Chapitre second : le cadre institutionnel
multilatéral du transport aérien
La communauté mondiale a un intérêt
primordial au maintien de la liberté et de la sécurité des
communications et des transports aériens. Cet intérêt a
été défendu avec plus ou moins de vigueur par
différentes organisations politiques ou techniques, représentant
les gouvernements ou des intérêts privés, qui sont
directement touchées par le problème posé par la
prolifération des actes de piraterie aérienne, et qui assument
donc une responsabilité particulière dans sa solution.
Mais quelles sont les parties intéressées par ce
problème ?
Section1 : les parties concernées sur le plan
international
Ce sont principalement les gouvernements, qui sont
représentées au niveau international auprès de l'ONU et de
l'OACI, les compagnies regroupées au sein de l'IATA, les pilotes dont
les intérêts sont défendus par l'IFALPA, et les simples
passagers. Il est intéressant de voir brièvement comment ces
différentes parties ont réagi face à ce
problème.
Paragraphe 1 : les organisations
1-L'Organisation des Nations Unies23
L'organisation des Nations Unies. Il est rare que l'ONU
elle-même intervienne directement à propos de questions de droit
aérien. Elle se contente le plus souvent d'adresser es
résolutions d'ordre général a ses institutions
spécialisées, invitant ces dernières a prendre certaines
mesures dans des domaines tels que l'apartheid ou l'action en faveur de pays
insulaires en voie de développement. Cependant l'ONU est intervenue
directement, à plusieurs reprises, pour condamner les
détournements d'avion et autres actes illicites dirigés contre la
sécurité de l'aviation civile. Le 3 novembre 1977,
l'Assemblée générale des Nations Unies et le Conseil de
sécurité ont adopté des résolutions condamnant,
« sans aucune exception, tous les actes de détournement
d'aéronefs ou d'autre ingérence dans les liaisons
aériennes civiles », ainsi que « le fait de profiter de la
capture illicite d'un aéronef pour prendre des otages » et «
la détention illicite de passagers et le membres de l'équipage en
transit ou participant autrement a des liaisons aériennes civiles
». Ces mêmes résolutions font appel aux Etats pour qu'ils
adaptent leurs législations nationales afin que les personnes
perpétrant de tels actes soient poursuivies,
23
www.un.org/french/reform/
les invitent à ratifier la Convention de Tokyo et à
appuyer pleinement les efforts déployés par l`OACI dans ce
domaine.
Afin qu'elles puissent être adoptées quasiment
à l'unanimité, ces recommandations de l'ONU ont été
rédigées dans les termes relativement vagues et
généraux, percutants sur le plan moral, mais assez peu efficaces
au niveau opérationnel.24
Cependant, le conseil de sécurité ou
l'assemblée générale auraient peut être outrepasse
leurs compétences en se lançant dans des recommandations
très techniques et détaillées, qui ressortissent
plutôt au domaine de l'OACI, organisme spécialisé ayant une
longue expérience technique et administrative dans le domaine de
l'aviation internationale.
Ajoutons qu'en matière d'assistance technique, L'OACI
collabore étroitement avec l'ONU par l'intermédiaire du Programme
des Nations Unies pour le Développement (PNUD).
Autres institutions spécialisées des Nations
Unies. De nombreuses institutions spécialisées des Nations Unies
ont un impact direct sur certains aspects du droit aérien. L'OACI
entretient d'ailleurs avec chacune des rapports permettant une fructueuse
collaboration. Ainsi, les travaux récents de l'Organisation
intergouvernementale consultative de la navigation maritime (OMCI) sur les
recherches et le sauvetage ont pris en compte tant l'Annexe 12 de l'OACI que le
Manuel de recherches et de sauvetages aéronautiques. L'Organisation
international du Travail (OIT) se préoccupe des conditions d'emploi dans
l'aviation civile. L'OACI coordonne avec
24 En revanche, les recommandations et les
résolutions d'organisations internationales régionales comme le
conseil de l'Europe, sont beaucoup plus concrètes et précises.
Cela s'explique par la plus grande homogénéité de ses
membres qui ont de nombreux intérêts communs.
l'Union internationale des télécommunications
(UIT) toutes les questions relatives à l'administration des parties du
spectre électro-magnétique allouées aux services
aéronautiques. L'Union Postale Universelle (UPU) s'occupe pour sa part
de la poste aérienne, tandis que l'Organisation mondiale de la
santé (OMS) s'intéresse à la police sanitaire. Enfin,
l'Organisation météorologie mondiale (OMM) est compétente
dans un domaine dont l'importance est évidente pour la
sécurité du transport aérien.
2-L'Organisation de l'aviation civile internationale
l'Organisation de l'Aviation civile internationale a
été créée par la Convention de Chicago, cette
Convention, signée en 1944, n'est entrée en vigueur qu'en 1947,
après le dépôt du vingt-sixième instrument de
ratification. L'organisation provisoire de l'Aviation civile internationale
(OPACI) fut chargée d'assurer l'intérim, ses pouvoirs
étant de nature essentiellement consultative.
