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Du système d'organisation d'un centre social associatif à la citoyenneté de proximité en tant qu'enjeu démocratique

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par Yves Konaté
Université Jean Moulin - Lyon 3 - IAE - Maîtrise AES -Gestion des entreprises -Pratiques managériales 2000
  

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- PARTIE III -

LA CONTRIBUTION DE L'ASSOCIATION

DE GESTION DES CENTRES SOCIAUX

DOLTO ET MONTA BERLET

A LA PRODUCTION DE LA DEMOCRATIE

LOCALE, UNE ORGANISATION QUI

S'AJUSTE AU PROJET D'INTERMEDIATION.

L'incertitude de l'entre-deux : la source du pouvoir associatif.

Le système d'organisation de l'association de gestion se révèle être un réseau d'interactions entre des acteurs. Une forme collective et individuelle le structure. Cette combinaison entre les champs publics et privés engendre cette particularité qu'il a, de ne pas appartenir à la sphère étatique. Néanmoins, il satisfait des besoins individuels qui s'avèrent être des besoins communs relevant de la socialisation1.

De la même manière, ce système appartient au monde de l'économie, non celui qui est marchand et « mondialisé », non pas celui qui est public et « administré », non celui qui, tout en étant domestique, s'appelle aussi social, solidaire et pluriel2. Ainsi, tel « Monsieur Jourdain », l'association de gestion participe pleinement à la vie économique.

Ce paradoxe de la délimitation se retrouve dans un autre registre : le métier de l'association. Il s'exprime par l'exigence d'intervention et d'innovation des pouvoirs publics sans que celle-ci soit particulièrement déchiffrable3. Il s'agit donc, pour l'association de gestion, « d'entendre » la commande publique, tout en évitant l'écueil de la « courroie de transmission administrative » qui la transformerait, de facto, en une configuration mécaniste, orientée vers la standardisation des procédés, plutôt que vers la capacité autonome d'expérimentation.

Ce faisant, il se fait jour que ce sont les acteurs, dans leur humanité fonctionnelle, qui vont être à même d'être « réalisateurs » de la transmission et de la retransmission de cette « entente » réciproque. Aussi, la nécessité impose-t-elle qu'ils s'approprient le projet « Centre social », à travers des initiations, des parcours de formation, d'auto-formation et d'apprentissage

1 A. CAILLE et J.L LAVILLE, 1998, La revue MAUSS semestrielle, n°11, p. 7.

2 Ibid., pp. 84-236

-Réconcilier l'économique et le social - L'économie plurielle - 1996, Paris, OCDE poche, n°12, pp. 9-3 0.

3 - Le Conseil économique et social réhabilite les professionnels - Actualités Sociales Hebdomadaires, mai 2000, n°2168, pp. 6-7.

individuel et collectif, pensés comme intrinsèques au « Projet » et conçus comme méthode de traduction, inhérente au système d'organisation de l'association de gestion.

C'est pourquoi, nous élaborerons des orientations pour l'action, des chantiers déjà amorcés à développer, et des chantiers à mettre en oeuvre, compléments et ouvertures des précédents. Dans un esprit pratique, nous les inscrirons dans la préfiguration et dans la réalisation du prochain projet soumis à agrément1, correspondant à la période 2002-2007.

1 Janon 5 - Historique de l'agrément -

- CHAPITRE 1 -
NI PRIVE, NI PUBLIC, L'ENTRE-DEUX
SOCIO-ECONOMIQUE ASSOCIATIF.

Le sens commun perçoit bien que l'économie n'est pas seulement constituée du compte- rendu boursier horaire de France-Info ou du relevé mensuel de l'excédent de la balance commerciale française. Les seuls faits «d'aider» financièrement un membre de sa famille, d'acheter son pain chez le boulanger ou «de donner de son temps» à une cause, participent aussi à l'économie. Le troisième exemple cité est pratiqué, en France, par plus de 9 millions de personnes en 19931. La portée de ce chiffre révèle ainsi la place de «l'économie sociale»2.

