propriété industrielle
Il faut distinguer ici :
- les recours dirigés par les déposants contre les
décisions de rejet de leurs demandes de titres
(1) ;
- les oppositions (et objections) des tiers à la
délivrance de certains titres de propriété industrielle
(2) ;
- et les recours contre les décisions rendues en
matière de revendications (3).
1 - Le recours des déposants contre les
décisions de rejet des demandes de titres du Directeur
Général de l'OAPI
A la différence des oeuvres littéraires et
artistiques qui bénéficient de la protection au titre du droit
d'auteur par le seul fait de leur création76, les
créations industrielles et les signes distinctifs ne
bénéficient de la protection au titre de la législation du
Droit de la propriété industrielle que si elles font l'objet de
délivrance d'un titre77.
L'ABR n'a pas dérogé à la règle de
la protection des objets de propriété industrielle par un office,
que cette protection soit sollicitée à titre originaire (a) ou
qu'elle soit la conséquence d'une demande d'extension des droits suite
à une nouvelle adhésion à l'OAPI (b).
a- Les recours contre les décisions de rejet des
demandes originaires de titres de
protection
Pour qu'une création ou un signe bénéficie
de la protection originaire au titre des brevets, des marques, des dessins et
modèles industriels, des modèles d'utilité, des noms
commerciaux, des
76 - Christophe CARON, Droit d'auteur et droits
voisins, Litec, Paris, 2006, p. 85, n° 112. Art. 4 de l'annexe VII de
l'ABR sur la propriété littéraire et artistique.
77 - Il faut cependant indiquer que l'art. 8 de la
CUP ne soumet pas la protection du nom commercial comme objet de
propriété industrielle à un enregistrement
préalable par un office de propriété industrielle.
indications geographiques, des schemas de configuration
(topographies) des circuits integres et des obtentions vegetales, il faut
deposer une demande de titre auprès de l'OAPI et obtenir le brevet ou le
certificat du DG, valant titre de protection dans tout l'espace
OAPI78.
Globalement, il faut deposer sa demande dans un Etat membre ou au
siège de l'OAPI79. La demande peut être simple ou
contenir une revendication de priorite.
Au reçu de la demande, l'Organisation procède
à un contrôle de forme qui va aboutir, si les conditions legales
requises sont remplies, à la delivrance du titre sollicite. A
défaut, le DG de l'OAPI peut après un renvoi aux fins de
regularisation non accomplie, rejeter la demande du deposant80.
Les décisions de rejet du DG de l'Organisation sont,
après notification aux interesses, susceptibles de recours devant la
CSR.
Qu'en est-il maintenant si une partie sollicite la protection
suite à une nouvelle adhesion de l'Etat de protection originaire de son
titre à l'OAPI ?
b -- Les recours contre les décisions de rejet des
demandes d'extension de la protection
suite à une nouvelle adhésion à
l'OAPI
Les Etats africains, parties à l'Accord de Bangui, acte du
02 mars 1977 sont membres d'office de l'OAPI.
A côte de ces membres d'office, tout Etat africain,
membre de l'OMPI, de la Convention de Paris, de la Convention de Berne et/ou de
la Convention universelle sur le droit d'auteur et du Traite de cooperation en
matière de brevets ou PCT peut devenir membre de l'OAPI81.
L'adhésion d'un nouvel Etat à l'ABR conduit
à aborder la question de la possibilite de l'extension des droits de
propriete industrielle anterieurs proteges.
Cette question est regie par l'article 45 2) de l'ABR et par le
règlement relatif à l'extension des droits suite à une
nouvelle adhesion à l'OAPI et son amenagement suscites.
Globalement, les titulaires de titres de propriete
industrielle en vigueur dans un Etat avant la production des effets de son
adhesion à l'ABR et qui veulent etendre la protection dans l'espace OAPI
doivent formuler une demande d'extension auprès de
l'Organisation82.
Toutes ces demandes sont examinées par le DG de l'OAPI. Il
peut faire droit à celles-ci ou les rejeter83.
