3- De la médecine naturelle moderne africaine
à Douala
Le paysage médical que l'on observe dans la ville de
Douala est diversifié. Cette diversification se trouve même au
sein des principales formes de médecine que l'on rencontre dans cette
ville. L'on a à cet effet, la médecine traditionnelle et la
médecine conventionnelle prophétique. Cette dernière est
pratiquée par les pasteurs de certaines confessions religieuses (PIAULT
C. op. cit.). C'est également d'eux dont parle le prêtre DE ROSNY
E. (op. cit.).
La médecine naturelle est pratiquée par plus
d'une structure médicale privée ayant à leurs têtes
des collèges de phytothérapeutes qui, pour la plupart, ont fait
leurs études qui au Mali, qui au Bénin, qui au
Sénégal, pour obtenir les diplômes leur habilitant à
soigner les malades à partir des médicaments faits à base
de plantes. La liste des phytothérapeutes exerçant dans la ville
de Douala est loin d'être limitative.
Les cliniques de médecine naturelle que nous avons
visitées pendant nos enquêtes, sont celles des tradinaturopathes
que nous avons cités ci-dessus. Elles disposent toutes d'un personnel
médical (des sortes d'infirmières : deux ou trois tout au
plus), un médecin naturopathe (un ou deux tout au plus). Ces
médecins ont tous la particularité de faire partie des
groupements d'initiatives communes en abrégé GIC axé sur
la valorisation de la recherche en phytothérapie. (Recherche sur les
plantes médicinale et pharmacopée camerounaise). C'est
grâce à ces GIC de santé qu'elles (les cliniques
naturelles) sont fournies en médicaments et peuvent par
conséquent satisfaire les patients qui sont les leurs, les GIC les plus
célèbres dont on entend parler sont, parmi tant d'autres,
NATURALIA, WAZA, REPAMP, PROPLAMETRAC, etc.
Le GIC de santé PROPLAMETRAC est celui-là qui
nous a servi d'objet d'étude. C'est ce GIC de santé, fille de
l'Association pour la Promotion des Plantes Médicinales et la
médecine traditionnelle en Afrique qui soutient l'African Clinic. Son
ambition est de promouvoir les recherches dans les plantes médicinales,
le traitement des maladies au travers des connaissances thérapeutiques
traditionnelles et la guérison rapide à l'aide des plantes sans
effets secondaires. Le Docteur LOUMPIT dit à ce sujet :
« Nous voulons faire ressusciter la médecine naturelle et
le patrimoine thérapeutique traditionnelle en modernisant tout ce
savoir. D'où nous accueillons tout ceux qui voudraient valoriser cette
médecine ancestrale ceci dans le but soigner nos populations et à
faible coût » (Entretien du 16-05-2007 dans les
locaux de l'AC).
L'exhumation de ce patrimoine thérapeutique culturel
pourrait, dès lors, palier le problème de la morbidité
dans la ville de Douala. Elle permet aussi de revisiter les normes culturelles
en matières de santé (FONTAINE M. op. cit.) cette initiative ne
concerne uniquement la réduction de la morbidité à Douala
mais également sur toute l'étendue du territoire camerounais voir
dans toute l'Afrique. Pour se faire, ces promoteurs de cette médecine
pense qu'il faut leur associer des spécialistes des sciences sociales
(LAPLANTINE F. 1992). Ceci afin de mieux pallier les problèmes de
morbidité en Afrique. Ce désir est perceptible dans le propos de
Monsieur EBOUELE Jacques, détenteur d'un cabinet de médecine
naturelle. Il dit à cet effet :
Les recherches dans la médecine
naturelle doivent être entreprises sur la base des besoins des
populations en matières de santé. Ces besoins qui peuvent
être la cause de plusieurs maladies. Si l'on pouvait associer nos
recherches aux connaissances produites par les spécialistes des sciences
humaines, on soignerait mieux nos patients et on saurait qu'est-ce qui, dans la
société, peut causer leurs malaises et leurs désordres
organiques, psychique. Je pense que notre grande faiblesse se situe à ce
niveau. Nous ne maîtrisons pas la société dans laquelle
nous vivons et c'est logique de fonctionnement. Pourtant, on devrait parce que
nous avons besoins de comprendre nos malades. (Entretien du
08-05-2007).
Le terme de compréhension revient dans le propos de
Monsieur EBOUELE Jacques parce qu'il semble savoir que société
et maladies sont très liées. En clair, la maladie dont souffre
l'individu peut être la résultante d'une déficience sur les
plans social, économique, familial, professionnel, métaphysique
et culturel. C'est pourquoi il juge nécessaire la collaboration avec les
sciences humaines. La maladie, à son sens, a une cause sociale. L'un
des devoirs du praticien est donc de la déceler. (BASTIDE R. 1976).
