6.2.3. Le « client »
Selon les données empiriques, est
« client » toute personne qui vient verser l'argent
à la police, les autres sont des visiteurs, parfois ils sont
« gênants » puisqu'ils viennent solliciter de l'aide
ou des interventions au regard d'un dossier. Au lieu de verser à la
police, par contre c'est la police qui fait le geste d'humanisme pour les
aider.
Le requérant de la justice est client puisqu'il va
verser les frais de plainte et il est bien accueilli avec respect parfois la
chaise lui est laissée et l'OPJ se met debout puisqu'il sait qu'il va
« treizer ».
Aussi, tout celui qui vient répondre à une
convocation est aussi un « client » puisqu'il doit payer
les « frais de convocation ». Tout impliqué est
aussi « client ».
Le « clientélisme » se manifeste
aussi au niveau de « Tshambuluka » et le
« tshitshani » (faisons comme d'habitude)
« Twishane » (qu'on en termine ici). Les policiers
et les « marchands pirates » se solidarisent puisque vivant
tous au « taux du jour », ils partagent les mêmes
conditions de vie qui se maintiennent dans le nom prescrit et deviennent par
« habitus », des clients. Le policier devient le protecteur
du marchand pirate. Il s'érige même en avocat lorsque son client
est pris dans le « mukwao » (le filet ou le piège)
ici l'arrestation.
6.2.4. « Le muviolo »
Le « muviolo » est une déformation
du viol. Selon les acteurs, le muviolo est synonyme de la perte de
virginité. Même si la fille l'avait déjà perdue, du
fait d'être surpris avec elle en tant que fille moins âgée,
il faut réparer la virginité en versant presque la valeur de la
dot. Parfois, tout dépend des enjeux des acteurs, l'auteur verse aux
parents de la victime une pièce de wax, deux chèvres et une somme
d'argent à convenir. Le « muviolo » est
négociable, il induit l'arrangement. C'est dans ce contexte qu'il peut
trouer régulation à la police.
La logique de réparation de la virginité est
liée à l'inquiétude de la famille de la victime concernant
son mariage qui devient incertain. D'où autant en profiter à
l'auteur présent qui a provoqué l'handicape ou l'obstacle.
Le « muviolo » traduit l'idée
d'abîmer la fille, de faire perdre la virginité avant le mariage.
« anesha ku mwarabisha mutoto, nani tena atamuowa ? Pakaye
djo atalipa mali ile bwanayaka alitafutaka kumwoa nayo » (Il a
déjà abimé l'enfant, qui pourra encore la prendre en
mariage, c'est à lui de payer la dot que devrait verser l'homme qui la
prendrait à mariage). Parfois par négociation, l'auteur profite
de l'occasion pour réparer le fait en l'épousant. Sinon,
l'arrangement se fait par payement des frais en compenstion de la dot. C'est
dans ce contexte que le « muviolo » est une
problématique au mariage. « Mushifanye makelele, ni mambo
ya haya, itamufungiya mutoto ma njia, abatamwoa. Mumushungiye asiri, dju ya
kumupa bahati » (Il ne faut pas faire du tapage, c'est une
affaire honteuse qui peut obnubiler sa voie du mariage de votre fille, soyez
discret pour lui donner sa chance de mariage).
Le « muviolo » perçu comme
problématique au mariage de la concernée, Raoul KIENGE KIENGE a
écrit à ce propos :
« Le viol provoque en effet un certain
émoi sur le terrain d'enquête. Il est de nature à
compromettre le mariage de la fille, et par voie de conséquence, entame
aussi bien le droit de la famille de la fille à la dot que la
réputation de la famille, car personne ne voudrait épouser une
fille qui a été victime du viol » (2005 :
137)
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