Section II : Des obligations conventionnelles «
souples »
A quoi doivent s'attendre les Etats parties à la
Convention sur la diversité biologique ? Quelles sont les obligations
qu'ils devront assumer en toute responsabilité ? Quelle est la
portée véritable de ces obligations ? Telles seront les
préoccupations qui feront l'objet de notre réflexion au titre de
cette section.
Paragraphe 1. Les obligations assignées aux
Etats parties
Il faut au préalable rappeler qu'aux termes de la CDB,
les Gouvernements s'engagent à conserver et à exploiter la
biodiversité de façon à en assurer la
pérennité. Nous étudierons donc dans une première
partie, les mesures concernant la conservation et l'utilisation durable de la
diversité biologique, puis dans une deuxième partie nous
aborderons celles traitant du partage juste et équitable des ressources
génétiques.
A. Les obligations des Etats en matière de conservation
et
d'utilisation durable de la biodiversité
L'article 6 de la Convention prévoit les mesures
générales en vue de la conservation et de l'utilisation
durable11. L'on peut retenir de cet article que chaque Etat
élabore « des stratégies, plans ou programmes nationaux
tendant à assurer la conservation et l'utilisation durable de la
diversité biologique ou adapte à cette fin ses
stratégies,
10 Cours n°5 la biodiversité
(complément 2011 - actualisation du cours) Jean-Marc Lavieille,
Maître de conférences à la faculté de droit et des
sciences économiques de Limoges
11 Voir Cours n°5 la biodiversité
(complément 2011 - actualisation du cours) Jean-Marc Lavieille,
Maître de conférences à la faculté de droit et des
sciences économiques de Limoges.
16
18
plans ou programmes existants qui tiendront compte, entre
autres, des mesures énoncées dans la présente Convention
qui la concernent » et s'assure de l'intégration des questions
relatives à « la conservation et l'utilisation durable de la
diversité biologique dans ses plans, programmes et politiques de
développement sectoriels ou intersectoriels pertinents ».
Ces mesures se manifestent concrètement par des
obligations d'identification et de surveillance scientifiques et
techniques12 des éléments constitutifs de la
diversité biologique importants pour sa conservation et son utilisation
durable, prévues à l'article 7 de la Convention et
assignées aux différents Etats parties à celle-ci, qui
s'engagent à les mettre en oeuvre dans leurs politiques
gouvernementales. Il s'agit précisément de mesures directes de
conservation in situ (article 8 de la Convention) notamment en
établissant un système de zones protégées ou de
zones où des mesures spéciales et en réglementant ou
procédant à la gestion des ressources biologiques
présentant une importance pour la conservation de la diversité
biologique à l'intérieur comme à l'extérieur des
zones protégées afin d'assurer leur conservation et leur
utilisation durable. Il est question aussi des mesures de conservation ex
situ (article 9 de la Convention) venant compléter les mesures de
conservation in situ, par la mise en place et l'entretien des installations de
conservation ex situ et de recherche pour les plantes, les animaux et
les microorganismes, de préférence dans le pays d'origine des
ressources génétiques. En ce qui concerne tout
particulièrement l'utilisation durable des éléments
constitutifs de la diversité biologique, il faut recourir à
l'article 10 de la Convention dont il ressort notamment que les Etats ont
l'obligation d'intégrer les considérations relatives à la
conservation et à l'utilisation durable des ressources biologiques dans
leurs différents processus décisionnels nationaux, ce qui
impliquera nécessairement l'adoption de mesures de précaution
telles les études d'impact environnementales13 sur les
éventuels projets de développement, la formation et
l'éducation des populations locales proches de des ressources
biologiques et témoins privilégiés et souvent responsables
ignorants de leur érosion.
12 En principe les moyens techniques de surveillance
doivent être donnés par les pays à haute technologie.
13 Prévu au titre de l'article 14 de la
Convention sur la Diversité Biologique, l'étude d'impact
environnemental est un mécanisme d'évaluation environnementale
qui est relatif au principe de précaution.
B. Les obligations concernant le partage juste et
équitable des ressources génétiques
Les obligations prescrites par la Convention sur la
diversité biologique relativement à la nécessité
d'un partage juste et équitable des ressources génétiques
reposent sur quatre éléments. Ces éléments
concernent l'accès aux ressources génétiques et aux
technologies, l'utilisation équitable : le principe de compensation
équitable, la biosécurité et enfin le dernier
élément traite des dispositions financières.
En ce qui concerne le premier élément qui
concernent l'accès aux ressources génétiques, la
Convention stipule au point 1 de l'article 15 que : « Le pouvoir de
déterminer l'accès aux ressources génétiques
appartient aux gouvernements et est régi par la législation
nationale. ». Dans cette optique, chaque État Partie «
s'efforce de créer les conditions propres à faciliter
l'accès aux ressources génétiques » (article 15 al.
2). Il est judicieux de rappeler qu'en vertu de ses articles, l'accès
est régi par un accord mutuel entre l'État fournisseur et
l'État utilisateur. Deux observations importantes sont à faire en
ce qui concerne l'accès aux ressources génétiques. D'une
part, avec la CDB, l'accès n'est plus libre, il doit être
autorisé mais peut être refusé par l'Etat. D'autre part,
l'autorisation doit conduire nécessairement à la conclusion d'un
contrat entre le prospecteur et l'Etat sur les conditions de la collecte
L'élément suivant est relatif à la
question de l'utilisation équitable : le principe de compensation
équitable, C'est le point 7 de l'article 15 qui traite du second
élément à savoir l'utilisation équitable relatif
aux obligations concernant le partage juste et équitable des ressources
génétiques. Il dispose que « Chaque Partie prend les mesures
législatives et administratives ou de politique générale
appropriées [...] pour assurer le partage juste et équitable des
résultats de la recherche et de la mise en valeur ainsi que des
avantages résultant de l'utilisation commerciale et autres des
ressources génétiques avec la Partie contractante qui fournit ces
ressources. Ce partage s'effectue selon des modalités mutuellement
convenues. »
Le point 3 de l'article 19 évoque la question de la
biosécurité14 en précisant que : « Les
parties examinent s'il convient de prendre des mesures dans le domaine du
14L'article 1er du Protocole de Cartagena
énonce que l'objectif est de « contribuer à assurer un
degré adéquat de protection pour le transfert, la manipulation
et l'utilisation sans danger des organismes
transfert, de la manutention et de l'utilisation en toute
sécurité de tout organisme vivant modifié résultant
de la biotechnologie qui risquerait d'avoir des effets défavorables sur
l'utilisation durable de la diversité biologique. »
L'article n'est pas très contraignant et pourtant les
États-Unis n'ont pas voulu accepter cette possibilité d'un
contrôle sur les aliments obtenus par génie
génétique. Le dernier élément traite des
dispositions financières (articles 20 et 21) : la Convention
décide d'instituer un Fonds géré par la Conférence
des parties (article 21), ce Fonds sera alimenté par des contributions
des États selon les principes définis par l'article 20. Les pays
développés devront fournir des ressources « nouvelles et
additionnelles pour permettre aux pays en développement de faire face
à la totalité des surcoûts » que leur impose la
conservation de la biodiversité. La COP joue un important rôle en
ce qui concerne la gestion des mécanismes financiers de la CDB.
|