4.9. Enjeux et perspectives du CEF à
Akonolinga
4.9.1. Les potentialités agricoles de la zone
d'étude
La zone d'étude regorge d'un potentiel agricole assez
important et suffisant pour entreprendre un investissement dans le secteur
agricole. Les sols sont encore bien fertiles pour la mise en valeur des
cultures de rente (cacao, café, banane plantain et palmier à
huile), vivrières (macabo, manioc et ignames),
céréalières (arachides, pistaches et maïs)
maraîchères (tomate et piment) et fruitières (avocatier,
manguier, oranger, safoutier et goyavier). Les exploitations de la zone compte
en moyenne 5 actifs agricoles pour des superficies moyenne de 4,5 ha soit 0,9
ha/ actifs ceci peut permettre une bonne gestion des périmètres
cultivés. Le travail en groupe constitue également une source
potentielle de main d'oeuvre pouvant permettre aux paysans de respecter le
calendrier agricole de la zone.
4.9.2. Les potentialités locales en matière
de gestion des exploitations
Comme le pense Misté (2008), sans conseil les paysans
prendront quand même des décisions. Il est donc important pour
cette étude de savoir comment les paysans s'en sortaient, quelles sont
les techniques et les approches qu'ils utilisaient pour gérer leur
exploitation. Pour répondre à ces questions, l'étude s'est
appuyée sur les méthodes utilisées par les paysans pour
estimer leurs besoins en intrants (semences et produits phytosanitaires), pour
suivre l'évolution de leurs parcelles et pour déterminer leur
profit.
En début de chaque campagne, chaque paysan sait
pertinemment qu'il doit faire un budget. Même s'il ne le
matérialise pas, il le fait dans l'abstrait. Afin de pouvoir financer
leurs activités agricoles, 52 % obtenaient un crédit intrants
à la caisse de la zone soit en moyenne une somme de 45000 FCFA. Cette
somme, selon eux, était suffisante pour la mise en place d'une parcelle.
La quantité de pesticides pour les cacaoculteurs était
déterminée à partir des fiches techniques qu'ils avaient
reçues depuis 1999-2000 de la SODECAO. Quarante cinq pourcent des
paysans respectaient le calendrier agricole.
Les paysans avaient une technique locale pour
déterminer les écartements entre les plants. Les
écartements étaient estimés en terme de pas (pas de
marche). Par exemple pour la culture de macabo, la distance est d'un pas entre
les plantes. Pour le plantain, chacun fait entre 5-7 pas entre les pieds en
fonction de la taille. Pour des personnes de petite taille (1,5 m environ) il
faut en faire 7, pour les personnes de taille moyenne (1,65 m environ), c'est
entre 5 et 6 pas et enfin 5 pas pour les personnes de grande taille (plus de
1,75 m). Selon eux, après de nombreuses années
d'expérimentation, ils estimaient, que pour mettre sur pied une
superficie de 1 ha de macabo, il fallait au plus 12 « bacots » de
semence, pour la même superficie de pistache ou d'arachide, il fallait 2
seaux de 5litres de semence (arachides décortiquées). Les
prévisions de campagne se faisaient à partir de ces estimations
qu'ils ont utilisées comme standard jusqu'à l'arrivée du
Conseil. Cependant, l'étude montre que environ 10% des paysans ayant
suivi le CEF utilisent encore cette méthode pour faire leurs
prévisions puisque selon eux, le CEF « embrouille avec les calculs
et ses fiches ».
L'étude montre que 52 % des paysans faisaient un bilan
en fin de campagne, c'est-à -dire une estimation des dépenses et
des recettes pour les cultures commercialisées. Cependant certains
paysans (66 %) faisaient leurs bilans en estimant juste les recettes sans
toutefois penser aux dépenses. Seuls 34 % faisaient le bilan dans son
sens strict mais les dépenses pour eux se limitaient aux coûts de
défrichage (25000 FCFA) et d'abattage (20000 FCFA) de la parcelle en
première année de création.
Près de 77 % des paysans enquêtés
déterminaient à leur façon leur profit. Ainsi trois
méthodes locales étaient utilisées pour savoir si les
activités sont rentables. Afin de mieux cerner ce que les paysans
faisaient, les moyennes des performances des exploitations enregistrées
en 2007 (tableau 16) ont été appliquéest à leurs
méthodes afin de faire des comparaisons avec celles enseignées
dans le cadre du CEF :
1) Profit = recettes totales des cultures principales (cacao,
plantain, macabo) - montant de crédit pris à la caisse
P = (134 510 + 514 365 + 172 048) - 100 000 (montant maximum de
crédit autrefois octroyé) = 720 923 FCFA
Cette méthode était utilisée par 23 % des
paysans enquêtés pour l'estimation de leurs revenus.
