de sacrifices humains liés au politique. « Les sacrifices humains sont une pratique courante à travers l'histoire de l'humanité ».68 Car « des faisceaux d'indices concordants existent qui

65 Fidèle Pierre NZE-NGUEMA, Ibid., p.73 citant Marc AUGE, «Les croyances de la sorcellerie in la Construction du monde », Maspero 1974, p.52.

66 Ibid., p.74.

67 Jean François BAYART (sous la direction) Religion et politique en Afrique noire, Paris, Karthala, 1993 : 289, cité par Fidèle Pierre NZE NGUEMA, ibid., p.74.

68 Comi TOULABOR, « Sacrifices humains et politique : quelques exemples contemporains en Afrique », p.207, in P.KONINGS, W. van BINSBERGEN et G.HESSELINGS (dirs.), Trajectoires de libération en Afrique contemporaine, Paris, Karthala ; Leiden, ASC, 2000,295p.

permettent de dire que des sacrifices humains sont pratiqués par des dirigeants africains ».69 Ce qui est utile pour la suite de notre argumentaire, c'est de voir la définition que l'auteur donne du sacrifice humain et surtout à quelles fins. « Le sacrifice humain dont il est question ici consiste pour une personne à tuer intentionnellement selon un rituel approprié une autre personne, et à offrir son sang et/ou tout ou partie de son corps à une divinité ou « fétiche » dans le but de protéger et de conserver cet avantage aussi longtemps que possible. Le sacrifice humain compris ainsi n'est pas exclusif du sens métaphorique auquel il s'articule quand la violence politique peut être instrumentalisée pour occulter des meurtres rituels ».70

L'auteur nous fait remarquer aussi que « le sacrifice humain fait intervenir un personnage nodal qui est « le féticheur », le sacrificateur ou le « marabout » qui jouit d'une entière liberté dans la prescription et l'ordonnancement du sacrifice ... Une autre modalité est d'offrir au « fétiche » des parties de la victime supposée être le réceptacle de son énergie vitale : organe génitaux, foie, coeur, langue, crâne, ossements divers, etc. »71 Mieux, « il arrive aussi que l'on prélève des morceaux choisis sur des cadavres ou qu'on les achète sur le marché de trafic du corps humain qu'alimente la criminalité dans certains pays africains »72, en particulier au Gabon ; où comme nous l'avons dit plus haut, la recrudescence des crimes rituels et profanations de tombes et accusations d'acte de fétichisme se multiplient à la veille des élections. Ces pratiques occultes qui forment « le soubassement » (c'est le cas de le dire) du régime de BONGO. Le président gabonais, grand maître fondateur de l'obédience maçonnique baptisée Grand Rite équatorial, a réussi à syncrétiser les rites maçonniques et les bwiti ».73

Car « les membres bwiti aspirant à plus de statut social au sens large (richesse matérielle, notoriété sociale, hauts grades du savoir bwiti, etc.) sont obligés de conclure des pactes fondés sur le sacrifice humain. Il

69 Ibid., p.207.

70 Ibid., pp.208-209.

71 Ibid p.209.

72 Ibid., p.209.

73 Comi TOULABOR, « Sacrifices humains et politique : quelques exemples contemporains en Afrique », ibid., p.214.

existe, sur les ondes de Radio- Trottoir, les informations où apparaissent souvent dans les affaires scabreuses les noms du chef de l'Etat et des hauts dignitaires du régime ».74 La condition sine qua non du pouvoir est que si il y a sacrifice humain, ou tout autre acte de fétichisme posé par le candidat, il y a récompense immédiate. « Dans les années trente en effet, Léon MBA était membre du bwiti (et de la franc-maçonnerie). Pour accéder au haut grade dans la hiérarchie bwiti et aussi à un statut professionnel supérieur, il devait sacrifier un être cher, comme dans d'autres cultes initiatiques similaires. Il choisit donc son épouse. Son forfait accompli, il eut sa première consécration en devenant maîtrise bwiti ».75

