§2. La Constitution du 1er août 1964 dite de
Luluabourg
A cette crise de 1960 à 1964, la Constitution de
Luluabourg sera un cadre de solution globale. Elle fut élaborée
par une commission Constitutionnelle instituée par le Président
Kasa-Vubu. Elle est la toute première Constitution congolaise d'origine
nationale approuvée par le peuple au premier référendum
Constitutionnel organisé du 25 juin au 10 juillet 1964.
48 BOMANDEKE (B),Op.Cit., p.19
49 BOMANDEKE (B),Op.Cit., p.19
Il convient de signaler que le régime institué
suscite une controverse dans la doctrine. Certains auteurs affirment qu'il
s'agit d'un régime Présidentiel, d'autre encore qu'il s'agit d'un
régime sui generis.
En effet, le Professeur Kayemba enseigne que le régime
politique de 1964 est sui generis, c'est-à-dire combinant les
mécanismes de collaboration, de séparation et de subordination
des pouvoirs. Les mécanismes de séparation des pouvoirs
instituent un régime Présidentiel en ce qu'il n'y a plus de
dissolution des chambres par le Chef de l'Etat et pas de responsabilité
politique des Ministres devant les Chambres (art. 53 et 90). Cependant, le Chef
de l'Etat n'est pas élu au suffrage universel.
Les dispositions de l'article 66 font penser à un
régime Parlementaire avec les mécanismes de collaborations des
pouvoirs. En réaction au régime d'assemblée auquel a
dérivé le Parlementarisme irrationnel de la loi fondamental, il
s'est établi un nouveau déséquilibre en faveur, cette
foi-ci de l'Exécutif. Une nette institutionnalisation des tendances
Présidentielles développées par le Président
Kasa-Vubu. En gros, le régime est Présidentiel principalement et
secondairement Parlementaire50.
La situation qu'avait connue la première session
ordinaire du Parlement de 1960 allait se répéter. Dans son
allocution de ce jour devant les chambres réunies en congrès
national, le Président Kasa-Vubu annonça la révocation du
Premier Ministre Tshombe et de son Gouvernement.
50 KAYEMBA NTAMBA, Institutions politiques du
Zaïre, cours polycopié, UNIKIN, Faculté de Droit, 1988,
p.134
Le Chef de l'Etat se fondait sur le fait que les chambres
ayant été constituées, Gouvernement de transition devait
à son tour présenter sa démission. Par contre, le Premier
Ministre Tshombe estimait, quant à lui, que le Président de la
République était lui aussi transitoire dès la promulgation
de la nouvelle Constitution. Par conséquent, il revenait plutôt au
Chef de l'Etat définitif de nommer le Gouvernement définitif. Les
institutions transitoires de l'Exécutif devaient prendre fin en
même temps.
Le 5 septembre, la chambres des députés adopta
une motion par laquelle elle affirmait que l'acte posé par le
Président de la République en mettant fin au mandat du
Gouvernement de transition et en nommant un second Gouvernement de transition
non seulement constituait un refus caractérisé de se plier au jeu
démocratique mais surtout était anti- constitutionnel.
Par sa lettre du samedi 13 novembre 1965, le Président
Kasa-Vubu transmit au Parlement les actes par lesquels il avait nommé
Evariste Kimba et les membres de son Gouvernement (Ordonnances n°397, 398
et 408). Il demanda la réunion pour le lendemain, c'est-à-dire le
dimanche 14, les chambres en congrès national en vue de l'approbation
des dits actes.
Réunis effectivement en congrès ce dimanche aux
heures de midi sous la présidence d'Yvon kimpiob, les chambres
rejetèrent, comme il fallait s'y attendre, les ordonnances
Présidentielles. En conséquence, le Gouvernement Kimba fut
réputé démissionnaire.
Le lendemain, après des consultations
unilatérales, le Président Kasa-Vubu chargea à nouveau
Evariste Kimba du groupe Parlementaire minoritaire de former une autre
équipe ministérielle.
A la suite de ce geste, la tension politique était
à son comble dans la capitale où circulait le bruit persistant
d'un imminent coup d'Etat d'inspiration belge, en faveur de Moïse Tshombe.
C'est dans cet environnement que le Haut- commandement de l'armée, avec
le lieutenant général Joseph Désiré Mobutu en
tête, s'empara du pouvoir dans la nuit du 24 au 25 novembre et instaura
un régime d'exception51. Il interdit les partis politiques
tout en s'engageant à respecter les institutions démocratiques,
notamment les deux chambres qui continueraient à fonctionner.
Le 25 novembre 1965, les chambres réunies en
congrès, approuvent par acclamation le coup d'Etat de Mobutu. Même
si les premières mesures enchantent la population, cela n'est pas le cas
pour les Parlementaires. Car bien qu'il ait annoncé le maintien des
institutions démocratiques, le Général Mobutu et son
Gouvernement ne tardent pas à manifester leur hostilité à
l'égard du Parlement. Il revoit à la baisse les indemnités
des députés et sénateurs, décide de partager le
pouvoir législatif avec le Parlement, avant de s'en approprier, le 7
mars 1966, tout en laissant exister comme une coquille vide jusqu'en 1967 quant
la nouvelle Constitution entre en vigueur52.
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