Cette étude se base sur un cadre théorique :
l'approche par les moyens d'existence durables, qui s'est
révélée, ses dernières années, être un
cadre pratique et pertinent pour l'analyse de la pauvreté et permet,
dans notre cas, d'ouvrir plusieurs perspectives de recherche. Cette approche
est centrée sur les individus. Elle les place au coeur du
développement. Son cadre théorique nous montre comment les
ménages pauvres, en exploitant le bois énergie dans un
contexte de vulnérabilité, arrivent à produire,
par une série de permutations, des résultats de moyens
d'existence que sont : plus de revenus, un bien-être accru, une
meilleure sécurité alimentaire, une vulnérabilité
réduite et une utilisation plus durable des ressources naturelles. Le
contexte de vulnérabilité peut être
appréhendé à travers l'environnement
socio-économique (contexte de pauvreté), physique
(dégradation des ressources naturelles dans la RBP consécutive
à l'utilisation du bois énergie et aux autres facteurs
anthropiques), et institutionnel (législation forestière,
règles traditionnelles endogènes)
Dans le cadre de cette étude, divers concepts sont
utilisés. L'usage de ces concepts est souvent sujet à confusion,
d'où la nécessité de les définir en vue d'en
préciser la signification indispensable à la
compréhension, et de montrer comment ils pourront aider à
augmenter ou à améliorer la connaissance des
phénomènes que se propose d'expliquer notre étude.
L'objectif ici est de définir ces concepts plus
spécifiquement de monter d'une part pourquoi le bois énergie est
classé parmi les Produits Forestiers Autres que le Bois (PFAB), de
préciser notre entendement des concepts de ménage agricole, de
participation, de bien-être et de moyens d'existence, et d'autre part de
mettre en exergue les aspects ou dimensions importantes pour cette étude
ainsi que les implications pour la recherche.
En Afrique, le bois énergie (BE) est resté
longtemps en marge des considérations scientifiques, si bien que les
chercheurs ne s'accordent que progressivement sur des définitions en vue
de l'adoption d'une terminologie propre au bois énergie. Mais on peut
retenir qu'il désigne tous les types de
biocombustibles dérivés directement ou indirectement des arbres
et des arbustes (FAO, 2001 b). Dans le cadre de notre étude, par le
terme bois énergie, nous entendons le bois de feu et le charbon de bois.
Mais pourquoi qualifie-t-on le bois énergie de Produits Forestier Autre
que le Bois ?
Les termes utilisés pour désigner les
ressources forestières autres que le bois d'oeuvre ont subi de profondes
modifications au fil du temps avec l'amélioration de la connaissance des
produits que les populations tirent des forêts. Appelés autrefois
« produits forestiers mineurs », ces ressources étaient
désignées par les termes « produits accessoires » ou
encore « produits secondaires ». Ces termes, pour le moins
péjoratifs, supposaient qu'une autre catégorie, en l'occurrence
le bois d'oeuvre était un produit « majeur ». Aux yeux des
populations riveraines et d'un grand nombre de populations urbaines, les
ressources forestières autres que le bois d'oeuvre sont très
importantes et, de plus accessibles à tous au contraire des bois
d'oeuvre réservés le plus souvent à une catégorie
de personnes étrangères à la forêt (Colchester et
al, 1998 ; Plouvier, 1998). Par suite, il y a eu un abandon de ces termes au
profit de Produits Forestiers Non Ligneux (PFNL) en anglais « Non Wood
Forest Products » (NWFP) et de Produits Forestiers Autres que le Bois
(PFAB) en anglais « Non Timber Forest Products » (NTFP).
D'une façon classique, les PFNL (espèces
animales, végétales et fongiques) qu'on trouve à
l'état naturel et qui entrent dans l'alimentation des êtres
humains et des animaux sont des ressources forestières alimentaires
encore appelées Ressources Alimentaires Non Conventionnelles (RANC). Les
concepts de PFNL et RANC semblent superposables. Mais au regard de leurs
contenus le concept de RANC paraît plus approprié à
l'alimentation des êtres humains alors que celui des PFNL ou des PFAB
désigne en plus des RANC, tout matériel qui n'est pas comestible
dont l'homme tire usage à des fins médico-magiques, artisanales
etc. FAO (1991) cité par Codjia et al. (2001). Les PFNL sont des
ressources et produits (autres que le bois d'oeuvre et d'industrie ainsi que
leurs dérivés) qui sont extraits d'écosystèmes
forestiers et qui sont utilisés à des fins alimentaires,
domestiques, de commercialisation ou dotés d'une signification sociale,
culturelle ou religieuse (ibid). Les PFNL regroupent les fruits, feuilles,
écorces, bois de feu, viande de brousse et plantes médicinales
(Spore N°126).
A l'instar de la terminologie, le sens donné aux PFAB
a beaucoup évolué dans le temps. Ce terme désignait toutes
ressources biologiques, tout service marchand excepté toutes les formes
de bois d'oeuvre de la forêt ou de tout autre écosystème
ayant des fonctions similaires. Ce terme était consacré aux
ressources forestières végétales spontanées
à usage alimentaire et médicinal. Avec la prise en compte des
bois non recherchés sur le marché
international, le champ de cette définition va
s'élargir d'avantage (Robbins et Matthews, 1974 cités par Ndjebet
Ntamag, 1997). Ce terme désigne toute ressource forestière,
à l'exception du bois d'oeuvre, dont l'exploitation ne nécessite
pas d'investissement particulier et dont l'usage ou la commercialisation
profitent directement aux riverains (Aubé, 1996, Peters, 1997).
Nous retiendrons la définition de la FAO qui
résume toute les définitions de ces auteurs. Elle
considère les PFAB comme l'ensemble des biens et services pouvant
être vendus, autoconsommés ou être utilisés par
l'industrie comme matières premières et qui proviennent des
ressources renouvelables et de biomasse forestière. L'une des
caractéristiques propres à ces PFAB est leur
accessibilité, même aux personnes ne disposant pas de terre
cultivable et ou de revenu suffisants (Falconer, 1990).
De tout ce qui précède il apparaît que
les termes PFNL et PFAB sont synonymes mais dans le cadre de cette
étude, le terme PFAB sera préféré au PFNL pour
caractériser le bois énergie. Cette préférence se
justifie par le fait que le terme Produit Forestier Autre que le Bois
paraît plus complet et plus proche de son équivalent anglais Non
Timber Forest Product. En effet « Timber » désigne en anglais
bois d'oeuvre et, de plus, nombreux sont les produits forestiers ligneux, en
l'occurrence le bois de feu, les écorces, les rotins, etc. qui sont
« improprement » classés dans les Produits Forestiers Non
Ligneux.