B -- LA CAUSALITÉ TOTALE
On analysera en premier lieu cette doctrine puis,
deuxièmement on abordera les critiques.
1o -- Exposé de la doctrine
214 - La causalité totale remplace
l'indivisibilité comme fondement de l'obligation in solidum
partant du postulat que chaque cause étant la cause totale du
dommage(29). La réparation intégrale du dommage
s'impose à l'un des coauteurs parce que sa faute cause tout le dommage.
Il est donc responsable d'après l'article 1382 du Code
civil(30).
215 - Cependant plusieurs explications ont été
données pour justifier la causalité totale. La première
présentée par Defroidmont(31) qui postule que «
Primus et Secundus ont donne mutuellement force dommageable l'un
à l'acte de l'autre. Ce qui remonte à Primus, c'est 1o
sa faute, 2o d'avoir mis la faute de Primus dans le cas de
nuire. C'est pourquoi ils se trouvent tout entiers dans
l'événement comme la cause dans l'effet ; et comme
l'événement est un et qu'il est un seul mal, il faut
nécessairement que le mal de l'un soit le mal de l'autre sans division
possible ... les auteurs au regard l'un de l'autre sont cause mutuelle du
caractère dommageable de leur acte fautif. ».
(28) Aydolat, conclusions, Ch. Réuni 25 novembre 1964,
D. 1964.733 ; Radouant note sous cass. 13 mars 1957, D. 1958.73 ; Meurisse,
le déclin de l'obligation in solidum, D.1962, Ch. page 243 ; J.
Boré, Les arrêts de la chambre mixte du 20 décembre
1968, JCP 1969.I.2221, nos 20 à 27.
(29) Rodière, De la solidarité et de
l'indivisibilité, thèse, page 123, nos 168 et s.
« » ; Aubry et Rau, op. cit., note 14, page 33) « ...
chacune des personnes qui ont participé au délit, est
à considérer comme étant individuellement l'auteur du
dommage qu'il a causé, et en doit, par conséquent, la
réparation intégrale. » ; Antoine blanche, n° 411, p.
500 : « celui qui a concouru in solidum, en tout et pour le
tout, au fait préjudiciable doit concourir in solidum, en tout et pour
le tout, à la réparation ».
(30) Baudry-Lacantinerie et Barde, op. cit., tome II,
no 1305 ; H. et L. Mazeaud, Traité théorique et
pratique de la responsabilité civile, t. II, no 1944, p.
1064 et s. ; R. Savatier, ouvrage précité, tome II, no
488.
(31) Cité par H. Et L. Mazeaud, Théorique
et pratique de la responsabilité civile, t. II, no 1944,
p. 786 ; Dans le même sens : Meurisse : Le déclin de
l'obligation in solidum, D. 1962, Ch. p. 243 : « si l'une des
fautes n'avait pas été commise, aucun préjudice n'aurait
été causé à la victime ».
216 - Pour certains auteurs la causalité totale
s'explique d'après la théorie de l'équivalence des
conditions(32). Dans ce sens, un auteur(33) relève
qu'il « Il ny a pas, selon elle à distinguer parmi les
événements qui ont précédé un dommage, ceux
qui ont eu une influence plus ou moins directe, ou plus ou moins proche, ou
plus ou moins dynamique : ils s'équivalent tous, ils peuvent tous en
être considérés comme la cause, dès lors qu'ils en
ont été la condition, c'est-à-dire que sans l'un
quelconque d'entre eux, ce dommage n'aurait pas lieu. Tout dommage
n'étant possible que par la réunion d'un grand nombre de
circonstances, il suffira que parmi ces circonstances, il se trouve une faute,
et que le dommage n'ait pas eu lieu sans elle, pour que cette faute puisse
être considérée comme la cause de tout le dommage et
engendre l'obligation de le réparer ».
217 - Dans la jurisprudence la diversification des formules se
diffèrent, mais tous expriment la même idée, chaque cause
est la cause du dommage tout entier. Dans une série d'arrêts la
cour précise que « lorsqu'il y a entre chaque faute et la
totalité du dommage, une relation directe et
nécessaire»(34), ou sans la faute du coauteur le
dommage n'aurait pas été produit(35).
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