Une application stricte des règles d'imposition
heurterait manifestement l'équité. Le juge se doit d'assurer
l'idée de justice quand il découvre que c'est le changement de la
doctrine administrative qui était à l'origine de la
prétendue erreur reprochée au contribuable.
122 AGRON (Laure) : « Histoire du vocabulaire
fiscal », Op. Cit., p.41 6.
123 CHAABANE (Neïla) : « Equité fiscale :
les droits de l 'Etat et l 'Etat de droit », in Mélanges
offerts au doyen Abdelfattah AMOR, Tunis, C.P.U. 2005, p.322.
124 « Dès on origine latine, le terme «
justice » recouvre la conformité au droit, le sentiment moral
d'équité. La justice est une vertu », AGRON (Laure) :
« Histoire du vocabulaire fiscal », Op. Cit.,
p.412.
125 LE TOURNEAU (Philippe) : « La bonne foi
», Répertoire civil, Dalloz, Octobre 1995, p.2.
Ainsi, face aux cas particuliers, c'est au juge de rattraper
les rigueurs de la loi en instillant des doses
d'équité126. En effet, l'équité requiert
un équilibrage des rapports et donc des droits de l'administration et du
contribuable. Car, elle n'est pas seulement un principe appelé à
régir l'élaboration de la norme mais également sa mise en
oeuvre.
Cette perspective de protection fondée sur la prise en
compte de l'équité, peut être confortée par le
programme d'appui à la mise en oeuvre de l'accord d'association Tunisie-
Union Européenne127. Ce programme comporte notamment comme
projet l'« Appui à la modernisation de l'administration fiscale
», dont l'objectif général vise à «
Améliorer le quotidien du contribuable dans ses rapports avec
l'administration fiscale et consolider l'équité fiscale
en vue de favoriser le consentement volontaire à l'impôt
et de contribuer à l'amélioration de l'environnement des
affaires ». De ce fait, il semble que la priorité est à
présent accordée à la modernisation de l'administration
fiscale et à l'amélioration de la qualité des services
rendus au contribuable en vue de faciliter l'accomplissement de ses obligations
fiscales et de favoriser son consentement volontaire à l'impôt,
d'une part et de renforcer l'équité fiscale, d'autre part. Cette
dernière étant « un instrument de réalisation de
la justice sociale »128. Car, si « la
finalité du contrôle fiscal n'est autre que de veiller à
une application équitable du système et de s'assurer du respect
des règles de la concurrence loyale »129, ce
contrôle doit s'exercer sous l'oeil du juge au risque de mettre en
péril sa propre finalité.
Le temps n'est -il pas venu pour le juge de s'émanciper
de ce cadre législatif lacunaire, pour faire de l'équité
l'un des instruments de son contrôle ?
En définitive, il apparaît que le comportement
de l'administration, se manifestant par le changement de doctrine favorable au
contribuable, est de nature à l'éloigner des finalités
d'efficacité recherchée. Plutôt que de mettre en oeuvre une
collaboration loyale dans l'intérêt mutuel, et du contribuable et
du Trésor public, la démarche de l'administration fiscale sourde
à la démarche du contribuable de bonne foi, maintient la
situation précaire de ce dernier.
En revanche, pas moins qu'à la croyance erronée,
la protection du contribuable de bonne foi nécessite, en outre que
protection soit due au comportement loyal.
126 CHAABANE (Neïla) : « Equité
fiscale : les droits de l 'Etat et l 'Etat de droit »,
article précité, p.330.
127
http://www. svez.gov. si/fileadmin/
svez.gov.
si/pageuploads/docs/meda/Fiche_Proj et_de_Jumelage_Fisc_versio
n_definitive.pdf, visité le 28/06/2008.
128 MANSOURI (Lamia) : « L'inégalité par
l'impôt », mémoire pour l'obtention du D.E.A. en droit
public, Faculté de droit et des sciences politiques et
économiques de Sousse, 1993-1994, p.48-49.
129 YAICH (Abderraouf) : « Théorie fiscale
», édition RY, 2002, p.23.