B - Les aspects touchant à certains
éléments de procédure
L'adaptation ou la réforme de la procédure devrait
tenir compte des fonctions contentieuses (1) et des fonctions non contentieuses
(2).
1 - Les aspects procéduraux relatifs aux
fonctions non contentieuses
Les aspects procéduraux en prendre en compte concernent
aussi bien la fonction consultative (a) que la fonction d'arbitrage et de
médiation (b).
a- Les aspects touchant à la fonction
consultative
Les aspects dont il est question tiennent au droit de saisine de
la Chambre d'arbitrage et de médiation de la CSO, au délai du
rendu des avis et à leurs caractères.
263 - En dehors de cette annexe, les
Etats membres de l'OAPI disposent actuellement de leurs propres lois
nationales en la matière. L'implication de l'Organisation dans cette
matière est aux termes de l'art. 2 de l'ABR de : « ~.susciter
la création d'organismes d'auteurs nationaux dans les Etats membres
où de tels organismes n'existent pas_ ».
264 - Source : Organigramme présenté par
Monsieur LAOUBARA, Chef du Département des ressources humaines et
financières, Stage à l'intention des étudiants de Master
II en Droit de la propriété intellectuelle, CFDE, OAPI, 9 mai
2011.
265 - René SAVATIER, Le droit de l'art et des lettres --
Les travaux des muses dans les balances de la justice -, LGDJ, Paris, 1953.
266 - Sur cette notion, lire : Laurier Yvon NGOMBE, Le
droit d'auteur en Afrique, L'harmattan, Paris, 2009, p. 11.
267 - Henri DESBOIS, « Les droits dits «
voisins du droit d'auteur » », in Mélanges offertes à
René SAVATIER, Paris, Dalloz, 1965, p. 251.
Les personnes investies du droit de saisine aux ivs
d'avis
Deux catégories de personnes pourraient se voir
reconnaitre le droit de saisine des chambres compétentes de la CSO aux
fins d'avis.
La première catégorie de « saisissant
» est représentée par les autorités en charge des
questions de propriété intellectuelle. Il s'agit du DG de l'OAPI,
des Ministres en charge des questions de propriété industrielle
et de propriété littéraire et artistique des Etats
membres, agissant au nom et pour le compte des SNL et des organismes de gestion
collective des droits d'auteur et des droits voisins268.
Les juridictions compétentes des Etats membres via les
Ministères en charge de la Justice pourraient également
solliciter les avis de la Chambre consultative de la CSO qui devrait
répondre dans les délais.
> Le délai de survenance des
avis
Le délai de survenance des avis de la CSO pourrait
être précisé dans un règlement général
portant organisation et fonctionnement de cette juridiction ou dans un
règlement spécial relatif au déroulement de la
procédure consultative.
En tout état de cause, pour la détermination dudit
délai, il pourrait être pris en compte la notion de «
délai raisonnable ».
Les avis ainsi rendus seraient-ils obligatoires ?
> Les caractères des avis
Les avis rendus par la CSO ne revêtiraient pas de
caractère obligatoire car cela pourrait dénier à l'OAPI et
notamment au CA, son pouvoir législatif et, ces avis se substitueraient
ainsi au droit et à la jurisprudence269.
Malgré le caractère non obligatoire de ces avis,
cette juridiction pourrait cependant, obligatoirement ou facultativement, les
faire suivre de recommandations270.
En sera-t-il de même de l'arbitrage et de la
médiation CSO ?
b - Les aspects touchant à la fonction d'arbitrage
et de médiation
Les dispositions pertinentes sur l'arbitrage et la
médiation proposés pourraient comprendre le montant des frais
à acquitter, le déroulement de la procédure et les effets
des sentences et accords de transaction271.
268 - On pourrait reconnaître ce même droit
de saisine aux Ministres en charge des questions des
variétés végétales dans les Etats membres (V. art.
15 de l'ABR).
269 - En comparaison et à titre d'exemple, meme
les avis de la Cour de justice de l'UEMOA n'ont pas aux termes de l'art. 43 du
Traité modifié instituant cette union, force
exécutoire.
270 - V. les compétences de la Chambre
administrative et financière.
271 - Josselin-Gall, « Arbitrages et
propriétés intellectuelles », Droit et patrimoines, juin
2003, p. 63.
> Le montant des frais d'arbitrage et de
médiation
Les frais d'arbitrage et de médiation CSO pourraient
être fixes dans le règlement relatif à l'organisation et au
fonctionnement de cette juridiction ou faire l'objet d'un règlement
spécial.
L'avance ou le paiement integral de ces frais conditionnerait
ainsi le deroulement à proprement parler de la procedure et, la
survenance des sentences et des accords de transaction recherches.
> Le déroulement de la procédure et
les effets des sentences arbitrales et accords de
transaction
Il faut distinguer la procedure d'arbitrage de la
procédure de médiation.
