Chapitre premier: La sécurité de
l'aviation civile
L'aviation civile internationale s'est
révélée, au cours des trente dernières
années, particulièrement vulnérable au
développement du terrorisme. De nombreuses mesures de prévention
et de répression ont été recommandées par les
organisations internationales et adoptées par les autorités
nationales. Sans garantir une parfaite sécurité, elles ont permis
d'améliorer nettement les conditions de sécurité.
Après avoir tentée de définir en quoi
consistent les atteintes à la sécurité de l'aviation
civile, on examinera les mesures préventives (section 1), et
répressives (section 2).
Il n'y a pas de définition objective des atteintes
à la sécurité de l'aviation civile. Il convient de partir
d'une observation des faits et des hypothèses dans lesquelles la
sécurité de l'aviation civile s'est trouvée
menacée: soit par des actes divers de terrorisme, soit par le
détournement d'un appareil.30
Peut être qualifié de terrorisme aérien
tout comportement destiné à causer la terreur par l'usager de la
violence, et visant des aéronefs, des installations
aéroportuaires ou des personnes se trouvant à bord
d'aéronefs où à l'intérieur d'aéroports. Le
terrorisme aérien apparaît ici comme un domaine du terrorisme
international, rassemblant des conditions particulières
d'efficacité: dimension internationale du transport aérien,
sophistication technique, danger potentiel permanent au sol (incendie) et en
vol....
30 Michel de Juglart, traité du droit
aérien, T2, 2ème édition, par Emmanuel du Pontavice,
1990.p. 688
Les progrès constatés en matière de
sécurité de l'aviation civile sont réels mais demeurent
précaire. Le maintien d'un progrès élevé de
vigilance s'impose alors que le terrorisme international, toujours actif,
s'oriente vers d'autres cibles, plus vulnérable : diplomates, homme de
la rue,.... D'autre part la communauté internationale tend à se
doter de textes qui ne sont pas l'objet de la présente étude car
ils concernent le terrorisme international en général, mais
peuvent éventuellement couvrir le terrorisme aérien.31
D'autre part, l'assemblée générale de l'OACI continue de
suivre régulièrement la question des entraves
irrégulières à la sécurité de l'aviation
civile et de recommander aux Etats membres une ratification aussi large que
possible des conventions multilatérales existantes. En pratique, les
mesures préventives paraissent plus difficiles à harmoniser sur
le plan international que les mesures répressives.
Section1: La piraterie et les mesures
préventives
La prévention sur les aérodromes et,
éventuellement, en vol relève de la compétence des Etats
qui ne sont guidés que par des normes internationales
générales.32
Paragraphe1-Les normes internationales
générales en Matière de prévention
A partir de 1970 le souci de prévention s'est
développé dans les organisations internationales, notamment
à l'OACI. A l'initiative de la
31 Par exemple: convention internationale contre la
prise d'otage adoptée par l'assemblée générale des
Nations Unies le 17 décembre 1979, RGDIP 1981 p.239.
32 Conventions de Tokyo, la Haye, Montréal,
annexe OACI.
suisse, une assemblée générale
extraordinaire s'est tenue à Montréal en juin 1970 et a
adopté un certain nombre de résolutions qui sont à
l'origine des mesures prises ensuite par les Etats. Notamment la
résolution A 17-1 de la 17e Assemblée de l'OACI :
« condamne tous les actes de violence qui peuvent
être dirigés contre les aéronefs employés dans le
transport civil international, leurs équipages et leurs passagers, le
personnel de l'aviation civile, les aéroports civils et autres services
et installations utilisées dans le transport aérien international
;
Reconnaît la nécessité urgente de l'accord
général des Etats pour réaliser une large
coopération internationale dans l'intérêt da la
sécurité du transport aérien civil international ;
Demande une action concertée de la part des Etats pour
mettre fin à tous les actes qui compromettre le développement
sûr et ordonné du transport aérien civil international
».
Ultérieurement des résolutions semblables ont
été votées par les assemblées ordinaires de l'OACI
(1971, 74, 77,80) et par le conseil de l'OACI, par l'assemblée
générale des Nations Unies 33 et par le conseil de
sécurité, 34 par l'Assemblée35 et
par le comité des Ministres du conseil de l'Europe.36
Pratiquement ces résolutions diverses ont permis de préparer
l'opinion publique à l'idée de la prévention.
33 AG. ONU Rés. 12 décembre 1969, 28
novembre 1970
34 CS. ONU Rés. 9 septembre 1970, 20 juin
1972.
35 Ass. du Conseil de l'Europe Rés. 599 /
1970
36 Comite des Ministres du Conseil de l'Europe
Rés. (70)2.
Ainsi ont pu être adoptées des conventions
multilatérales générales faisant une certaine part
à la prévention et surtout l'Annexe 17 à la convention de
chicago.