L'OACI25 est une agence spécialisée
de l'ONU, fondée en 1947 par la convention de Chicago26,
consacrée aux problèmes techniques et juridiques du transport
aérien. L'OACI a son siège à Montréal. Six bureaux
régionaux permanents lui permettent de servir plus efficacement les
besoins locaux : le Bureau Afrique à Dakar, le Bureau Europe à
Paris, le Bureau Extrême- Orient et Pacifique à Bangkok, le Bureau
Moyen-Orient et Afrique Orientale au Caire, le Bureau Amérique du Nord
et Caraïbes à Mexico et le Bureau Amérique du Sud à
Lima. Ces bureaux travaillent en étroite coopération avec les
organisations régionales telles que la Commission Africaine de
l'Aviation civile (CAFAC) ou la Commission Européenne de l'Aviation
civile (CEAC). En vertu de l'article 47 de la Convention de Chicago, l'OACI
jouit de la capacité juridique nécessaire à l'exercice de
ses fonctions sur le territoire de chaque Etat contractant,
25 www.icao.org/ ·
26 L'article 44 de la convention de Chicago du 7
décembre 1944 dispose: «l'Organisation a pour objet de
développer les principes et les techniques de la navigation
aérienne internationale, ainsi que de favoriser l'établissement
et de stimuler le développement des transports aériens
internationaux de façon à:
a) assurer le développement ordonne et sûr de
l'aviation civile internationale dans le monde entier ;
b) encourager à des fins pacifiques les techniques de
construction et d'exploitations des aéronefs ;
c) encourager le développement de routes
aériennes, d'aéroports et de facilites de navigation
aérienne à l'usager de l'aviation civile internationale ;
d) procurer aux peuples du monde les transports aériens
sûrs, réguliers, efficaces, et économiques dont il a besoin
;
e) éviter le gaspillage économique qu'engendre une
concurrence excessive ;
f) assurer que le droit des Etats contractants soit
intégralement respecté et que chaque Etat contractant ait une
possibilité équitable d'exploiter des entreprises de transport
aérien international
g) éviter toute discrimination entre Etats contractants
;
h) améliorer la sécurité de vol dans la
navigation aérienne internationale ;
i) favoriser, d'une manière générale, le
développement de l'aéronautique civile internationale sous tous
ses aspect. »
la pleine personnalité juridique lui étant
accordée partout ou elle est compatible avec la constitution et les lois
de l'Etat intéressé.
La piraterie aérienne étant un problème
en grande partie politique, les délégations nationales normales
à l'OACI furent complétées par des hommes politiques, ce
qui augmenta les difficultés de l'OACI pour arriver a une
résolution rationnelle du problème, en politisant le processus de
décision. Ainsi, certaines séances
dégénérèrent en polémiques et
vitupérations de quelques Etats, par exemple contre Israël, a la
suite du bombardement de l'aéroport de Beyrouth à titre de
représailles en 196827.
C'est pourquoi certains soutinrent qu'il valait mieux confier
la solution de ce problème à l'ONU, en raison de son
caractère hautement politique, plutôt que courir le risque de
détourner l'OACI de son but original.
Finalement, cette agence spécialisée adapta ses
méthodes et techniques propres, de même que son personnel, pour
tenter de résoudre ce problème fondamentalement nouveau.
Ainsi, c'est dans son sein qu'ont été
élaborées « la convention relative aux infractions et
à certains autres actes survenant à bord des aéronefs
» du 14 septembre 1963 à Tokyo, « la Convention pour la
répression de la capture illicite d'aéronefs » du 16
décembre
1970 à la Haye, et la convention pour la répression
d'actes illicites dirigées contre la sécurité de
l'aviation civile » du 23 septembre 1971 à
Montréal.28
27 La politisation de l'OACI favorisa l'essor de la
commission européenne de l'aviation civile (CEAC), qui joue un
rôle important dans ce domaine, sur le plan européen, Cf. infra
deuxième partie, titre 2, 2ème section : la
sécurité de la navigation aérienne.
28 cf. infra. Deuxième partie titre premier,
2eme section: La piraterie et les mesures répressives.
C'est la aussi qu'ont été
élaborées l' « Annexe 17 » à la convention
relative à l'aviation civile internationale (entrée en vigueur le
27 février 1975) et un « manuel de sûreté » (en
révision constante afin d'être tenu à jour). Ces
dispositions sont destinées à aider les Etats à prendre
des mesures de protection de l'aviation civile internationale contre les actes
d'intervention illicite.
Le Comité juridique de l'OACI joue un rôle
fondamental dans la réparation des conventions internationales, qu'elles
intéressent le droit public, le droit privé ou le droit
pénal.
Le comité établit son programme de travail, qui
est ensuite soumis au conseil, puis à l'assemblée. Il peut
instituer des sous-comités dans le but d'étudier un point
particulier, ainsi pour l'étude des problèmes soulevés par
la location, l'affrètement et la banalisation des aéronefs en
exploitation internationale. Les projets de conventions préparés
par le Comité juridique sont finalement soumis à une
Conférence diplomatique.
Il existe également d'autres Comites permanents, tels
le Comité de l'Aide collective, qui s'occupe en particulier
d'administrer les accords de financement collectif de certains services de
navigation aérienne conclus avec le Danemark et l'Islande, et le Comite
des Finances. Lorsque le besoin s'en fait sentir, le conseil peut aussi
instituer des Comités spécialisés, ainsi le Comité
sur le Bruit des aéronefs, ou le Comité de l'intervention
illicite dans l'aviation internationale et ses installations et services.
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