Si le DG de l'OAPI rend une décision de rejet d'une
demande de protection consecutive à une nouvelle adhesion à
l'ABR, cette decision peut faire l'objet d'un recours devant la
CSR84.
78 - Art. 6 1) de l'ABR.
79 - Dans le premier cas, il s'agit du
dépôt indirect et dans le second cas, du dépôt
direct.
80 - Arts. 6 et s de l'ABR, dispositions
spécifiques des annexes sur les demandes de titres et les instructions
administratives numéros 102, 111, 112, 201, 202, 203, etc.
81 - Sur les Etats membres de l'OAPI, lire les arts.
21 et s de l'ABR.
82 - V. arts 2 et s. dudit règlement.
83 - Arts. 19 et s du meme règlement et 22
(nouveau) de l'aménagement de Cotonou.
84 - Art. 21 du règlement relatif à
l'extension des droits suite à une nouvelle adhésion à
l'ABR.
Le recours est examiné par cet organe dans les formes
indiquées infra.
Au terme de l'examen du recours, la CSR peut alors rendre deux
types de décisions : confirmative ou annulative de la décision de
rejet du DG de l'OAPI.
Outre les déposants, les tiers peuvent également
exercer des recours contre certaines décisions rendues par le DG de
l'Organisation.
2 - Les recours exercés par des
tiers
Ces recours sont d'une part, les oppositions - et les objections
- (a) et les revendications de la propriété des marques, d'autre
part (b).
a - Les oppositions (et les objections)
L'opposition est prévue par plusieurs textes :
- les articles 19 et 33 de l'ABR ;
- les dispositions spécifiques des annexes qui y traitent
;
- l'article 25 du règlement relatif à l'extension
des droits suite à une nouvelle adhésion à
l'OAPI ;
- les articles 24 (nouveau) de l'aménagement du
règlement qui précède.
A coté de l'opposition, l'annexe relative aux obtentions
végétales parle elle d' « objection » ou d' «
objections »85.
L'opposition et l'objection (ou les objections) peuvent se
définir comme des actes ou des procédures tendant à
conduire l'OAPI agissant par son DG à revenir sur sa décision
d'enregistrement d'un titre.
A la différence de certains autres systèmes tel
que celui de la Common Law, l'opposition ou l'objection devant l'OAPI est une
procédure non à priori86, mais plutôt à
postériori, définie par la CSR comme une procédure :
« . . .spéciale, engagée par voie d'action et non une
demande reconventionnelle greffée à une autre procédure...
»87.
En cas de dépôt d'une demande de titre de
propriété industrielle ou de demande d'extension des droits suite
à une nouvelle adhésion à l'OAPI, tout
intéressé peut former opposition88 ou objection
à sa délivrance.
Quel est le champ d'application de cette procédure
d'opposition ?
85 - Sur cette question des oppositions, lire entre autres :
Christian Dudieu DJOMGA, La procédure d'opposition à
l'enregistrement des marques dans l'espace OAPI, PUL, Douala, 2006.
86 - René DAVID et Camille JAUFRET-STINOSI,
Grands systèmes de droit contemporains, Précis Dalloz, Paris,
11e éd., 2002, p. 33 et s ; Deborah E. BOUCHOUX, La
propriété intellectuelle - Le droit des marques, le droit
d'auteur, le droit des brevets et des secrets commerciaux - (Traduit de
l'américain par Bruno BARON RENAULT), Nouveaux Horizons-ARS (Pour la
traduction française), Paris, 2007, p. 92 et s.
87 - Décision n° 00148/0API/CSR du 29 avril 2011.
88 - Arts. 24 et s. du règlement y relatif.
L'opposition porte d'abord sur les signes distinctifs : marques,
noms commerciaux, et indications géographiques.
L'opposition dont il s'agit porte ensuite sur les obtentions
végétales.
