CHAPITRE 1- LES CONTOURS DU DROIT A LA SANTE
La reconnaissance du droit à la santé comme un
droit de l'homme, attribue une importance exceptionnelle à cet objectif.
Le fait de caractériser un objectif spécifique de droit humain
l'élève au dessus des autres objectifs sociétaux,
l'immunise conte toute éventuelle contestation et le nimbe
généralement d'une aura d'intemporalité, d'absolu, et de
validité universelle » (1). Il reste à cerner les
contours de ce droit en le définissant, en établissant les normes
le constituant, et les obligations des parties.
L'expression « droit à la
santé » a été critiquée car elle
laisserait entendre l'obligation des états de garantir la bonne
santé aux citoyens. Certains ont préconisé de la changer
par l'expression « droit à la protection de la
santé » et dans ce cas, elle va englober le droit aux soins de
santé, et le droit à des conditions de vie saine (3). En fait, la
signification du droit à la santé s'est clarifiée
progressivement avec le temps et travers l'interprétation de situations
concrètes.
Il y a deux conceptions du droit à la santé. Une
conception restrictive qui assimile le droit à la santé au droit
aux soins de santé, et une conception plus extensive associant le droit
aux soins aux autres droits humains. Dans la conception restrictive, le droit
à la santé est assimilé au droit aux soins de
santé. L'expression droit aux soins de santé implique
l'obligation de l'Etat d'assurer les soins de santé à tous les
citoyens à travers une redistribution des ressources. Cette conception
ne tient pas compte des déterminants multiples de la santé. En
effet, assurer les soins de santé n'est pas suffisant pour atteindre la
santé dans son aspect de complet bien être physique, mental et
social. Par conséquent, assurer uniquement les soins de santé
à une population, ne peut améliorer son état de
santé.
La conception large du droit à la santé
découle de la définition même de la santé comme
étant « le complet bien-être physique, mental et
social». Dans son préambule, la constitution de l'OMS
réserve une disposition spécifique à la santé et
les droits humains. Ainsi, pour cette organisation, le droit à la
santé est l'abréviation de l'expression « Le droit
au meilleur niveau de santé qu'il est possible
d'atteindre ». Cette conception extensive du droit à la
santé c'est-à-dire le « Droit au complet
bien-être physique, mental et social » a été
également critiquée, car elle est idéaliste. Elle n'est
pas adaptée aux besoins immédiats des populations et donc non
fonctionnelle. Elle reste cependant applicable sur le long terme et surtout,
elle demeure opérationnelle dans la lutte contre la violence et la
protection de la santé des femmes.
Le droit à la santé étant le droit pour
un individu de jouir du meilleur état de santé qu'il est possible
d'atteindre. C'est un ensemble d'arrangements correspondant à des
normes, des institutions et des dispositions légales ayant pour
objectif d'assurer la jouissance de ce droit.
Il ne fait pas l'objet d'une reconnaissance
générale, car il n'est pas présent dans toutes les
constitutions nationales, ni dans toutes les chartes des organisations
internationales. Il reste néanmoins un droit supérieur car c'est
le droit à la vie, c'est un droit capital, un droit carrefour,
rassembleur, attractif qui regroupe de nombreux autres droits (4).
A- Les sources du droit à la santé
Le droit international des droits de l'homme a
évolué depuis la 2ème guerre mondiale pour
inclure les droits économiques, sociaux et culturels. Ceux-ci
n'étaient pas considérés comme droits essentiels par
rapport aux droits civils et politiques, ils étaient
considérés comme des droits de deuxième catégorie.
Certains états les considéraient comme des objectifs à
atteindre mais non des droits justiciables. La conférence mondiale sur
les droits de l'homme (Vienne 1993) a modifié la perception des droits
de l'homme. Tous les droits sont interdépendants. Le droit à la
santé est un droit social, c'est un droit fondamental de l'homme. Il
figure dans un ensemble de textes à portée juridique. Ces textes
relatifs aux droits de l'homme ont des valeurs légales
différentes. Sont considérés comme textes
contraignants les pactes, les traités, les conventions, les
protocoles internationaux et régionaux, les constitutions nationales et
les textes législatifs nationaux. Les instruments non contraignants,
résultent d'un consensus international on d'accords et servent de guide
pratique pour les états. Il s'agit des déclarations
internationales, les principes, les directives, les recommandations.
L'observation générale adoptée par le comité des
droits économiques sociaux et culturels pour interpréter le droit
à la santé, ainsi que les documents des conférences
mondiales des Nations Unies sont tous des textes non contraignants.
A côté de ces textes qui traitent directement du
droit à la santé, il faudrait ajouter certains textes se
rapportant aux autres déterminants de la santé. Il s'agit des
dispositions traitant de l'intégrité physique, du droit à
l'information, le droit au logement, l'alimentation, la liberté
d'association et le droit de l'environnement.
Le 1er texte dans lequel est apparu le droit
à la santé est le préambule de la constitution de l'OMS
(adopté par la conférence internationale de la santé
à New York du 19 Juin au 22 Juillet 1946). Dans ce texte, il est
clairement mentionné que la santé n'est pas l'absence da maladie.
Ce texte a véritablement associé la santé à
d'autres déterminants qui sont tout aussi essentiels. En effet, selon
l'OMS : « La santé est un état de complet
bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une
absence de maladie ou d'infirmité. La possession du meilleur état
de santé qu'il est capable d'atteindre constitue l'un des droits
fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa
religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou
sociale ». L'innovation de ce texte est qu'il assimile la
santé à un droit fondamental de tout être humain, et il
garantit l'élimination de toute discrimination dans l'application de ce
droit. La DUDH source de tous les droits humains, et dont les dispositions sont
considérées comme relevant du droit international coutumier.
Bien que celle-ci ne rapporte pas explicitement le droit à la
santé, elle mentionne cependant dans l'article 25 une série de
droits économiques, sociaux et culturels :
« Toute personne a droit à un niveau de
vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa
famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins
médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires, elle a
droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie,
d'invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte
de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de
sa volonté. La maternité et l'enfance ont droit à une aide
et à une assistance spéciales. Tous les enfants qu'ils soient
nés dans le mariage ou hors mariage, jouissent de la même
protection sociale ».
Par la suite, de nombreuses dispositions relatives au droit
à la santé, de portée différente, ont
été établies dans des instruments universels ou nationaux.
1- Les instruments universels de droits de l'homme
|