4.10. Discussion
4.10.1. Le conseiller au centre de CEF
A l'issue des entretiens avec les paysans, les animateurs et
les responsables de l'ADEAC, il ressort plusieurs propositions en ce qui
concerne le rôle et profil d'un animateur-conseiller. La mise en place de
la démarche conseil dépend fortement des caractéristiques
du conseiller. A Akonolinga, l'animateur est titulaire d'un CEPE, il doit avoir
une expérience en agriculture, des connaissances sur les techniques de
production des principales cultures de la zone, être responsable et
résident au village. Ce dernier est élu par les paysans. Legile
(2006) souligne que le niveau d'éducation du conseiller et son niveau de
connaissances en agronomie ne conditionnent toujours pas la maîtrise
d'une démarche CEF. Contrairement à cette affirmation, Havard
(2002) précisait que l'influence du niveau d'éducation du
conseiller et du degré de ses connaissances en agronomie sur la
maîtrise du CEF dépendait des thèmes traités
(minimum BEPC pour le PPC et le ST, et Bac pour l'analyse
économique).
Par contre, la mise en place de la démarche CEF
à Akonolinga n'a pas pu prendre en compte tous ces aspects puisque les
animateurs d'Akonolinga ont été formés sur les modules
nécessitant pour certains le niveau BEPC et les autres le niveau BAC
alors que tous n'ont que le CEPE. Ces animateurs ont quand même retenu
certaines choses. Il est donc judicieux de penser comme Légile.
Toutefois, la mise en place de la démarche CEF doit tenir compte de ces
aspects afin de connaître le profil des animateurs à qui on a
à faire et quels sont les points à aborder.
Au nord Cameroun un animateur encadre seul 5 à 6
groupes seul ; il en est de même à Akonolinga où chaque
animateur-paysan couvre 4 à 5 hameaux ayant en moyenne 30 paysans
chacun. Face à cette situation, la formation des animateurs relais dans
chaque hameau s'avère être une nécessité.
4.10.2. Le CEF et les autres approches de
vulgarisation
Les politiques agricoles visant à augmenter la
production agricole et alimentaire, ont toujours mis en accent sur la
diffusion des innovations techniques. L'approche « Formation et Visite
» initiée par la
Banque Mondiale a longtemps été utilisée
en Afrique comme une approche de vulgarisation de masse. Limitée par sa
démarche et ses principes caractérisés de « top down
» c'est-à-dire excluait les paysans dans le processus de
construction de l'innovation, plusieurs autres approches participatives (CEF,
Farm Field School) ont été mises sur pied par des projets et des
organismes (Tableau 19).
Tableau 19. Comparaison du Training & Visit System,
du CEF et le FFS
Caractéristiques
|
T&V
|
CEF
|
FFS
|
Formations sont essentielles
|
Agents
|
Technicien Spécialisé En cascade
|
Tous les agents
« horizontalement »
|
Agent spécialisé en lutte intégrée
|
Une fois/mois, 1 jour
|
Deux fois/an, 1 semaine
|
Deux fois/ an,
|
En salle
|
En salle et sur le terrain
|
En salle et sur le terrain
|
Paysans
|
De façon descendante des vulgarisateurs aux paysans,
puis de façon participative au niveau des groupes de contact
|
De façon participative
- Entre conseiller et groupe de Cdg,
- Entre paysans-animateurs et groupes de proximité
|
De façon participative - entre spécialiste et
paysans en séance de travail
|
Oral
|
Ecrit et oral
|
Écrit et oral
|
Thèmes retenus suite à une enquête
auprès des paysans
|
Thèmes décidés à partir d'une
réflexion commune entre agents et paysans
|
Choisi par les spécialistes en fonction du type d'attaque
dans la zone
|
Tous les 15 jours
|
Tous les 15 jours
|
Chaque mois
|
Groupe cible
|
- Paysans contacts choisis par l'agent
- Extension au sein des groupes de contact
|
- Paysans alphabétisés volontaires
- Extension à des groupes de proximité volontaires,
avec paysan-animateur
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- paysans volontaires
- entension au sein des paysans volontaires
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Démonstratio ns
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Champs écoles collectifs
|
Champs participants
|
Champs participants
|
Visites
|
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Essentielles
|
Intra-village
|
Aux champs écoles
|
Champs participants
|
Champs participants
|
Inter-village
|
Aucune
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Avant introduction de nouveaux thèmes
|
|
Thèmes
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- 1 à 2
- Essentiellement sur les cultures.
|
- Plusieurs, en fonction des groupes
- Gestion exploitation, cultures, élevage,
et aménagement de
l'espace
|
- lutte intégrée contre les pestes
- prévention des maladies
|
Logistique
|
Fourniture intrants
|
- Absente
- Supposée assurée spontanément par
opérateurs économiques et les banques...
|
- Limitée, mais essentielle
- Intermédiation.
- Appui à un approvisionnement
organisé localement, par groupes
de paysans.
Appui direct limité selon modalité à
fixer
|
- limité
- appui aux groupes organisés (GIC) en produits
phytosanitaires
|
Collecte production
|
Aucune
|
Intermédiation, et recherche de solution au niveau
local
|
Aucune
|
Source : Djomo (2007) et Lapbim et al., (2005)
L'approche Formation et Visite est une approche basée
sur la diffusion des thèmes techniques conçus pour les paysans.
Par contre le CEF est basé sur la co-construction des outils entre les
conseillers, les animateurs et les paysans. Les thèmes sont choisis
à la demande des paysans et en fonction des difficultés qu'ils
éprouvent. Contrairement à la Formation et Visite, le FFS et le
CEF sont coûteux pour une véritable mise en oeuvre.
Particulièrement, le CEF, nécessite un bon niveau
d'éducation pour être maîtrisé. C'est peut être
pour cette raison que certain paysan du Nord Cameroun considéraient que
le CEF est fait pour les paysans riches et scolarisés (Djamen et
al., 2004).
La démarche CEF mise en oeuvre à Akonolinga est
complémentaire des autres approches de vulgarisation mise en oeuvre par
d'autres projets.
|