§ 2 : CODE DES OBLIGATIONS ET DES CONTRATS
62 - Le code des obligations et contrats Libanais est
inspiré du code civil français. La France étant un pays
influent dans le domaine législatif et qui était présent
à tous les niveaux au Liban.
Un comité consultatif de législation a
été institué dans le but d'instituer le projet du Code des
obligations et contrat. Une fois le projet terminé, le Code fut traduit
à l'arabe et approuvé par l'arrêté 154/LR Liban le 7
novembre 1932. Ce comité a pris en considération les
règles du Code civil français et les nouveaux principes ainsi que
la législation et les coutumes libanaises(105).
63 - Le Code civil français ne traite pas le cas
où plusieurs personnes commettent un délit civil. Ce
comité voulait combler cette lacune en droit libanais. Il rend les
coauteurs d'un délit civil solidairement responsables sous le visa de
l'article 137 COC.
L'avant-propos ne mentionne pas les motifs de l'article 137 et
tout ce qu'on peut déduire c'est que le comité était sous
l'égide du Doyen Luis Josserand, qui était un des auteurs qui ont
considéré que le dommage généré par
plusieurs personnes les rend solidairement responsables, à condition
qu'il y ait complicité dans le fait dommageable ou que chaque fait est
la cause totale du dommage.
Cet article prononce la solidarité passive contre les
personnes qui causent le même dommage :
<< 1 - s'il y a eu communauté d'action
».
<< 2 - s'il est impossible de déterminer la
proportion dans laquelle chacun de ces personnes a contribué au
dommage ».
64 - Un problème s'est posé concernant les deux
alinéas de l'article 137. Est-ce que chaque alinéa est un cas
propre à lui et suffit pour une condamnation solidaire, où il
faut que le fait dommageable renferme les deux conditions.
La plupart des auteurs libanais spéculent que les deux
cas disposés par les alinéas 1 et 2 sont des cas
différents, et il suffit que le fait dommageable renferme l'un d'eux
pour que la solidarité soit prononcée. Les arrêts de la
cour de cassation libanaise se divisent en deux voies. Ceux qui
considèrent chaque alinéa comme un cas autonome suffisant pour
condamner solidairement(106) et ceux qui exigent les deux
conditions(107).
(105) Avant-propos du code des obligations et contrats,
Beyrouth, 31 décembre 1930.
(106) Cass. civ. lib., ch. I, 30 octobre 1969, revue Baz 1969,
arrêt no120, page 206 ; Cass. civ. Lib., ch. III, 31 mai 1972,
revue Baz 1972, arrêt no65, page 284.
65 - La cour de cassation le 4 mai 1971 déclara que la
solidarité passive disposée par l'article 137 exige les deux
conditions. Elle ajoute que « si le fait de chacun de ces personnes,
qui ont commis le dommage, était indépendant et distinct de
l'autre et s'il était possible de se renseigner de la
responsabilité de chacun, dès lors il n'y a aucune
solidarité passive entre eux à l'égard de la victime, il
reste chacun d'eux responsable seulement de la part causée par son
propre fait ». Cette analyse de la cour de cassation n'est pas
acceptable car elle rejette la solidarité lorsque le dommage est
généré par des faits distincts.
66 - D'un côté on approuve que la
solidarité est une garantie de paiement pour la victime lorsqu'il y a
communauté d'action(108), et d'un autre on l'a rejetée
lorsque les faits sont distincts. Cette garantie doit être
attribuée ou doit être rejetée dans les deux cas. En outre,
il faut scruter la jurisprudence française antérieure à la
mise en ceuvre du Code des obligations et contrats, puisque le
conseillé, charger de mettre le projet, avait pris comme
référence les solutions jurisprudentielles françaises. La
cour de cassation française et pendant tout le XIXe
siècle et une partie du XXe siècle prenait la
communauté d'action comme cas distinct de l'impossibilité de
déterminer la part contributive. Le premier était pour les faits
communs(109) le deuxième pour les faits indépendants
et distincts(110). D'ou les deux alinéas 1 et 2 sont des
conditions distinctes et il suffit que l'un des deux soit en cause pour
condamner l'un des coauteurs à réparer intégralement le
dommage.
67 - Quant à la solidarité disposée par
l'article 137, les auteurs libanais l'ont considérée comme un
axiome sans explorer le fondement de cette solidarité. Le
problème n'est pas logomachique, solidarité ou in
solidum. Effectivement, c'est le fondement de chaque institution. Est-ce
que le fondement d'une condamnation solidaire selon l'article 137 est en
harmonie avec celui de la solidarité proprement dite?
Précisément, la communauté d'action ou
l'impossibilité de déterminer la part contributive est
reliée à la solidarité ou à l'obligation in
solidum(111).
68 - Puisque les deux conditions se distinguent l'une de
l'autre, on aborde premièrement le premier alinéa en essayant de
démontrer l'insuffisance de la communauté d'action, puis
après le deuxième alinéa en prouvant que
l'impossibilité de déterminer la part contributive concerne
l'obligation in solidum.
(107) Cass. civ. Lib., ch.2, 4 mai 1971, revue Hatem, tome
19, 1971, arrêt no 47, G119, page 38, revue Baz, 1971,
arrêt no 47, page 271 ; Dans le même sens: Cass. civ.
Lib., 8 juillet 1969, revue Hatem, arrêt no 106, tome 93, page
30 ; Appel Beirut, 2 février 1967, revue Hatem, arrêt
no 198, tome 78, page 48.
(108) Appel Mont-liban, 13 janvier 1973, revue Hatem,
arrêt no 45, G147, page 51.
(109) Voir la troisième étape de
l'évolution de la solidarité, Supra no 44 et
s.
(110) Voir la troisième étape de
l'évolution de la solidarité, Supra no48 et
s.
(111) Infra, no 85.
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