"L'économie d'utilité sociale [...] est une nouvelle économie mixte, qui associe non seulement des ressources marchandes et des financements publics, mais aussi des ressources non monétaires, en provenance de la société civile." (Cette ressource, non monétaire, peut constituer la définition générique du bénévolat.) L'économie sociale "est donc, l'articulation entre ces trois modes de fonctionnement économique - Etat, marché, économie du don - qui va permettre de solvabiliser des activités qui ne seraient pas viables dans chacune de ces trois logiques prises isolément [...]. En effet, le souci de répondre aux besoins exprimés collectivement par les habitants et leur implication-même dans les projets et dans leur mise en oeuvre assurent à la fois la crédibilité des projets et leur «bouclage» financier3 ."

Des experts4 intègrent l'économie sociale dans la notion d'économie plurielle comme un tout systémique. Cette réflexion s'appuie sur deux apports théoriques5.

- D'abord celui de Fernand Braudel, qui distingue trois étages dans la "maison" de l'économie :

· l'économie de subsistance comprenant l'économie domestique au rez-de-chaussée ;

· l'économie de marché local, au premier étage ;

· l'«économie monde» qui occulte la réalité des deux précédentes et qui pourtant la sanctionne6.

- Le second modèle est celui de l'économie «ternaire», dite aussi tiers secteur. Cette approche représente l'économie comme un triangle dont les trois sommets sont l'économie de marché, l'économie publique et l'économie de réciprocité (le don, le contre-don, l'échange non monétaire, le bénévolat...) et étudie les conditions «d'hybridation» entre ces trois économies7.

A partir de ces apports, le concept d'économie plurielle reconnaît deux nécessités :

1 B. HALBA et M. LE NET, 1997, op. cit., p. 34.

2 Début 2000, le gouvernement de Lionel JOSPIN a créé un secrétariat d'Etat à l'économie solidaire.

3 P. SAUVAGE , op. cit., p. 17.

4 Près d'une quarantaine d'experts ont contribué à l'ouvrage cité dans la note précédente, pp. 235- 237.

5 Ibid. , p. 209.

6 VERSCHAVE François-Xavier, 1996 - Perspectives braudéliennes : reconsidérer l'architecture sociale, pour permettre d'y accéder et de s'y mouvoir in ibid., pp. 73-80.

7 J.L. LAVILLE , 1996- Economie et solidarité : linéaments d'une problématique in ibid., pp. 45.56.

- celle de valoriser une activité économique, en amont de l'économie marchande mondialisée sans lesquels, il est vain, selon François-Xavier VERSCHAVE, d'envisager un développement «équitable» ;

- celle qui consiste à favoriser les «mixages» entre ces différentes économies, répondant ainsi, en les valorisant, aux besoins sociaux non satisfaits des habitants-citoyens1.

Par ses origines, par la définition de ses missions, par ses modes d'organisation, par la qualification de son savoir-faire l'association de gestion des centres sociaux Dolto et Montaberlet est partie intégrante de cette économie « hybride ». C'est ce que nous allons exposer dans le chapitre qui suit.

1 - L'effet de levier social des ressources publiques et associatives.

L'analyse de la répartition de financement de l'association pointe trois ressources principales :

- la commune 35 % ; - la CNAF/CAF 25% ; - les usagers 19%.

L'origine des 20% restants reflète l'étendue de la mission fondée sur la capacité de la structure centre social à mobiliser une multiplicité de ressources financières2 autour d'actions de socialisations.

Ces financements se distribuent autour de trois grands domaines d'intervention. Les deux premiers sont spécialisés :

- L'un offre une gamme de modes de garde (crèche, halte-garderie, Centre de loisirs) et des activités éducatives pour l'enfance ainsi que des activités de loisirs pour les adultes ;

- L'autre promeut le développement social, à travers un dispositif d'animation et de proximité3.

Le troisième fait lien et donne sens à la mission des deux centres sociaux :

- Il s'agit de l'animation globale regroupant la logistique transversale, véritable force de frappe permettant d'intégrer les actions sectorisées dans une dynamique prenant en compte les individus sur un territoire de vie.