1- la prévention dans les conventions
multilatérales générales
La prévention n'occupe qu'une place modeste dans les
trois grandes conventions de Tokyo (1963), La Haye (1970) et Montréal
(1971) où l'inspiration répressive domine. L'article 11 § 1
de la convention de Tokyo dispose :
« Lorsque, illicitement, et par violence ou menace de
violence, une personne à bord a gêné l'exploitation d'un
aéronef en vol, s'en est emparé
ou en a exercée le contrôle, ou lorsqu'elle est
sur le point d'accomplir un tel acte, les Etats contractants prennent toutes
mesures appropriées pour restituer ou conserver le contrôle de
l'aéronef au commandant légitime ».
Une disposition comparable visant la prévention des
détournements d'avion et des actes de terrorisme figure à
l'article 9§1 de la convention de La Haye et à l'article 10 §
1 de la convention de Montréal selon laquelle.
« Les Etats contractants s'engagent, conformément
au droit internationale et national, à s'efforcer de prendre des mesures
raisonnables en vue de prévenir les infractions » visées
à la Convention.
Il s'agit là d'engagements très
généraux qu'il convient pour les Etats membres de traduire dans
des comportements préventifs précis, soit dans les
aéroports, soit même en vol. on outre, la prévention au sol
n'a d'intérêt que si elle est pratiquée a peu près
uniformément dans tous les pays : elle suppose un degré
élevé de collaboration internationale et, à ce titre, a
retenu l'attention de l'OACI, alors qu'aucun consensus n'a pu intervenir sur
les mesures de prévention à prendre en vol.
2- les mesures de préventions prévues par l'OACI
a- Annexe 17 à la Convention de Chicago.
L'adoption d'une Annexe à la convention de Chicago,
ayant pour objet la « protection de l'aviation civile internationale
contre les actes d'intervention illicite », avait été
envisagée par la 17e Assemblée de l'OACI en juin 1970.
préparée par le conseil, conformément à l'article
37 de la convention de Chicago, l'Annexe adoptée le 22 mars 1974 est
devenue applicable le 27 février 1975. Elle contient des normes et
pratiques recommandées s'adressant à tous les Etats membres.
- il est recommande à chaque Etat membre d'établir
un programme de
sûreté de l'aviation civile « en vue de
protéger la sécurité, la régularité et
l'efficacité de l'aviation civile internationale »
(art3. 1.2). Un tel programme doit obligatoirement être établi
pour les aérodromes internationaux (art5. 1.1).
- « chaque Etat exigera que les exploitants
d'aéronefs inscrits à son
registre adoptent un programme de sûreté et
veillera à ce que ce programme soit compatible avec le programme de
sûreté d'aérodrome prescrit » (art.6.1.1).
Enfin les diverses recommandations concrètes sont
faites sur le contenu des programmes. Les Etats membres de l'OACI n'ont
notifié que des « différences » de détail par
rapport au contenu de l'Annexe 17 ; ce qui signifie qu'ils se sont
engagées très largement à en respecter le
contenu.37
b- Manuel de sûreté élaboré par le
secrétariat de l'OACI.
A la demande de l'assemblée de l'OACI lors de sa
17e session, le Secrétaire général a
élaborée un manuel de sûreté destiné à
aider les Etats dans la mise en application des mesures de prévention
préconisées. Ce manuel confidentiel a été
approuvé en 1971 et révisé en 1974. Il précise :
- les fonctions et responsabilités de chaque organisme
dans le programme global de sûreté de l'aviation civile ;
37 L'annexe 17 a été modifiée
depuis lors six fois entre le 31 mars 1976 et le 19 décembre 1985
- les méthodes et procédure minimales de
sûreté à appliquer avant ou
pendant le déroulement des opérations commerciales
régulières.
Le conseil, par résolution du 19 juin 1972, a
recommandé l'application généralisée de ce
manuel.
c- Comité de l'intervention illicite.
La création de ce comité complète
l'appareil préventif imaginé par l'OACI en mettant au point un
mécanisme de compte rendu permettant, à l'occasion d'incidents,
d'identifier les insuffisances possibles de la prévention.
Ce comité créé par résolution du
10 avril 1969, en application de l'article 52 de la convention de Chicago,
compte onze membres choisis parmi les membres du conseil. Il reçoit les
comptes rendus des Etats sur « tous les aspects non politiques des cas
d'intervention illicite », conformément à un formulaire qui
leur a été adressé. Le comité fait au conseil
toutes recommandations utiles en vue de tirer en matière de
prévention la leçon des incidents rapportés.
Ces diverses initiatives prises par l'OACI ont
créé partout dans le monde un climat favorable à la
prévention. Elles laissent aux Etats membres une large part d'initiative
pour les aspects pratiques de la prévention.
Après le 11 septembre, l'OACI a organisée une
conférence qui a approuvé la mise en oeuvre d'un plan d'action,
comportant des audits de sûreté et le renforcement des Annexes
(février 2002). La onzième conférence de navigation
aérienne (septembre 2003) a également créé un
mécanisme pour assurer la coordination des mesures de
sécurité et de sûreté. 38
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