. Le déroulement de la procédure
d'arbitrage et les effets des sentences
Introduite en vertu d'une clause compromissoire ou d'un
compromis, la procédure d'arbitrage debuterait par la designation des
arbitres agrees auprès de la CSO272. Ces arbitres se
chargeraient d'observer le suivi dudit arbitrage, notamment ses
delais273.
Comme pour le CAM de l'OMPI, l'arbitrage CSO pourrait avoir lieu
au siège de cette juridiction ou hors de celui-ci, dans un Etat membre
ou même non membre de l'OAPI.
Le suivi de la procedure et le rendu des sentences pourraient
relever de la competence desdits arbitres. Elles pourraient être
exequaturées par la CSO aux fins d'être rendues exécutoires
dans tous les Etats membres de l'Organisation.
La médiation pourrait elle etre relativement
différente de l'arbitrage.
. Le déroulement de la procédure de
médiation et les effets des accords de transaction
La mediation est une procedure volontaire qui repose sur la
cooperation des litigants, chacun d'eux pouvant se retirer à tout
moment. En d'autres termes, les parties à une médiation louent
les services d'une personne physique qui facilite leurs negociations.
Lorsqu'elle aboutit, l'accord de transaction conclu par les
parties s'impose à celles-ci conformement au droit des obligations,
lequel est regi dans l'espace OAPI par les règles du Code civil ancien
ou Code Napoleon de 1804 encore applicable dans certains Etats membres de
l'OAPI ou par les Codes nationaux des obligations274.
A côte des elements propres aux fonctions non
contentieuses, des elements de procedure pourraient egalement être
envisages en ce qui concerne la fonction contentieuse de la CSO proposee.
272 - Un règlement spécial pourrait être
adopté en vue de la détermination des conditions
d'agrément des arbitres. Ces conditions pourraient titre entre autres
les connaissances en Droit de la propriété intellectuelle et la
maîtrise des langues de l'OAPI.
273 - Mtime si cet organe reste rattaché
administrativement à l'OAPI, il devrait demeurer un organe
indépendant et impartial.
274 - Sur le déroulement et les effets de la
médiation, lire centre d'arbitrage et de médiation de l'OMPI,
op.cit, p. 4. Des pays comme le Cameroun et le Gabon par exemple appliquent
toujours le Code Napoléon, alors qu'un pays comme le
Sénégal par exemple dispose de son propre Code des
obligations.
2 - Les aspects procéduraux relatifs à
la fonction contentieuse
Il faut distinguer ici les elements communs à toutes les
sections de la CSO (a) des elements propres à chaque section (b).
a- Les aspects communs aux deux sections
Les elements communs à toutes les sections de la CSO
proposee concerneraient la publicite des debats et l'extension du recours
contre les decisions juridictionnelles à intervenir.
> L'institution de lapublicité des
débats
L'article 14 du règlement portant organisation et
fonctionnement de l'actuelle CSR dispose que : « Les séances de la
commission ne sont pas publiques ».
Cette disposition s'explique par le fait que les droits de
propriete intellectuelle sont des droits privatifs. Dès lors, les
litiges qui en resultent ne concernent en principe que les
parties275.
L'esprit du texte est louable. La negation ou l'interdiction
pure et simple ou absolue de la publicite peut toutefois heurter dès
lors que de plus en plus aujourd'hui la question de la transparence de la
justice devient une exigence mondiale.
En outre, on peut se demander quel est l'intéret de
l'interdiction de la publicite des debats des affaires particulières de
propriete industrielle dès lors que les decisions de la CSR actuelle
sont publiees et donc, accessibles au public et que devant les juridictions
etatiques, le principe est celui de la liberte du public à assister
à ces audiences276.
En verite, la publicite des debats pourrait être
consacree en son principe, l'exception étant que la CSO apprecie
souverainement l'opportunité d'interdire ou pas la
publicité277. Mais pour autant, elle n'ordonnerait le
deroulement des debats en Chambre du conseil ou à huis clos que lorsque
ceux-ci seraient de nature à troubler l'ordre public ou porteraient
atteinte aux bonnes moeurs278.
En tout etat de cause, même si les debats venaient
à se derouler hors la presence du public, les decisions seraient elles
toujours prononcees publiquement, sauf dispositions contraires des
règlements de procedure à adopter.
Il faudrait en sus de ce qui precède, etendre le champ des
recours contre les decisions à rendre par la CSO.
275 - Cette interdiction de la publicité est
largement inspirée de la procédure de divorce, se tenant en
Chambre du conseil.
276 - Le droit OAPI se contente en effet de disposer
à ce propos que ces affaires sont jugées comme en matières
sommaires. Il n'ajoute pas que ces audiences sont non publiques.
