B - Les recours contre les décisions se
rapportant à la vie des titres de
propriété industrielle
En Droit de la propriété industrielle, la
protection ne vaut que pour une période donnée95.
Pour continuer de bénéficier de la protection, il
faut maintenir le titre de propriété industrielle en vigueur ou
solliciter la prolongation de sa durée.
Le maintien en vigueur ou la prolongation de la
validité d'un titre de propriété industrielle, de
même que les inscriptions dans les registres pertinents de l'OAPI sont
soumis à des demandes préalables adressées à
l'Organisation.
Si le DG de l'OAPI ne fait pas droit à ces demandes, tout
intéressé peut déférer cette décision
à la censure de la CSR.
Cet organe est ainsi compétent pour connaître des
recours formés contre les décisions de rejet des demandes de
restauration ou de prolongation de la durée de protection des titres de
propriété industrielle (1) et contre les décisions de
rejet des demandes d'inscription aux registres spéciaux de cette
Organisation (2).
93 - Jean PRADEL, Droit p&nal g&n&ral,
11e &d., &d. Cujas, Paris, 1991, p. 181 et s.
94 - Ce contentieux représente l'un des plus importants
connu par la CSR. V. à cet effet, l'Annexe
« 5 ».
95 - L'art. 11 1) de la Convention de Paris
indiquait d&jà le caractère temporaire de la protection des
brevets, des modèles d'utilité, des dessins ou modèles
industriels ainsi que des marques de fabrique ou de commerce.
1- Les recours contre les décisions de rejet
des demandes de restauration ou de prolongation de la durée
de protection des titres
La restauration des droits est régie de façon :
- générale, par les annexes de l'ABR96
;
- particulière, par le règlement relatif à
la restauration des droits, adopté à Cotonou le 4
décembre 200497.
Outre les textes qui précèdent, l'instruction
administrative n° 122 sur la « demande de restauration d'un titulaire
ou d'un déposant dans ses droits » traite également de cette
question de la restauration des droits.
Ces différents textes ne définissent pas la
notion de restauration. Sa définition peut résulter de l'analyse,
l'article 1er du règlement susvisé permettant en effet
de dire qu'il s'agit de la demande présentée en vue de
rétablir des droits de propriété industrielle
frappés de déchéance en raison de l'inobservation du
délai imparti pour l'accomplissement de formalités
administratives98.
L'article 2 du même règlement détermine
quant à lui les cas et situations dans lesquels la
déchéance des droits de propriété industrielle est
encourue et donc, la restauration susceptible d'être sollicitée et
obtenue.
Les demandes de restauration des titres ou droits qui doivent
être adressées par écrit au DG de l'OAPI99, sont
soumises à des délais variables100. Ces délais
non uniformes s'expliquent certainement par la nature et la valeur des titres
dont la restauration est sollicitée.
La demande de restauration présentée au DG de
l'OAPI peut cependant être rejetée par ce dernier. Dans ce cas,
cette décision administrative faisant grief doit être
obligatoirement motivée, notifiée au demandeur pour être
par lui s'il ya lieu querellée devant la CSR101. Il en est de
même des décisions de rejet des demandes d'inscription aux
registres spéciaux de l'Organisation.
96 - Arts. 41 de l'annexe I (Brevets d'invention),
36 de l'annexe II (Modèles d'utilité), 25 de l'annexe III (
Marques de produits ou de services), 13 de l'annexe IV (Dessins et
modèles industriels), 12 de l'annexe V (Noms commerciaux) et 35 de
l'annexe X (De la protection des obtentions végétales).
97 - Ce règlement abroge le règlement
sur la restauration des droits adopté à Fort-Lamy (Tchad) au
cours de la session du CA tenue du 20 au 25 juillet 1970.
98 - A cela, il faut relever que l'article 41 1) de
l'annexe X sur les obtentions végétales dispose que
l'Organisation déchoit le titulaire de son certificat d'obtention
végétale si par ailleurs, la variété n'est plus
homogène ou stable.
99 - Selon l'art. 7 du règlement relatif
à la restauration des droits, les demandes « ~de restauration
sont examinés par une commission consultative mise en place par le
directeur général~ », lequel rend en définitive
la décision (art. 7 dudit règlement).
100 - Brevets d'invention, marques de produits ou de services,
noms commerciaux et obtentions végétales : 6 mois à
compter de la date où les circonstances indépendantes de la
volonté des titulaires ou de leurs ayant droits, ont cessé
d'exister et au plus tard dans les deux (2) ans à partir de la date
où le renouvellement était dû ; modèles
d'utilité et dessins et modèles industriels, le premier
délai de six (6) mois est requis dans les memes conditions, mais le
délai maximal est ramené à un (1) an pour l'autre
hypothèse.
101 - Recours contre la décision n°
0068/OAPI/DG/DPG/SBT/SCAJ du 25 avril 2006 portant rejet de la demande de
restauration du brevet n° 12036 au nom de la Société
européenne d'exploitation de technologies industrielles (SEETI).
2 - Les recours contre les décisions de rejet
des demandes d'inscription aux registres spéciaux de
l'OAPI
Même si la notion de registre spécial n'a pas
été définie par les textes de l'OAPI, en s'appuyant entre
autres sur l'article 16 de l'ABR, on s'accorde à dire qu'il s'agit d'une
mémoire des titres de propriété
industrielle102.
L'ABR et ses règlements d'application sont donc
les textes de base de l'inscription sur les registres spéciaux de
l'OAPI.
L'article 6 du règlement d'application de l'ABR dispose
que : « 1) Lorsque la nulité ou la
déchéance absolue d'un titre de propriété
industriele a été prononcée par une
décision judiciaire ayant acquis l'autorité de la
chosejugée, la partie la plus diligente communique la décision
à l'organisation qui l'inscrit au registre spécial pertinent et
la publie~ ».