2) Profit = Recettes totales des cultures principales -
coûts du défrichage et d'abattage P = (134 510 + 514 365 + 172
048) - 4 (25 000 + 20 000) = 640 923 FCFA
Remarque : les cultures principales occupaient
une superficie de quatre hectares.
24 % des paysans se basaient sur cette méthode pour
déterminer leur profit. Après la première année de
culture les paysans considéraient toujours le coût de
défrichage et d'abattage car selon eux, ceci leur permettait d'avoir les
fonds pour l'extension des parcelles ou la création des nouvelles.
3) Profit = Recettes de chaque culture - coût de production
(défrichage, abattage et autres frais liés à l'entretien).
P = 989 296 - 5(45 000 +25 000) = 639 296 FCFA
Remarque : les résultats montrent que la superficie
moyenne cultivée par exploitation est de 5 hectares. Les paysans ont
estimé à 25 000 FCFA la somme qu'ils pouvaient dépenser
par an pour la main d'oeuvre. Il faut noter également que les frais
liés à l'entretien inclut le temps, la main d'oeuvre familiale et
la main d'oeuvre rémunérée. Mais les paysans de notre zone
d'étude ne considéraient pas tous ces frais dans le calcul de
leur profit juste parce qu'ils n'avaient pas encore reçu de formation
sur la gestion des exploitations avant l'arrivé du CEF.
Cette méthode s'utilisait uniquement pour la culture du
plantain et du macabo. Vingt cinq pourcent des paysans la pratiquaient. Mais
certains considéraient plusieurs fois le coût de défrichage
et d'abattage c'est-à-dire que sur une parcelle en culture mixte de
macabo et d'arachide, le profit des arachides se calcule en soustrayant des
recettes le coût de l'abattage et du défrichage, il en est de
même pour le macabo alors que les deux cultures sont sur une même
parcelle défrichée et abattue une seule fois. Selon eux cette
méthode leur permettait de savoir à peu près ce qu'ils
gagneraient en culture pure.
Certains paysans (28 %) estimaient sans calcul leur profit
surtout de macabo, pistache et arachides. Selon eux, s'ils mettent en terre 10
sacs de semence de macabo et en récoltent 20, ils ont eu un profit de 10
sacs.
Ces méthodes, montrent que les paysans effectuent des
calculs économiques partiels, incomplets, répondant à
certains de leurs besoins tout aussi partiels. Il est donc important
d'organiser avec les paysans des séances d'animation de groupe sur les
questions économiques en rapport avec leurs cultures, leurs
activités, et leur exploitation. C'est-à-dire qu'est-ce que l'on
peut calculer pour une parcelle, une culture, une activité, une
exploitation pour en faire quoi ? Les paysans qui utilisaient la
première formule, ont affirmé que le montant de crédit
qu'ils prenaient était utilisé pour la mise en place des
parcelles cultivées. En plus le revenu disponible d'une exploitation
prend en compte toutes les activités du ménage raison pour la
quelle Wambo (2000) et Daouda (2002) ont précisé que, une
exploitation agricole est considérée comme un système
où la négligence d'une activité fausserait les
résultats de cette exploitation. L'approche globale de l'exploitation
avait été utilisée dans le cadre du CEF pour aider les
paysans à déterminer leur revenu disponible puisqu'il a pris en
compte toutes les activités génératrices de revenu des
exploitations (tableau 18).
NB : Avec la méthode proposée
par le CEF, les paysans perçoivent mieux leurs revenus disponibles. Le
revenu maximal enregistré avec l'une des méthodes des paysans est
de 720923 FCFA contre 910709 FCFA soit un écart de 189786 FCFA. Mais
alors cet écart serait d'autant meilleur si la méthode
enseignée par les animateurs tenait compte des revenus issus des sous
produits ou des produits dérivés de leurs exploitations. Puisque
pendant les enquêtes, nous avons remarqué par exemple que les
paysans ne tiennent pas compte du revenu issu de la vente des semences du
macabo et rejetons de banane plantain. (1000 FCFA/sac de macabo et 50
FCFA/rejeton de banane plantain). En plus dans les zones de Mingeumeu, Ondeck,
Mvan et Ndibidjeng, les paysans vendent parfois les noix de palmes et les
palmistes mais ne considèrent pas ces revenus dans le calcul de leur
profit alors que ceux-ci ne sont pas négligeables (500-1000 FCFA le
régime noix de palme et 1000 FCFA/ corbeille de palmiste
séché).
Après avoir déterminé ou estimé
leur profit, 45 % des paysans élaboraient un budget pour les cultures
principales (macabo, banane plantain, cacao, manioc). Lorsque le montant
prévu ne correspondait pas à ce qu'ils possédaient, 36 %
d'entre eux prenait un crédit (caisse, tontine ou particulier), 12 %
donnaient la priorité aux dépenses obligatoires et 31 % se
débrouillaient avec le montant qu'ils possédaient en
réduisant parfois les montants affectés aux dépenses non
obligatoires.
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