B. Les régimes dérogatoires
Cette procédure peut être simplifiée
lorsqu'il s'agit de fusions internes (1). De plus, les opérations de
placement collectif en valeurs mobilières sont exclues du champ
d'application de la directive 2005/56/CE. Ces opérations ont fait
l'objet d'une réglementation dans une nouvelle directive (2).
135 M. Cozian / A. Vivandier / F. Deboissy, Droit des
sociétés, Litec, 2009, §1388.
136 A. Weng, Zulssigkeit und Durchf·hrung
grenz·berschreitender Verschmelzungen, Duncker & Humblot, 2008,
S274.
137 A.S. Cornette de Saint-Cyr / O. Rault, Aspects juridiques
et sociaux des opérations de fusions au sein de l'Union
européenne, JCP E 2008, 1477.
138 M. Cozian / A. Vivandier / F. Deboissy, Droit des
sociétés, Litec, 2009, §1388.
139 A.S. Cornette de Saint-Cyr / O. Rault, Aspects juridiques
et sociaux des opérations de fusions au sein de l'Union
européenne, JCP E 2008, 1477.
140 M. Cozian / A. Vivandier / F. Deboissy, Droit des
sociétés, Litec, 2009, §1388.
1. Procédure simplifiée : les fusions au sein
d'un groupe de sociétés
Lorsque qu'une société absorbante qui
détient la totalité du capital d'une autre société
veut fusionner avec elle, c'est à dire que la société mere
veut absorber sa filiale qu'elle détient à 100%, en lui TMtant sa
personnalité juridique, elle réalise une fusion simplifiée
au sens de l'article 2 c de la directive 2005/56/CE.
La procédure d'une fusion simplifiée est
allégée par rapport à la procédure
étudiée précédemment et fait l'objet d'une
réglementation particuliére dans la directive 2005/56/CE,
à l'article 15. Une telle simplification de la procédure se
justifie par l'absence d'actionnaires minoritaires.141
Depuis la transposition de cette directive en France à
l'article L236-11 du Code de commerce, une telle fusion ne requiert ni la
réunion d'une assemblée de la société
absorbée pour approbation de la fusion, ni l'i ntervention d'un
commissaire à la fusion, ni un rapport de l'organe de
direction.142 La décision de fusion reléve alors de la
seule assemblée générale de
143
l'absorbante, sans qu'il lui soit nécessaire de
désigner un commissaire aux apports et ainsi de statuer sur
l'évolution des apports en nature, suite à la suppression de la
derniére phrase de l'article L236-11 du code de commerce.144
Cependant il existe une exception oil la présence d'un commissaire aux
apports est obligatoire, lorsque la société appelée
à dispara»tre a émis des valeurs mobiliéres donnant
accés au capital (article L228-101 du Code de
commerce).145
En Allemagne, cette procédure simplifiée a
été transposée aux articles 122 c al 3 et 122 g al 2 de la
loi sur les transformations. De même que nous l'avons vu en droit
francais, ni un examen de la fusion par un commissaire, ni un rapport, ni la
réunion d'une assemblée de la société
absorbée ne sont requis. D'autre part, selon l'article 122 c al 3, il
n'est pas procédé à l'échange des parts ou
actions.146 Ce qui a pour conséquence que le capital social
de la société issue de la fusion n'a pas à être
augmenté (articles 54 et 68 de la loi sur les transformations). On peut
noter que cette solution est également retenue en France à
l'article L236-3 al 2 du Code de commerce consacrant la pratique de
fusion-renonciation, par laquelle l'absorbante renoncait à
émettre les actions lui revenant. Une telle solution résulte du
fait que la société
141 M. Cauzian / A. Vivandier / F. Deboissy, Droit
des sociétés, Litec, 2009, §1378.
142 M. Cozian / P-J. Gaudel, La
comptabilité racontée aux juristes, 2006, § 759.
143 M. Cauzian / A. Vivandier / F. Deboissy, Droit
des sociétés, Litec, 2009, §1378.
144
H. Le Nabasque, Les fusions transfrontalieres apres la loi
n° 2008-649 du 3 juillet 2008, Revue des sociétés 2008
p. 493.
145 A. Guengant, Aménagements du
régime juridique des opérations nationales de fusions et
scissions Loi n°2008-649 du 3 juillet 2008, JCP E 2008,
n°1977.
146
A. Weng, Zulssigkeit und Durf·hrung
grenz·berschreitender Verschmelzungen, Duncker & Humblot, 2008, S
346.
issue de la fusion devient actionnaire ou associée
d'elle-même au titre de sa qualité
d'associée
147
dans l'absorbée.
Toutefois, le droit allemand diverge quelque peu du droit
francais. Tout d'abord, selon l'article 122 c al 3 de la loi de transformation
allemande, les éléments du projet de fusion figurant à
l'article 122 c al 2 Nr 2, 3 et 5 de la loi de transformation sont inutiles. De
plus, il présente une particularité en ce que l'article 62 de la
loi allemande de transformation est
148
applicable aux opérations de fusions
transfrontalières. Selon cet article, l'accord des
actionnaires de la société absorbante pour la
fusion n'est pas requis, tant que ceux-ci ne l'exigent. Ainsi, la fusion
transfrontalière peut avoir lieu, sans qu'aucune assemblée des
actionnaires ou associés, que ce soit dans la société
absorbée ou absorbante ne soit nécessaire, mais seulement lorsque
la société absorbante a son siège en Allemagne et la
société absorbée a son siège en France.
