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L'acquisition du genre et du code switching chez l'enfant bilingue précoce

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par Sophie Rimbaud
Université Montpellier III - Master 2 2009
  

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3. 5. Le code mixing chez le bilingue précoce

Lorsque l'enfant bilingue possède la traduction équivalente d'un mot dans l'autre langue, ce n'est pas pour autant qu'il emploiera indistinctement les deux mots. Si au premier stade, l'utilisation de mots des deux langues est indistinct quelque soit le contexte, à partir du second stade, l'utilisation d'un mot plutôt que sa traduction peut s'expliquer de deux façons : la première, parce que le mot prononcé appartient à une langue considérée comme dominante par l'enfant, la seconde en fonction du contexte et de la langue parlée par l'interlocuteur. L'adaptation à l'interlocuteur est très importante : en effet, Lanza (1997, cité par Deuchar et Quay, 2000), dit que l'enfant préfère utiliser la même langue que son interlocuteur.

Ce choix des langues est souvent lié au développement d'une compétence pragmatique : l'enfant relie un usage à un contexte, souvent un interlocuteur, spécifique. Il a été constaté alors que l'enfant bilingue était très tôt capable d'adapter sa langue à celle de son interlocuteur (Deuchar et Quay, 2003 et Genesee et Nicoladis, 2005) :

« There is considerable evidence that bilingual children's code-mixing is sensitive to contextual variables, including those related to interlocutor [...] topic (Lanvers, 2001), and the purpose of the interaction (Vihman, 1998). » (Genesee et Nicoladis 2005, 15-16).

Les enfants bilingues ont tous la capacité d'adapter leur langue à la situation (Romaine 1984 et Andersen 1990, cités par Deuchar et Quay 2003). L'enfant peut choisir une langue de façon arbitraire : ce choix est aussi en relation avec le développement de la compétence de communication21 qui, si elle est inégale, peut favoriser une langue au profit d'une autre. Comme nous l'avons dit précédemment la langue dominante est souvent considérée comme celle où la compétence de communication est la plus grande : c'est la langue dans laquelle l'enfant s'exprime le plus facilement et dans un plus grand nombre de situations que dans l'autre langue. Le choix de cette langue est alors souvent conditionné par le contexte, car pour développer une plus grande compétence de communication, il faut que l'enfant ait été

21 La compétence de communication se définit comme la capacité de communiquer avec différents locuteurs dans leur langue respective.

exposé plus longtemps à cette langue qu'à l'autre. L'enfant maîtrise le choix de sa langue en fonction du contexte, mais ce choix, imposé par une plus grande exposition à une des deux langues, peut révéler, dans l'environnement de l'enfant, l'existence d'un contexte diglossique dans lequel les deux langues auxquelles l'enfant est exposé, n'ont pas le même statut, ni la même répartition temporelle et contextuelle dans la communauté.

Il apparaît alors que le choix de la langue dépende fortement de paramètres contextuels diglossiques, développés dans la partie qui y a été consacrée. Si l'enfant montre un grand attachement identitaire à la langue il préfèrera parler la langue qu'il aura associée comme tenant de son identité (McClure 1981, cité par Deuchar et Quay). Le code-mixing révèle la langue dominante, celle choisie pour être mixée avec l'autre langue, que ce soit pour s'adapter un interlocuteur, ou pour pallier à un développement plus tardif de la deuxième langue : les carences lexicales ou syntaxiques peuvent être compensées par la langue qui possède les éléments qui n'existent pas encore dans l'autre langue. Mais le choix de la langue ne peut avoir lieu (Nicoladis et Genesee 1996, cités par Deuchar et Quay) que si les deux langues possèdent un répertoire suffisamment important pour être employées dans des contextes variés et spécifiques, et lorsque les traductions d'une langue à l'autre sont en nombre suffisant et significatifs. Ces choix des langues dépendent alors d'une compétence pragmatique qui s'acquiert parallèlement au développement des deux langues et qui lui permet d'apprendre quelle langue il faut utiliser en fonction du contexte.

Lorsque le choix de la langue devient purement contextuel et diglossique alors la quantité de code-mixing diminue : l'enfant ne mixera plus avec un interlocuteur dont il parle la même langue. Au fur et à mesure que l'enfant grandit le code-mixing devient plus une pratique linguistique délibérée qu'un simple automatisme d'acquisition ; Dans ce cas, Genesee et Nicoladis (2005) notent que le choix du code-mixing a une fonction pragmatique, par exemple une fonction d'emphase, afin d'insister sur un mot.

« Lanvers (2001) reports that her two German-English children (1;6 to 2:11) used language for emphasis (see also Goodz, 1989) and appeal, to quote a parent, and for topic shift (see also Vihman, 1998 ). » (Genesee et Nicoladis 2005, 16).

Ce choix paraît contributeur de la compréhension de l'échange, par la facilité du décodage de l'intention de l'information. Lorsque l'enfant se trouve dans un contexte où il doit parler la langue qu'il maîtrise le moins il pourra utiliser le code-mixing pour pallier à ce manque linguistique : dans ce cas c'est la compétence de communication qui sera l'élément déclencheur du code-mixing. Cependant, les problèmes liés à la compétence de communication se comblent vite, dans la mesure où l'enfant développe très rapidement les

compétences qui lui manquent. Lorsque l'enfant évolue dans un contexte social, hors du cadre familial, il va vite combler ce manque dans sa compétence de communication, car ce retard est lié au processus de socialisation : parallèlement à la nécessité de communiquer avec des interlocuteurs, nous assistons à un développement rapide des compétences22.

L'usage du code-mixing peut alors faire partie intégrante de la compétence de communication, et plus encore s'il appartient au processus de socialisation langagière dans la mesure où dans les communautés bilingues il faut s'insérer, pratiquer des formes spécifiques de code-mixing. Ainsi, comme cela a été abordé, le choix de la langue ou/et du code-mixing dépend fortement du contexte diglossique dans lequel l'enfant évolue. Un enfant qui évolue dans un cadre familial dans lequel les parents imposent un contexte monolingue l'enfant réduira conséquemment son code-mixing, voire le fera disparaître.

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