- CHAPITRE 3 - NI AMATEUR, NI
SPECIALISTE, L'ENTRE-DEUX DES COMPETENCES DES RESSOURCES HUMAINES
ASSOCIATIVES.
Le développement de l'association « Centre social
» dépend de la mise en intelligence collective de l'ensemble des
membres qui la construisent, autour d'une vision partagée.
C'est pourquoi, le facteur humain interne peut être un
élément limitatif si, d'une part, il n'a pas la capacité
à prendre en charge l'organisation et le mode de fonctionnement
spécifique du centre social associatif et si, d'autre part, il n'est pas
en adéquation avec les stratégies de cohésion sociale de
l'association de gestion. A l'inverse, le facteur humain peut être le
moteur de la stratégie1.
Il s'agit donc de renforcer et de se doter de
compétences humaines, au sein de l'association, afin de pouvoir faire
face aux mutations, à la complexité des problèmes sociaux,
à l'évolution de la demande, à la sophistication des
dispositifs institutionnels, à la nécessité de tenir
compte des coûts de l'action sociale, tout en s'appropriant les valeurs
propres au projet associatif afin d'être en mesure de les mettre en
commun.
1 - Un axe d'adaptation à maintenir, la formation
permanente.
Les exigences du travail social ont changé : "Il y
a 15 ans encore, des politiques sectorielles s'attaquaient à des
handicaps identifiables que l'on pouvait essayer de traiter2."
Aujourd'hui, il ne s'agit plus de prendre en compte le résiduel ou, au
contraire, de favoriser la promotion sociale des «classes
moyennes»3 ; désormais, la société se
trouve, d'une part, confrontée à une distension du tissu social,
d'autre part soumise à une individualisation de l'intervention sociale.
Les travailleurs sociaux sont constamment rattrapés par la
réalité. Ils doivent s'adapter et, sans cesse, se remettre en
question.
Pour le travailleur social, la reconnaissance de
compétences certifiées doit garantir l'adéquation entre
les objectifs et les moyens mis en oeuvre pour les atteindre, et ce, de
façon d'autant plus impérative que les mutations de la
société le talonnent, l'obligeant à faire preuve de
souplesse, d'inventivité, d'aptitude à opérer des
transferts d'une situation à une autre, bref d'une adaptabilité
constante. De fait, "plus question de corporatisme étroit ni de
défense crispée de son pré carré. Le travail en
réseau implique la capacité à admettre la
compétence de l'autre si l'on ne veut pas voir la sienne propre mal
reconnue4."
1 GIFFARD-BOUVIER Daniel, PLAGNES Philippe, 2000 -
La nouvelle place du facteur humain dans la stratégie - Les
Echos, l'Art de la stratégie, mai, n°9, pp. 8-9.
2 PAILLET Paule, 1996 - Le travail social dans la
tourmente - Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1956, p.
18.
3 Y. KONATE, 19991, doc. cit., pp.24-25.
4 P. PAILLET, Janvier 1996, Actualités Sociales
Hebdomadaires n° 1956, art. cit., p. 12.
Par ailleurs, il est impossible, pour les cadres et les
responsables d'équipements, d'ignorer les contraintes
économiques. Ils doivent être capables de monter des projets
financiers, avec des budgets souvent précaires et tendus, des
cofinancements complexes, d'évaluer des coûts par rapport aux
résultats (sans soumettre le qualitatif à la dictature du
quantitatif !), de s'initier à des logiques d'entreprise de type
managérial, de recruter des collaborateurs qualifiés, sans pour
autant établir une ségrégation entre ceux qui
gèrent et ceux qui «font». A l'interface d'un pouvoir
partagé qui oblige à des anticipations, sans perdre de vue cette
fonction de veille attentive à la souffrance d'autrui, le directeur
agent de relation publique institutionnel, doit en quelque sorte, sans cesse,
réinventer son métier.
