a - La responsabilité du fait des choses
143 - La jurisprudence, dans un premier temps, n'admettait
l'exonération partielle du gardien que si la victime avait commis une
faute(138). Deux années plus tard, à son tour, la
chambre civile adopta la même solution(139), et cette solution
se poursuivit par la chambre civile jusqu'à la fin des années
cinquante(140). La cour de cassation admit seulement la faute de la
victime et non pas son simple fait.
144 - Néanmoins, malgré la persistance de
prendre seulement le fait fautif de la victime comme cause d'exonération
partielle, la deuxième chambre civile, et au début des
années soixante du XXe siècle, inaugura un courant
permettant une exonération partielle du gardien par le simple fait de la
victime. Le 20 janvier 1961(141) la deuxième chambre civile
exonérait partiellement le gardien par le fait même non fautif de
la victime lorsqu'il est l'une des causes du dommage, et la chaîne
d'arrêts dans le même sens s'écoulait(142). La
position prise par la deuxième chambre civile suscita des critiques
ferventes de la part des autres chambres supportées par un large courant
doctrinal, ce qui incita la deuxième chambre civile à admettre
par un arrêt fameux, connu par l'arrêt Desmares(143),
que « seul un événement constituant un cas de force
majeur exonère le gardien de la chose instrument du dommage de la
responsabilité par lui encourue par application de l'article 1384 al
1re, du code civil ; dès lors le comportement de la victime,
s'il n'a pas été pour le gardien imprévisible même
partiellement ». Selon cet arrêt l'exonération partielle
ne peut être retenue, seulement l'exonération totale si le fait ou
la faute de la victime revêt le caractère de force majeur.
145 - Les cours d'appel résistèrent à la
jurisprudence Desmares en refusant de s'incliner, même s'il y a avait une
possibilité de censure par la deuxième chambre. Cette
jurisprudence ne persista pas longtemps la deuxième chambre en
1987(144) et par cinq arrêts désavoua la jurisprudence
Desmares. Elle déclare que « le gardien de la chose instrument
du dommage est partiellement exonéré de sa responsabilité
s'il prouve que la faute de la victime a contribué au dommage
». L'arrêt mentionne la faute de la victime seulement, est-ce que
le
(138) Req., 13 avril 1934, D.P. 1934.1.41.
(139) Cass. civ., 1re déc. 1936, G.P.
1937.1.157.
(140) Civ., 8 février 1938, D.H. 1938.194 ; Civ., 9
sept. 1940.141, S. 1940.I.81, note H. Mazeaud ; Civ., 30 mai 1944, D.A.
1944.105 ; Civ., 27 oct. 1948, JCP 1949.II.4793, note P. Esmein ;
Civ., 7 mai 1952, D. 1952.487 ; Civ. II, 14 nov. 1956, D. 1957.74 ; Civ. I, 4
juin 1959, S. 1961.329, note A. Plancqueel
(141) Civ. II, 20 janvier 1961, Bull. civ. II,
no 60.
(142) Civ. II, 17 déc. 1963, D. 1964.569 note A. Tunc,
JCP 1965.II.14075, note N. Dejean de La Bâtie ; Civ. II, 16 juin
1965, D. 1965.662, note A. Tunc ; Civ., 12 mai 1971, JCP
1972.II.17086, 4e espèce, note J. Boré ; Civ. II, 4
oct. 1972, JCP 1973.II.17450, note B. Starck ; Civ. II, 21 mars 1974,
D. 1974.IR.151; Civ. II, 12 février 1975, JCP 1975.IV.114.
(143) Civ. II, 21 juillet 1982, D. 1982.449, concl.
Charbonnier, note Ch. Larroumet, JCP 1982.II.19861, note F. Chabas.
(144) Civ. 2e, 6 avril 1987, D. 1988.32, note C.
Mouly ; JCP 1987.II.20828, note de F. Chabas ; J. Landel, Desmares
est mort, Gaz. Pal. 1987.2.591.
fait non fautif est exclu ? Quelques arrêts
postérieurs de la cour de cassation révélèrent que
seule la faute de la victime et non pas son simple fait est libératoire
partiellement de l'auteur du dommage, si elle ne revêt pas le
caractère de la force majeure(145).
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