§3. La Constitution révolutionnaire de
1967
La Constitution du 24 juin 1967 fut adoptée par
référendum. Elle se voulait très différente de la
précédente. D'une part, elle faisait du pays en Etat unitaire
où les provinces n'étaient plus que de simples entités
administratives et d'autre part elle instaurait un régime
Présidentiel.
51 BOMANDEKE (B),Op.Cit., p.25
52 TSHIBAMBE LUBOWA et Pascal MBO « De 1960
à ce jour : des rapports mouvementés entre l'Exécutif et
le Législatif » in l'interface n°spéciale
cinquantenaire, Kinshasa, juin 2010, p. 6
En effet, en son article 19, la Constitution dispose que les
principales institutions de la République sont le Président de la
République, l'Assemblée Nationale, le Gouvernement, la cour
Constitutionnelle et les cours et tribunaux. Le Président de la
République, en vertu de l'article 20, est le Chef de l'Exécutif
et Chef du Gouvernement.
L'article 31 de cette Constitution dispose que les Ministres
sont politiquement responsables de leurs actes devant le Présidents de
la République.
Il est à remarquer que l'Assemblée Nationale
n'exercera qu'un simple contrôle sur le Président de la
République et le Gouvernement. Il dispose, à cet effet, du
pouvoir législatif, du contrôle budgétaire et d'autres
moyens de contrôle prévus à l'article 32. Par contre, elle
n'a pas le pouvoir de destituer le Président de la République ou
le membre du Gouvernement.
Le Chef de l'Etat est élu au suffrage universel direct
et pour un mandat de 7 ans, alors que l'Assemblée Nationale n'est
élue que pour 5 ans. Les membres du Gouvernement entrent en fonction
sans que leur nomination doive recueillir l'approbation du Parlement, comme
c'était le cas sous l'empire de la loi Constitution du 1er
août 1964.
La Constitution de 1967 confirme le recul de l'institution
Parlementaire, d'une part, le domaine de la loi est strictement défini,
comme dans la Constitution française de 1958 ; toutes les
matières échappant à l'énumération de
l'article 46 sont de la compétence de l'Exécutif. D'autre part,
une campagne antiParlementaire débute au mois de mars à
l'occasion de l'arrestation des membres des assemblées accusés de
« menées subversives et de colportage de faux bruits » ; de
même qu'est mis en doute leur caractère représentatif
53.
53 HUYBRECHTS (A) At alii ,Op. Cit., p.156
Il tient à signaler que les rapports politiques entre
les institutions politiques de la République sont disproportionnels et
favorables à l'Exécutif. Le Chef de l'Etat qui devient ainsi un
« monarque » Constitutionnel.
Cette Constitution révolutionnaire a connu dix sept
modifications et révisions, souligne le Professeur Adolphe Lumanu. Ces
modifications ont eu pour effet de renforcer certaines institutions au
détriment d'autres, provoquant d'une part une concentration de pouvoir
entre les mains d'une institution (la Présidence) et d'autre part un
déséquilibre institutionnel. Il importe de noter aussi que ces
modifications ont visé à réaliser la fusion des organes du
Mouvement Populaire de la Révolution (M.P.R.), Parti créé
en 1967 et les organes traditionnels de l'Etat54.
Pour illustrer ses propos, le Professeur Lumanu cite quelques
exemples :
1. Dans le texte du 24 juin 1967, il était dit, que le
pouvoir émanait du peuple qui l'exerçait par ses
représentants ou par voie du référendum. Par la loi du 15
août 1974, cette disposition a été modifiée comme
suit : le pouvoir émane du peuple qui l'exerce par le Président
du Mouvement Populaire de la Révolution qui est de droit
Président de la République avec le concours des organes du
Mouvement Populaire de la Révolution. Ainsi le seul représentant
du peuple habilité à exercer le pouvoir, c'est le Chef du
Parti.
2. Dans le texte du 24 juin 1967, le Président de la
République représentait l'Etat. Il était Chef de
l'Exécutif et Chef du Gouvernement. Il n'avait que le pouvoir
exécutif et il exerçait de façon exceptionnelle le pouvoir
législatif. Par la loi du 15 août 1974, il détient la
plénitude de l'exercice
54 LUMANU (A), Op. Cit., p. 138
du pouvoir qu'il assure avec le concours des organes du Parti.
A ce titre, il préside le bureau politique, le congrès, le
Conseil Législatif, le bureau exécutif et même le conseil
judiciaire. C'est la confusion de tous les pouvoirs sur la tête d'une
seule personne. C'est le couronnement du processus de la
Présidentialisation des institutions sans aucun pouvoir.
3. Dans le texte du 24 juin 1967, les principales institutions
de la Républiques étaient le Président de la
République, l'Assemblée Nationale, le Gouvernement, la cour
Constitutionnelle et les cours et tribunaux. Par la loi du 23 décembre
1970, le Mouvement Populaire de la Révolution est devenu l'institution
suprême de la République se plaçant à la tête
de toutes les institutions. Le 15 août 1974, le M.P.R. est devenu
l'unique institution de la République.
Dans le texte original, la Constitution révolutionnaire
du 24 juin 1967 admettait la possibilité de créer deux partis
politiques. Par la loi du 23 septembre 1970, le M.P.R. est consacré
comme seul Parti politique du pays. Par la suite, il est même devenu
Parti- Etat, absorbant en son sein les organes étatiques.
Toujours dans sa forme originelle, ladite Constitution
révolutionnaire stipule que le Président de la République
et le Gouvernement ne sont pas responsables politiquement devant le Parlement.
L'approbation Parlementaire n'est plus, comme sous la Constitution de 1964 pour
que le Gouvernement entre en fonction. L'Etat est doté d'un
Exécutif dirigé par le Président de la République
nanti de très larges pouvoirs à la fois de l'Etat, Chef de
l'Exécutif et Chef du Gouvernement.
Telle est brièvement exposée la substance des
rapports entre le Législatif et l'Exécutif dans la Constitution
originelle de 1967 avant que les organes du Parti s'intègrent dans
l'ordonnancement des organes étatiques55.
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