En dehors de l'ABR, d'autres textes traitent de la question des
inscriptions sur les registres spéciaux de l'OAPI. Les textes dont il
est question sont :
- certaines dispositions des annexes103 ;
- l'article 23 du règlement relatif à l'extension
des droits suite à une nouvelle adhésion à
l'OAPI ;
- certaines instructions administratives104.
Ces différents textes établissent deux (2) types
d'inscriptions aux registres spéciaux de l'Organisation :
- les inscriptions consécutives à une
décision de l'Organisation ;
- les inscriptions des décisions judicaires qui
comprennent d'une part, les inscriptions des
décisions définitives rendues par les
juridictions compétentes des Etats membres et prononçant la
nullité ou la déchéance des titres105 et,
l'inscription aux registres pertinents des décisions des tribunaux
civils des Etats membres accordant sur le fondement des articles 46 et suivants
et, 56 de l'annexe I sur les brevets d'invention, des licences non volontaires
et d'office, d'autre part.
La publication aux registres spéciaux de l'OAPI poursuit
trois (3) buts fondamentaux cumulatifs :
102 Définition conçue à partir
de l'origine du mot registre qui vient du verbe «
enregistrer » en informatique (en-registrer), V.
http://fr.wikipedia.org.
Consulté le 17 avril 2011.
103 - Ex : arts. 25, 46 et s et 56 de l'annexe I
(Brevets d'invention) et 29 de l'annexe II (Modèles
d'utilités).
104 - L'art. 23 de ce règlement dispose que :
« La décision d'extension est inscrite au registre
spécial correspondant ». Les instructions y relatives portent
les numéros 117 à 121 et 123.
105 - Le premier type : actes portant transmission
de propriété, concession de droits d'exploitation, cession de ce
droit, gage ou mainlevée de gage ; le second type est régi par
l'art. 18 du règlement d'application de l'ABR et par l'instruction
administrative n° 121.
- un but d'information aux fins entre autres
d'opposabilité aux tiers des inscriptions106. ;
- un but de mise à disposition à l'OAPI de
certaines informations relatives aux titres qu'elle
délivre ou qu'elle détient ;
- un but contentieux.
Il existe en effet un contentieux des décisions de
rejet des demandes d'inscriptions sur les registres spéciaux puisque
lorsqu'une demande est présentée en ce sens au DG de l'OAPI, il
peut toujours refuser d'y faire droit.
La décision de refus d'inscription dans un registre
spécial doit être écrite, motivée et notifiée
aux intéressés dans les soixante (60) jours de son rendu afin
qu'ils la défèrent, si elle leur fait grief, à la censure
de la CSR.
A ce jour, l'OAPI a été saisie d'une demande
d'inscription d'un arrêt rendu par la Cour commune de justice et
d'arbitrage (CCJA) de l'Organisation pour l'harmonisation du droit des affaires
en Afrique (OHADA). Cette décision ayant été rendue en
matière d'affaires ou commerciale, l'OAPI pourrait la rejeter car,
seules les décisions rendues en matière civile sont susceptibles
d'inscription107. Si cette décision de rejet venait à
faire grief à la partie qui requiert son inscription, la CSR pourrait
ainsi être saisie de son premier recours en la matière.
Au total et en ce qui concerne les titres de
propriété industrielle, la majorité des recours connus par
la CSR de l'an 2000 à la session du 25 au 29 avril 2011 a
été constituée de décisions rendues an
matière de marques. En effet, sur 156 recours soumis à la CSR,
132 y ont été relatifs, soit environ 132/156 X 100 = 84, 61 % de
l'ensemble du contentieux108.
L'explication de cette prédominance des recours
relatifs aux marques est certainement qu'il s'agit avec les noms commerciaux,
des objets de propriété industrielle les plus
protégés dans l'espace OAPI, son tissu économique
étant constitué essentiellement de
commerçants109. A ce propos d'ailleurs, on relève que
80% à 90% des portefeuilles gérés par les mandataires en
propriété industrielle agréés auprès de
l'Organisation sont constitués de marques de produits ou de
service110.
Ceci étant, les titres de propriété
industrielle ne constituent pas la seule source des recours connus par la CSR.
Les décisions de radiation des mandataires en propriété
industrielle rentrent également dans le champ de compétence de
cet organe.
106 - L'art. 16 de l'ABR dispose que : << Toute
personne peut consulter les registres spéciaux.. >> et que :
<<..Toute personne peut en..obtenir des extraits >>. Le
dernier but est quant à lui de permettre à toute personne qui a
un intér~t, d'élever des contestations ; Lire en outre et entre
autres : Bernard MARX (sous la direction de Serge CACALY), La
propriété industrielle - Sources et ressources d'information -,
ADBS Nathan, Paris, 2000, p. 24 et s.
107 - En droit OAPI, le Droit de la propriété
industrielle relève de la matière civile.
108 - Pour un détail sur les recours examinés
par la CSR, de 2000 à la session du 25 au 29 avril 2011, V. Annexes
<<4>> et <<5>> ; sur la revendication de la
propriété des marques, lire entre autres : Max Lambert NDEMA
ELONGUE, << Revendication de propriété de marque, une
nébuleuse >>, La Gazelle, Yaoundé, n° 0002, avril
2008, p. 9 et s.
109 - V. Annexe <<6>>.
110 - Memassi DOSSO, Cours de Droit des marques à
l'intention des étudiants de Master II en Droit de la
propriété intellectuelle, CFDE, Yaoundé, février
2011 ; Maurice BATANGA, Cours de Système de Madrid à l'intention
des étudiants de Master II en Droit de la propriété
intellectuelle, CFDE, Yaoundé, avril 2011.
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