277 - Emmanuel JEULAND, Droit processuel, LGDJ, Paris,
2007, pp.86 et 96.
278 - Sur ces notions d'ordre public et de bonnes
moeurs, lire les arts. 18 de l'ABR et 2 du règlement d'application de
l'ABR. Ce dernier article dispose que : «.L'ordre public dont il est
fait mention aux annexes s'entend des conceptions fondamentales de la vie
commune au sein d'une société.Les bonnes moeurs s'entendent des
habitudes et pratiques morales généralement admises par un groupe
ou une société ».
> L'extension des recours contre les
décisions à intervenir
L'extension dont il est fait question ici concernerait le
droit de saisine aux fins de rectification des erreurs matérielles
affectant les décisions à rendre par la CSO et l'admission du
« recours en interprétation et/ou en complément »
contre ces décisions.
L'article 18 2) nouveau de l'aménagement du
règlement portant organisation et fonctionnement de la CSR permet qu'en
cas d'erreur matérielle affectant une décision rendue par cet
organe, elle soit susceptible de rectification par ce même organe. Mais,
seul le DG de l'OAPI dispose du droit de saisir la CSR à cette
fin279.
Cette exclusivité du droit de saisine au seul DG de
l'OAPI peut objectivement paraître comme attentatoire aux droits des
parties. C'est la raison pour laquelle, dans la perspective de la mutation de
la CSR en CSO, le droit de saisine devrait être reconnu à «
toute personne ayant intérêt à la rectification ».
De même, si une décision rendue par la CSO est
source de difficultés de compréhension ou qu'elle a omis de
statuer sur des chefs de demandes, il pourrait être reconnu aux personnes
intéressées un droit d'en référer à cette
juridiction pour et aux fins de surmonter cette/ces
difficulté(s)280.
Il ne faut surtout pas croire qu'il s'agit d'une
réforme qui tendrait à retarder inutilement l'issue de la
procédure, c'est plutôt l'intéret des parties, la bonne
administration de la justice et l'efficacité des décisions
rendues qu'il y a lieu ici de garantir, d'assurer et/ou de
préserver281.
Qu'en est-il enfin des éléments procéduraux
propres à certaines sections de la CSO proposée ?
b - Les éléments propres à certaines
sections Il faut distinguer ici les sections de l'urgence des sections
du fond.
> Les éléments propres aux sections
de l'urgence
La procédure à suivre devant les sections de
l'urgence de la CSO pourrait passer par l'introduction du recours dans un
délai prédéterminé ou raisonnable suivant la
notification à personne de la décision faisant grief ou à
compter du jour où cette personne en prend connaissance.
La cause pourrait être débattue devant le
Président de la CSO, siégeant à Juge unique ou devant la
section compétente de cette juridiction, siégeant en
collégialité.
La collégialité dont il est question conduit
à examiner les éléments propres aux sections du fond de la
CSO.
279 - La CSR l'a rappelé dans sa
décision n° 061/CSR du 28 octobre 2005 en déclarant
irrecevable le recours en rectification d'une erreur, introduit par un
mandataire en propriété industrielle (en l'espèce Bertrand
CAZENAVE) au motif entre autres que «~l'action en rectification n'est
ouverte qu'au Directeur Général de l'OAPI~ ».
280 - Emmanuel JEULAND, op.cit, p. 419 et s. Dans tous les
cas, ces « recours » devraient être communiqués aux
parties intéressées pour observations, lesquelles en tout
état de cause ne lieraient pas les Juges de la CSO.
281 - Emmanuel JEULAND, op.cit, pp. 207 et 419.
> Les éléments propres aux sections
du fond
Les éléments procéduraux dont il est
question pourraient toucher à l'instruction des recours et au
délai de survenance des décisions de justice.
. L'instruction des recours
L'article 11 du règlement portant organisation et
fonctionnement de la CSR a conféré à l'instruction
préalable ou mise en état des recours devant cet organe, un
caractère facultatif. Or, l'instruction préalable des causes est
à l'heure actuelle l'un des principes fondamentaux de procédure
et des droits de la défense.
A défaut donc de rendre l'instruction des recours
obligatoire, elle pourrait à tout le moins être soumise à
l'approbation ou à la renonciation des parties.
Loin de retarder la survenance des décisions,
l'instruction préalable des causes devant la CSO pourrait plutôt
conduire au rendu, dans des délais acceptables, de meilleures
décisions.
. Les délais de survenance des
décisions de justice
Marquées du sceau de la célérité, les
affaires de propriété intellectuelle, même soumises aux
Juges nationaux, devraient être jugées comme en matières
sommaires282.
Au total, la réforme de la CSR et sa mutation en CSO est
ambitieuse.
Cette réforme a cependant un coût. S'il est
difficile d'évaluer celui-ci, il faut au moins indiquer les sources
et/ou mécanismes de son financement.
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