Il convient également de relever qu'à
défaut de réserve ou de précision particulière, la
lecture des articles 8, 9, 10, 13, 14, 18, 24 et 25 du règlement relatif
à l'extension des droits suite à une nouvelle adhésion
étend l'opposition aux brevets d'invention, aux modèles
d'utilité, aux dessins et modèles industriels et aux appellations
d'origine (indications géographiques ?)89.
Saisi donc d'une opposition ou d'une objection, le DG de
l'OAPI peut l'accueillir ou la rejeter. Mais, quelle que soit la
décision rendue par cette autorité, elle peut faire l'objet de
recours de la partie contre laquelle elle est rendue et ce, dans le
délai légal pertinent suivant la notification de cette
décision qui fait grief90.
Si l'opposant ou « l'objecteur » succombe en son
recours devant la CSR, la décision querellée continue de produire
son plein effet.
Si par contre le recourant triomphe, l'enregistrement est
radié par le DG de l'OAPI91.
Les recours contre les décisions rendues en matière
de revendication de la propriété des marques rentrent
également dans le champ de compétence de la CSR.
b - Les recours contre les décisions rendues en
matière de revendication de la propriété des
marques
La revendication de la propriété des marques de
produits ou de services est prévue par l'article 5 3) de l'Annexe III
qui dispose que : « Si une marque a été
déposée par une personne qui, au moment du dépôt,
avait connaissance ou aurait dü avoir connaissance du fait qu'une autre
personne avait la priorité de l'usage de cette marque, cette
dernière personne peut revendiquer auprès de l'OAPI, la
propriété de la marque, pourvu qu'ele effectue
le dépôt de ladite marque dans les six mois qui suivent la
publication de l'enregistrement du premier dépôt ».
La disposition qui précède n'a pas
indiqué que la décision du DG de l'OAPI, accueillant ou rejetant
la revendication pouvait faire l'objet d'un recours devant la CSR92.
C'est plutôt l'instruction administrative n° 404.5 qui l'a
prévu.
L'instruction administrative dont il s'agit n'a pas cependant
déterminé le délai dans lequel ce recours pouvait
être exercé. La pratique y a supplée : le délai,
indiqué sur la notification de la décision statuant sur la
revendication, est en définitive de six (6) mois à compter de la
date de cette notification à personne.
89 - A ces sources majeures du droit de l'opposition,
il faut ajouter les instructions administratives numéros 412 et 604.
90 - Selon l'art. 24 du règlement relatif à
l'extension des droits suite à une nouvelle adhésion, il est de
six (6) mois à compter de la publication de la décision du DG de
l'OAPI. Dans les autres cas, il est de trois (3) mois.
91 - Ex : art. 18 de l'annexe III sur les marques de
produits ou de services.
92 - Ex. de décision de rejet d'un recours :
décision du DG de l'OAPI n° 00206/OAPI/DG/DGA/DAJ/SAJ du 22 juin
2010 portant rejet de la revendication de propriété de la marque
« SADAGHA + Vignette » n° 58164.
On peut faire grief à l'ABR, à l'annexe III et
aux instructions administratives, d'avoir abandonné la question de la
détermination du délai de recours à l'acte de notification
de la décision statuant sur la revendication de la
propriété de la marque au point de laisser conclure que ce
délai est illégal.
Le grief qui précède peut cependant être
relativisé car, il ne s'agit pas d'une illégalité d'une
extrême gravité puisque c'est davantage en matière
pénale que la loi est pour le Juge, d'application
stricte93.
Le contentieux des décisions du DG de l'OAPI
étant plutôt administratif, on pouvait au risque de créer
un vide juridique gravissime, procéder comme il est actuellement fait.
Mais dans le cadre de la révision de l'ABR, il faut penser à
corriger de tels écueils qui peuvent toujours, à raison,
être invoqués par des plaideurs.
En tout état de cause, saisie des recours contre les
décisions de revendication de la propriété des
marques94, la CSR statue comme en matière d'opposition
à l'enregistrement des titres de propriété
industrielle.
Qu'en est-il alors des recours contre les décisions du DG
de l'OAPI relatives aux titres déjà en vigueur ?
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