L'organisation du champ social, sur la base des diplômes
et certifications initiales, ne fonctionne plus autant
qu'auparavant1. Il est nécessaire de trouver de nouveaux
descripteurs, tenant compte du contenu de l'activité et de l'orientation
de la fonction. Ainsi, on observe la montée de logiques de gestion des
ressources humaines, basées sur des logiques de compétence,
proches de celles du secteur privé à but lucratif.
Ce souci d'adaptation des formations est aussi porté
par le Conseil économique et social qui propose de décloisonner
les filières par l'instauration d'un tronc commun d'apprentissage de
savoirs partagés, de valoriser le travail social avec les groupes, de
rénover les fonctions d'encadrement, de promouvoir les acquis
professionnels et d'ouvrir l'enseignement à l'éthique et à
la déontologie2.
En corrélation, avec la nécessité de la
transversalité, se pose le problème de la qualification et de la
requalification. La première concerne, bien entendu, les fonctions les
plus classiques. "Mais il suffit de lire les offres d'emploi du secteur
pour se convaincre qu'elle doit, le plus souvent, être associée
à des formations complémentaires touchant au droit, à la
gestion, à l'économie, à la politique des quartiers,
etc.3."
L'accompagnement social se diversifie, touche à des
milieux qui requièrent un élargissement des compétences
ordinaires. Le délégué à la formation du
ministère de la Jeunesse et des Sports assure qu'"il s'agit de
restructurer toutes les formations en un ensemble d'unités
capitalisables constantes, à partir de référentiels de
compétences, mais aussi de faire largement appel à
l'alternance4."
Les centres sociaux associatifs promeuvent la
spécificité d'un travail collégial entre professionnels et
bénévoles. C'est ainsi que le SNAECSO ( syndicat d'employeurs de
centres sociaux) privilégie une dynamique de réflexion sur la
formation qui prenne en compte la réalité des deux
acteurs5 :
- d'une part, en initiant, pour les administrateurs, des
formations à la fonction employeur ;
- d'autre part, en diversifiant les parcours de qualification,
pour les professionnels, à travers la formation continue et
l'alternance.
La fédération nationale des centres sociaux dispose
principalement de cinq outils, pour la formation des bénévoles et
des salariés :
- FOSFORA, qui est le fonds mutualisé de formation
dédié aux bénévoles,
1 Programme de recherche pluri-institutionnel qui
comprend sept équipes de recherche ; il est piloté par la MIRE
(mission interministérielle de recherche expérimentale) et
financé par celle-ci, la CNAF, la Caisse des dépôts et
consignation, le Commissariat au plan, la Délégation à
l'insertion des jeunes, la Délégation interministérielle
à la ville, le SESI (service de Statistique du ministère des
affaires sociales) et la Direction de l'action sociale. P. VALARIE, 1997,
Informations sociales n° 61, art. cit., p. 18.
2 I.SARAZIN, mai 2000, Actualités Sociales
Hebdomadaires n° 2168, art. cit., p. 6.
3 P. PAILLET, Janvier 1996, Actualités Sociales
Hebdomadaires n° 1956, art. cit., p. 8.
4 J. VACHON, Janvier 1999, Actualités Sociales
Hebdomadaires n° 2100, art. cit., p. 26.
5 Lettre programme de la convention nationale SNAECSO,
Juin 2000.
- le taux de participation conventionnelle, largement
supérieur au minima légal1, - le compte de groupe
mutualisé,
- l'engagement de développement de la formation (EDDF),
financé par des régions et l'Europe,
- la création, avec le SNAECSO, de l'organisme de
formation AQUA (Association pour la qualification des acteurs du
développement social local).
L'association de gestion des deux centres s'inscrit
complètement dans cette démarche et élabore, annuellement,
dans une perspective pluriannuelle, un plan de formation pour les
bénévoles et les professionnels2.
Cette attention constante à la formation continue des
bénévoles et des professionnels ne doit pas faire oublier que
cette action d'apprentissage, qui implique un engagement personnel, n'est pas
uniquement référencée par des techniques quantitatives et
de sciences sociales mais s'inscrit, aussi, dans des processus de
compréhension et d'initiation
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