Enfin, Comi TOULABOR met bien en évidence le rapport étroit entre fétichisme et politique « aux moments des remaniements ministériels, de nominations de quelque importance, et maintient de compétitions électorales, sont-ils très probablement des veillées d'armes où les meurtres rituels et le trafic du corps humain et leurs hypostases (volailles et bétail), atteignent des courbes ascendantes... Le sacrifice est une procédure de souscription à une assurance ou un acquittement du rappel ».76 « Le sacrifice est un véritable protocole d'échanges de dons et de contre-dons ».77

Comi TOULABOR avance comme explication parmi tant d'autres le fait que « le sacrifiant peut communier au corps et/ou au sang de la victime comme lors du sacrifice eucharistique catholique : ici on est en présence d'une relation ontologique. De même qu'ici des frères réunis goûtent de la chair et boivent du sang du Christ pour se sanctifier et pour s'identifier à lui, de même là le sacrifiant incorpore l'énergie vitale de sa victime par voie orale, nasale ou sanguine, en mangeant, en buvant, en inhalant des préparations ou des poudres nasales à base des éléments du corps humain ou alors en introduisant dans son corps les mêmes éléments par scarification ou incision ».78 Ainsi arrive t-il aux conclusions selon lesquelles « le sacrifice humain fait partie des milles et une stratégies de

74 Ibid., p.214.

75 Ibid., p.215.

76 Ibid., p.219.

77 Ibid., p.219.

78 Comi TOULABOR, « Sacrifices humains et politique : quelques exemples contemporains en Afrique »,

ibid., p.220.

quête du pouvoir et de sa préservation entre les mains des dirigeants africains ».79 Et qu'« avec les compétitions électorales qui précarisent la position de plus d'un dirigeant, on assistera de plus en plus à la multiplication des sacrifices humains vis-à-vis desquels les droits de l'Homme et de l'État de droit risquent d'être désarmés ».80

Parce que ces pratiques occultes « font du corps de l'autre, et surtout de sa vie, une vulgaire ressource politique qu'on peut actionner à sa guise ».81Dans la même perspective, nous convoquons Luc de HEUSCH82 pour qui le facteur magico-religieux demeure un élément majeur de légitimation et de conquête du contrôle politique d'un territoire. De plus, « le pouvoir trempe cette fois sans équivoque dans la sorcellerie maléfique. En effet, pour acquérir ses qualifications magiques (wene), le candidat chef doit livrer un certain nombre « de personnes de la nuit, qui, privées de leurs âme, meurent dans les jours qui suivent ».83 Pour lui, « l'économie marchande pervertit littéralement le système traditionnel et trouve dans la sorcellerie son alliée naturelle puisque la première implique la capture systématique d'êtres humains, réduits en esclavage, et la seconde le sacrifice humain. Le roi Garcia II, qui régna au milieu du XVII ème , était pleinement conscient de cette déchéance : « au lieu de l'or et de l'argent et d'autres biens qui servent de monnaie ailleurs, ici la monnaie est faite de personnes, qui ne sont ni or ni tissu, mais qui sont des créatures ».84

Enfin, « si l'association du pouvoir et de la sorcellerie au Mayombe doit être rapprochée de l'enrichissement d'un certain nombre de chefs à la faveur de la traite, on ne peut cependant considérer ce phénomène comme purement contingent. Il est inscrit en effet structuralement au coeur même de la sacralité ambivalente du pouvoir ; il s'agit d'une

79 Ibid., p.220.

80 Ibid., p.220.

81 Ibid., pp.220-221.

82 Luc de HEUSCH, Le roi du Kongo et des monstres sacrés. Mythes et rites bantous III, éditions Gallimard, 2000, 420 p.

83 Ibid., p.114.

84 Luc de HEUSCH, Le roi du Kongo et des monstres sacrés. Mythes et rites bantous III, ibid., p.122.

potentialité plus ou moins développée des sociétés bantoues d'Afrique centrale »85

