Section II : Les rapports entre la Convention sur la
Diversité Biologique et l'Accord de l'OMC sur les Aspects des Droits de
Propriété Intellectuelle lié au Commerce (ADPIC)
Les interactions entre l'Accord sur l'APDIC géré
par l'OMC et la CDB gérée par le PNUE se traduisent par des
conflits entre pays à haute technologie et pays en développement.
Au centre des conflits, la question des DPI et de la brevetabilité du
vivant, de transfert de technologie, de reconnaissance du savoir ancestral et
du choix des mécanismes de protection25. Nous aborderons dans
un premier temps, les points de conflits entre la CDB et l'Accord sur les
APDIC, puis dans un deuxième temps nous examinerons les
éventualités d'une adaptation des dispositions de la CDB et de
l'Accord sur les APDIC.
Paragraphe 1. Les points de conflits entre la CDB et
l'Accord sur les APDIC A. La violation du principe de souveraineté des
Etats
L'un des principes de la CDB est celui du droit souverain que
les Etats ont d'exploiter leurs propres ressources selon leurs politiques
d'environnement, conformément à la
25 La Convention sur la Diversité Biologique et
Les Accords de Droit de Propriété Intellectuelle : enjeux et
perspectives, Solagral 2001, Hélène IIbert.
Charte des Nations Unies et aux principes de droit
international tel que défini en son article 3.
La consécration d'un tel principe est un acquis majeur,
une victoire des pays en développement sur les pays du Nord. Elle permet
de satisfaire à une des revendications clefs soulevée pendant les
négociations, notamment la remise en question du concept de patrimoine
commun de l'humanité qui bien avant la CDB, régissait le statut
des ressources biologiques. Le motif de cette revendication était le
constat que les ressortissants des pays développés
réclamaient de plus en plus de DPI sur les innovations effectuées
sur la base de ressources originaires des ays en
développement26. Cette situation était de nature
à limiter l'accès aux résultats des innovations, alors
même que l'accès aux ressources sur lesquelles elles sont
fondées, était libre en vertu du concept de patrimoine commun de
l'humanité.
Il s'agissait alors pour les pays en développement de
lutter contre toutes les manifestations et formes de bio piraterie. Ainsi, en
vertu de ce principe les pays riches en biodiversité mais pauvres en
ressources financières et en technologie peuvent limiter l'utilisation
commerciale de leurs ressources en mettant l'accent sur leurs droits de
souveraineté. Partant les firmes internationales et les centres de
recherche en biotechnologies des pays développés ne pourront plus
exploiter librement à des fins commerciales les ressources
génétiques de ces pays, avant ils devront déclarer les
modalités de leurs travaux de prospection et surtout faire partager
leurs bénéfices avec les pays d'origine des ressources à
exploiter27. En effet, tandis que la CDB opte pour un droit
souverain public du pays d'origine sur ses ressources biologiques, l'Accord sur
les APDIC propose un droit privé de propriété
intellectuelle.
La protection des formes de vie soulève ainsi des
interrogations sur le rapport entre l'Accord sur l'ADPIC et la CDB. L'Accord
sur l'ADPIC s'applique à tous les domaines de la technologie. Il ne
prend pas non plus en considération le fait que l'accès aux
ressources génétiques est régi par des conditions
convenues d'un commun accord et qu'il est soumis selon le paragraphe 5 de
l'article15 de la CDB « au consentement
26 Il s'agit toujours de la manifestation
conflictuelle des rapports entre Pays Développés et Pays en
Développement présent dans la Convention sur la Diversité
Biologique et même dans les Accords relatifs à l'OMC.
27 Cette idée relève un peu de l'utopie,
car la Convention sur la Diversité Biologique en consacrant les DPI,
s'est engluée dans le cercle très vicieux des très
puissants enjeux commerciaux.
30
préalable donné en connaissance de cause par
les communautés locales et par l'Etat détenteur de ces ressources
».
L'amer constat est que le contenu de l'Accord sur les ADPIC
est un obstacle incontestable aux idéaux défendus par les pays en
développement concernant la reconnaissance de leur droit souverain de
disposer de leurs ressources génétiques comme ils l'entendent,
dans la mesure où il prône expressément la vulgarisation
des droits privés sur les ressources. Du coup, il se heurte au principe
de la souveraineté.
|