L'article 15 al 2 de la directive prévoit une
procédure simplifiée notamment lorsqu'il s'agit d'une fusion par
absorption réalisée par une société qui
détient au moins 90% mais pas la totalité des parts et des autres
titres. Dans ce cas, sont exigés un droit de vote des assemblées
générales des sociétés absorbées, les
rapports d'un expert indépendant et les documents nécessaires
pour le contrôle, seulement s'ils sont requis par la législation
nationale dont relèvent la société absorbante ou la ou les
sociétés absorbées. Le droit allemand ne prévoit
aucune de ces simplifications de procédure, de même que le droit
francais. Ainsi, la procédure ÇnormaleÈ applicable aux
fusions transfrontalières sera applicable lors d'une fusion
franco-allemande. Le seul allégement prévu est la
possibilité de l'absence d'accord des associés ou actionnaires de
la société absorbante, prévue à l'article 62 de la
loi sur les transformations,149 à la seule condition que la
société absorbante ait son siège en Allemagne.
En France, on peut se questionner sur l'intérêt
d'une fusion simplifiée, puisque la société absorbante
pourrait recourir à une autre technique, la dissolution par confusion de
patrimoine, plus simple et plus rapide et aboutissant, pour l'essentiel, au
même résultat. En effet, la décision de dissolution donne
lieu simplement à une déclaration de l'associé unique au
greffe du tribunal oü la société confondue est
immatriculée. L'article 1844-5 al3 du Code
147 M. Cauzian / A. Vivandier / F. Deboissy, Droit des
sociétés, Litec, 2009, §1391.
148 A. Weng, Zulssigkeit und Durf·hrung
grenz·berschreitender Verschmelzungen, Duncker & Humblot, 2008, S
346.
149A. Weng, Zulssigkeit und Durf·hrung
grenz·berschreitender Verschmelzungen, Duncker & Humblot, 2008, S
350.
civil prévoit que <<la dissolution entra»ne
la transmission universelle du patrimoine de la société à
l'associé unique, sans qu'il y ait lieu à liquidation
È.150 La fusion simplifiée semble alors seulement
avantageuse lorsque les actifs immobiliers sont importants, car le transfert
des droits immobiliers rend exigible la perception de la taxe de
publicité foncière au taux de 0,70%.151
Malgré cette impression, la nouvelle procédure
allégée établie par la directive 2005/56/CE constitue une
nouveauté par rapport à la procédure qui s'appliquait
alors en droit interne, en ce qu'il n'est plus nécessaire de recourir
à la nomination d'un commissaire aux apportx. Cette procédure
devrait être maintenant plus attractive que les opérations de
dissolution-confusion.152 D'autre part, la technique de
dissolution-confusion est une technique purement francaise. Certes, l'article 2
c de la directive 2005/56/CE définit la fusion simplifiée en des
termes tellement larges que cette définition serait susceptible de
recouvrir la technique de dissolution confusion. Mais étant une
particularité franco-francaise, on peut en déduire que le
législateur européen n'a pas entendu comprendre la dissolution
confusion comme une forme de fusion simplifiée, surtout qu'il ne s'agit
pas d'une fusion véritable au sens juridique et technique du
terme,153 bien que la loi française étende à
cette opération le régime de faveur dont
bénéficient les fusions.154 Une dissolution confusion
ne pourrait
donc avoir un effet
transfrontalier que si la société dissoute est
francaise. De plus,
elle ne serait soumise qu'au régime de l'article 1844-5
du code civil. Mais comme le droit allemand ne prévoit pas une telle
technique, on peut difficilement imaginer sa mise en Ïuvre entre une
société française et une société
allemande.
De facon à ce que les fusions entre
société mère et filiales relevant d'Etats membres
différents bénéficient d'une imposition aussi favorable
que si elles étaient situées dans un même Etat, une
directive 90/435 du 23 juillet 1990 prévoit la mise en place d'un
régime fiscal commun comme il en existe un pour les fusions
transfrontalières classiques. Cette directive règle le
problème de la fiscalité des dividendes recus par la
société mère et ceux versés par la filiale.
<<L'Etat de la société mère a le choix entre deux
systèmes: soit il n'impose pas ces bénéfices, soit il les
impose en prévoyant l'imputation sur l'impôt correspondant de
la
150 M. Cozian / P-J. Gaudel, La comptabilité
racontée aux juristes, 2006, § 759.
151 M. Cozian / P-J. Gaudel, La comptabilité
racontée aux juristes, 2006, § 759.
152 A.S. Cornette de Saint-Cyr / O. Rault, Aspects juridiques
et sociaux des opérations de fusions au sein de l'Union
européenne, JCPE 2008, n1477.
153 H. Le Nabasque, Les fusions transfrontalières
après la loi n° 2008-649 du 3 juillet 2008, Revue des
sociétés 2008 p. 493.
154 M. Cauzian, A. Vivandier, F. Deboissy, Droit des
sociétés, Litec, 2009, §1378.
fraction de lÕimpTMt payé par la filiale sur ces
bénéfices, ainsi que éventuellement de la retenue à
la source quÕà titre dérogatoire lÕEtat de la
filiale aurait perçue sur le paiement des dividendes. LÕEtat de
la filiale doit normalement exempter cette distribution de toute retenue
à la source. »155
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