D'où il rejoint BASTIDE qui affirme :
Il en résulte que la thérapie
doit s'attaquer en premier lieu au milieu social qu'il faut transformer, et aux
conditions de vie, qu'il faut améliorer. Si nous laissons de coté
les psychoses pour lesquelles les perturbations sociales ne jouent qu'un
rôle secondaire, les névroses devraient en tout cas
disparaître avec le passage de la société capitaliste
à la société communiste, puisque cette dernière
fait disparaître les contradictions de la première.
(op. cit. p28-29).
Etant donné que la ville de Douala est
foncièrement économique voire économisiste, les
naturopathes que nous avons interviewés pensent donc que les exigences
liées à la vie dans une pareil ville pourraient entraîner
des désordres physiologique et psychique graves. Par conséquent,
il semble indispensable de cerner les conditions de vie à Douala et d'en
tenir compte dans l'élaboration et la composition des produits
médicamenteux. La médecine naturelle nous apparaît
dès lors comme une médecine complète (MBONJI E. op.
cit.). Ce que nous nous proposons d'étayer dans un chapitre
ultérieur. Nous disons qu'elle est complète par ce qu'au regard
de os enquête, elle se préoccupe du passé, du
présent et du futur du malade.
En somme, la médecine naturelle telle qu'elle est
pratiquée dans la ville de Douala par ses promoteurs et ses
spécialistes contribue pour une large part dans la réduction du
taux de morbidité de la province du Littoral. (DE ROSNY E. op cit).
Conclusion
Ce chapitre portait sur la médecine tradinaturelle
africaine à douala en général, et à l'AC en
particulier. Il ressort que, la médecine naturelle est
diversifiée et qu'elle offre bien des services thérapeutiques
à la population de cette ville. Elle inclue la tradipratique
(ethnomédecine), les guérisseurs et médecine faite
à base plante qu'on appelle phytothérapie. L'on doit aussi
retenir que bien des promoteurs regroupés en GIC s'évertue
à redorer son blason lequel a, pendant longtemps, fait l'objet de
l'informel voire de l'illégal. De plus la médecine naturelle est
également éclatée. Ainsi nous avons les vendeurs de
plantes médicinales en bordure de route ou dans les marchés de
cette ville, à Nkololoun par exemple. L'on a aussi la médecine
naturelle Chinoise qui la côtoie. Cette médecine ambitionne de
réduire la morbidité et de revaloriser le patrimoine
thérapeutique traditionnel fait à base de plantes (HATTIER op.
cit.). En plus, plusieurs camerounais en général et notamment
des citadins lui préfèrent à la médecines des
hôpitaux. C'est sans doute pour ces raisons que l'on remarque une
expansion d'associations oeuvrant pour sa promotion (FASSIN D. et JAFFRE Y.
op. cit.). Par ailleurs, dans la relation qui existe entre le patient et celui
qui le soigne, il est des dimensions non moins importantes, surtout lorsqu'on
vit dans la ville de Douala. C'est le social et l'économique, lesquels
feront l'objet d'analyse de la prochaine partie.
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
Tout au long de cette partie, nous avons mis en exergue la
médecine conventionnelle à travers l'hôpital Laquintinie de
Douala et la médecine naturelle par le biais de l'African Clinic.
L'Hôpital Laquintinie est une structure médicale de
référence dans cette ville et même dans toute la province
du Littoral. Cet hôpital est fortement sollicité et accueille
chaque jour près d'un millier de malade (cf. annuaire de l'HLD 2000).
Cet hôpital a fait sa mue avec la réhabilitation de ses
bâtiments et l'entretien de son enceinte. Seulement, les patients et le
personnel soignant ne sont pas toujours sur la même longueur d'ondes. Par
de là les beaux bâtiments qu'on aperçoit de
l'extérieur, se joue ce que le Professeur DIAKITE Tidiane appelle
« Le drame des hôpitaux publics
africains » (op. cit. p66). Il entend par là le
laxisme, l'irresponsabilité médicale, la négligence, le
rançonnement des patients, etc. Toutes ces tares se manifestent lors des
différentes interactions entre les malades et le personnel soignant
(JAFFRE Y. 2005). Pour ce qui est de la médecine naturelle, nous
l'avons présentée par le prisme de l'African Clinic. Cette
dernière accueille des malades et les soigne à l'aide des
produits fait à base de plantes. Dans la prochaine partie, il sera
alors question d'analyser la place, mieux l'importance du social et de
l'économique dans les relations entre les malades et leurs soignants.
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