En Afrique centrale, la « commercialisation des hommes » mais surtout de leur corps devient un phénomène des plus récurent. Dans son analyse sur le commerce illicite des hommes paru dans « Enjeux »86, Jean Bosco OYONO dresse un tableau générique de la prolifération des entreprises criminelles en Afrique centrale à l'ère globale. Pour lui, l'Afrique centrale est plus touchée que d'autres parties de l'Afrique et dénonce donc le commerce illicite des hommes ; particulièrement la traite des femmes comme trafics humains. Parce que victimes des mirages et eldorados européens, « les femmes sont particulièrement vulnérables. Elles peuvent être l'objet d'une exploitation sexuelle. Souvent endettées vis-à-vis des passeurs, elles sont forcées de se livrer à des activités criminelles pour rembourser leurs dettes ».87

Jean Bosco OYONO croise deux variables : « la prolifération des entreprises criminelles en Afrique centrale » et « l'ère globale », accusant la seconde d'être responsable des déviances et activités criminelles en Afrique centrale. Déviances et activités criminelles qui influencent aussi le quotidien des hommes. On pourrait, à la suite de Jean Bosco OYONO, se pose la question de savoir si la criminalité sous ses formes et ses corollaires sont la condition sine qua non des pays africains, en particulier ceux de l'Afrique centrale pour entrer dans l'ère de la mondialisation et la globalisation des économies et des échanges, et pour être qualifiés de pays modernes. Pour renchérir ses analyses, l'auteur fait état aussi du trafic d'organes. En effet, « les enlèvements et les disparitions, fréquents de nos jours, sont liés au trafic d'organes, voire d'ossements. Il est bien connu que le « marché noir » des organes humains est un commerce lucratif. Cette activité intéresse aussi le crime organisé. C'est un domaine

85 Ibid., p.123.

86Enjeux, Bulletin d'Analyse Géopolitiques pour l'Afrique Centrale, Yaoundé, 3èmeannée, publication trimestrielle, n°9 octobre-Décembre 2001, 31 p.

87 Jean Bosco OYONO, La prolifération des entreprises criminelles en Afrique centrale à l'ère globale, in ENJEUX n°9 octobre-Décembre 2001, p.10.

où l'on peut s'attendre à voir le milieu médical subir les attaques renforcées de la corruption ».88

Max Alexandre NGOUA pense que la pratique de la sorcellerie du Kong n'est pas un processus en marge de la vie sociale comme le pense le sens commun, parce que celui-ci de manière subtile et efficiente est usité par le pouvoir politique actuel du Gabon. La sorcellerie du Kong est liée à l'impact de la globalisation et que sa nature ambivalente provient de l'articulation entre valeurs anciennes, traditionnelles et locales, et les nouveaux flux de commerce interrégional et international. « L'aspect intriguant dans cette représentation (la sorcellerie du Kong) est qu'elle relativise la distinction entre hommes et marchandises. L'idée qu'on « vend » le parent et que celui-ci sera exploité dans une plantation de cacao, etc. est l'illustration parfaite de l'imprégnation dans nos moeurs du système capitaliste ».89

« L'argent est lié aux génies scientifiques que sont les voitures, les avions, les appareils électroménagers, les moyens de télécommunication (...) toutes ces choses suscitent envies et jalousie, frustrations (...) désirs de mort de l'autre possédant ».90 Enfin, « l'argent est l'une des principales causes de tous les malheurs qui sévissent dans le pays, c'est l'argent qui entraîne les gens à se jalouser et à se détruire, à s'abandonner au fétichisme et à la sorcellerie ; l'argent est en quelque sorte le premier fétiche ».91

Max A. NGOUA termine en disant que le kong est la nouvelle sorcellerie de la richesse ayant pour principe de base l'enrichissement rapide et le profit à tout prix. Le kong est donc une affaire de pouvoir, de domination (il s'agit du pouvoir politique).

88 Jean Bosco OYONO, La prolifération des entreprises criminelles en Afrique centrale à l'ère globale, ibid., p.10.

89 Max Alexandre NGOUA, La sorcellerie du Kong à Bitam : une manifestation symbolique de l'économie et de l'Etat capitaliste, p.11, Rapport de Licence en Sociologie, FLSH/UOB, Septembre 2003.

90 Joseph TONDA, Politique Africaine ; «Capital sorcier et travail de Dieu », n°79, octobre 2000.

91 Jean-Pierre DOZON, cité par Joseph TONDA ; op.cit.p.46.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon