2. L'établissement de rapports
Suite à l'établissement du projet de fusion, des
rapports émanant de différents organes doivent être
établis. Ces rapports sont destinés soit aux associés des
sociétés participant à la fusion (a), soit aux
représentants des salariés (b)
a) Les rapports destines aux associés
D'apres l'article 8 de la directive 2005/56/CE, un ou plusieurs
experts indépendants sont désignés sur demande conjointe
effectuée par chacune des sociétés qui fusionnent
aupres
119 Klner Kommentar zum UmwG, Carl Heymanns
Verlag 2009, §122c UmwG.
120 M. Brocker, Die grenz·berschreitende
Verschmelzung von Kapitalgesellschaften, BB 2010, 971.
121 M. Menjucq, Droit international et
européen des sociétés, Domat droit privé,
Montchrestien, 2008, § 329.
d'une autorité judiciaire ou administrative de l'Etat
membre dont relève l'une des sociétés qui fusionnent ou la
société issue de la fusion. Il s'agit d'une obligation pour
toutes les sociétés, quelle que soit leur forme. Les
associés peuvent seulement renoncer à l'unanimité
à la
122
désignation d'un expert.
En France, l'expert est dénommé commissaire
à la fusion selon l'article L236-10 du Code de commerce. Ce commissaire
à la fusion est à distinguer des commissaires aux comptes qui
agissent pour le compte de chaque société concernée. Il
est désigné par le tribunal de commerce.123 En
Allemagne, aucune règle n'indique la procédure de
désignation de l'expert, mais l'article 319 du code de commerce allemand
établit une liste des personnes pouvant être nommées
expert.
En France, aucune règle n'indique si les experts
peuvent être désignés individuellement par chaque
société et si un
seul peut être désigné pour toutes les
sociétés participant à la fusion. En Allemagne, les deux
possibilités sont prévues. Lorsqu'un expert est
désigné pour la société allemande, la loi allemande
sera applicable; lorsqu'un seul expert est désigné pour toutes
les sociétés, on peut déduire de l'interprétation
de la directive que la loi allemande sera
124
applicable si les sociétés ont formulé
leur demande en Allemagne. Cette solution permet d'éviter tout conflit
de loi, à la condition que les différentes sociétés
tombent d'accord.
Ces experts indépendants ont pour mission
d'établir un rapport unique destiné à l'ensemble des
associés.125 L'article L236-10 al 1 du code de commerce
francais précise que ce rapport porte sur les modalités de la
fusion que le commissaire à la fusion vérifie notamment
Çque les valeurs relatives attribuées aux actions de
sociétés participant à l'opération sont pertinentes
et que le rapport d'échange est équitable È. Il veille
ainsi à ce que la parité d'échange ne lèse aucune
des parties en présence.126 On peut supposer que le terme
Ç les modalités de la fusion È, désigné par
le code de commerce, signifie qu'il s'agit d'un examen du projet de fusion, tel
qu'en est évoquée la possibilité à l'article 8 al 2
de la directive. En Allemagne, l'expert a pour mission d'examiner le projet de
fusion.127
122 A.S. Cornette de Saint-Cyr / O. Rault, Aspects juridiques
et sociaux des opérations de fusions au sein de l'Union
européenne, JCP E 2008, 1477.
123 M. Cozian / A. Vivandier / F. Deboissy, Droit des
sociétés, Litec, 2009, §1377.
124 Kölner Kommentar zum UmwG, Carl Heymanns Verlag
2009, §122f UmwG.
125 A.S. Cornette de Saint-Cyr / O. Rault, Aspects juridiques
et sociaux des opérations de fusions au sein de l'Union
européenne, JCP E 2008, 1477.
126 M. Cozian / A. Vivandier / F. Deboissy, Droit des
sociétés, Litec, 2009, §1377.
127 S. Kulenkamp, Die grenz·berschreitende Verschmelzung
von Kapitalgesellschaften in der EU, Nomos, 2009, S236.
Ce rapport doit ensuite être mis à la disposition
des associés ou actionnaires des sociétés
participantes.128
Parallèlement au rapport portant sur l'examen du projet
de fusion, les organes d'administration ou de direction doivent établir
un rapport à destination des associés sur les aspects juridiques,
économiques et sociaux de la fusion. Ce rapport a pour objectif
d'expliquer les différents aspects de la fusion, ainsi que les
conséquences de l'opération sur les associés, les
créanciers et les salariés.129 Ce rapport sera soumis
aux règles de l'article L236-27 du code de commerce pour la
société participante ayant son siège en France. Un autre
rapport sera rédigé et soumis aux règles de l'article 122
e de la loi allemande de transformation pour la société ayant son
siège en Allemagne. Aucune problème particulier ne se pose.
b) Le rapport destiné aux représentants des
salariés
Le rapport établi par les organes d'administration ou
de direction et à destination des associés sur les aspects
juridiques, économiques et sociaux de la fusion, est aussi à
transmettre aux représentants des salariés, et à
défaut aux salariés eux-mêmes. Ce rapport a pour objectif
de protéger les salariés. De ce fait, les associés des
sociétés participantes ne
130
peuvent pas r enoncer à l'établissement de ce
rapport.
Ce droit s'ajoute au droit national des salariés des
sociétés francaises d'être informés et
consultés sur le projet de fusion (article L2323-19 du Code du travail)
et de transmettre leur avis à l'assemblée. Le comité
d'entreprise ou, à défaut, les délégués du
personnel, consultés sur le projet de fusion peuvent exiger que leur
avis soit annexé au rapport des dirigeants sur la
131
fusion, si ce rapport a été transmis dans les
délais (article L236 -27 du Code de commerce). On peut toutefois
s'interroger sur l'influence que pourra exercer l'avis du comité
d'entreprise sur le vote des actionnaires.
Toutefois, il s'agit d'une grande avancée, non
prévue par le droit allemand qui, bien que prévoyant la
transmission du rapport au conseil d'entreprise allemand (Ç
Betriebsrat È),
128 H. Le Nabasque, Les fusions transfrontalières
après la loi n° 2008-649 du 3 juillet 2008, Revue des
sociétés 2008 p. 493.
129 S. Kulenkamp, Die grenzüberschreite nde
Verschmelzung von Kapitalgesellschaften in der EU, Nomos, 2009, S221.
130 T. Lutz, Hinweise für den Vertragsgestalter bei
einer grenzüberschreitenden Verschmelzung unter dem besonderen
Gesichtspunkt der Hinausverschmelzung, BWNotZ 2010, 23.
131 H. Le Nabasque, Les fusions transfrontalières
après la loi n° 2008-649 du 3 juillet 2008, Revue des
sociétés 2008 p. 493.
n'octroie aucune valeur à toute prise de position du
conseil d'entreprise, celle-ci ne pouvant pas avoir la moindre influence sur la
procédure.132
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