En outre, l'association se distingue par le développement de son activité puisque son volume de produits a plus que doublé en dix ans.

1 P. SAUVAGE, 1996- Economie et lien social dans les quartiers in ibid., p. 210.

2 Tableau 1 - L'origine et la répartition des ressources de l'association de gestion (1998) -

3 Annexe 10 - Le dispositif d'animation de proximité : orientations éducatives et territoriales -

TABLEAU 6 : La répartition des produits et des recettes usagers de l'association de gestion.

Année

1989

 

1994

 

1999

Produits

4 041

000

5

906

000

9

036

000

Dont recettes
usagers

626

000

1

116

000

1

433

000

(a) Les prestations de service (PS) ont, pour seule origine, la CNAF.

(b) Subvention contrat enfance (dispositif national), destinée exclusivement à équilibrer financièrement les modes de garde petite enfance, dont 66% d'origine CNAF et 34% d'origine municipale.

(c) Prestations à l'unité, réglementées nationalement par la CNAF, à partir d'un barème distinguant les modes de garde.

(d) La part municipale représente 89% de cette subvention, les 11% autres sont d'origine CAF.

(e) Voir Jalon 5 - L'historique de l'agrément -

1998

Produits divers

Recettes
usagers

Subventions

Prestations de
services(a)

Services et activités

//////////////////

1 126 000

578 000F(b)

683 000F(c)

éducatives

//////////////////

47%

24%

29%

et de loisirs

//////////////////

 
 
 

Animation

//////////////////

108 400

419 000F

300 000F

de

//////////////////

13%

51%

36%

proximité

//////////////////

 
 
 

Animation

110 800F

/////////////////

3 614 000F(d)

330 000F(e)

globale

3%

/////////////////

89%

8%

 
 

/////////////////

 
 

TABLEAU 7 : La distribution des principales sources de financement , par domaine d'intervention, de l'association de gestion.

Cette croissance continue de l'activité s'accompagne par un essor parallèle des recettes usagers. Cependant, la participation pécunière, non négligeable, du public demande à être affinée et croisée avec l'affectation des subventions et des prestations de services financières et ce, au regard des domaines d'intervention.

Ainsi nous constatons que les recettes usagers, les subventions réglementées et les prestations de services à l'unité1 financent prioritairement le domaine des services et des activités éducatives petite enfance et enfance. En revanche, les actions du dispositif d'animation de proximité qui relèvent du développement social ont essentiellement des sources de financement public2. L'animation globale complète, quant à elle, sa dotation publique par une activité de produits divers3 qui participent à l'équilibre financier de l'association.

En 1999, 2 439 personnes ont fréquenté régulièrement les deux centres sociaux4, soit 10% de la population totale de Décines5.

En outre, plus de 24 000 personnes cumulées ont participé à une manifestation occasionnelle ou ont été utilisateurs des services.

Si l'on s'en tient à l'observation des statistiques de la fréquentation régulière, là encore, l'analyse révèle une répartition distinguant deux publics : l'un, relevant d'activités de droit commun ; l'autre, de l'insertion sociale.

TABLEAU 8 : La distribution des usagers fréquentant régulièrement l'association de gestion.

1998

Activités de
droit
commun

Toutes les activités
confondues

Activités
d'insertion

Petite enfance
(- 6 ans)

25%

16%

10%

27%

Enfance
(7-11 ans)

13%

8%

8%

22%

Adolescence
(12-20 ans)

 
 

7%

15%

Adultes

62%

38%

13%

36%

Usagers

1 476

100%

62%

38%

848

100%

2 324
100%

Cette distinction recouvre respectivement les deux domaines d'interventions spécialisées cités auparavant dans le tableau 7.

1 Par exemple : une journée complète de garde équivaut à trois unités.

2Annexe 14 - Le dispositif d'animation de proximité. Tableau de répartition des subventions affectées en 1998 -

3 Mise à disposition onéreuse des salles, du mini-bus, de matériels et de services annexes.

4 Annexe 7 - Les ressources humaines -

5 L'association de gestion des centres sociaux est la plus importante du Rhône en nombre d'usagers réguliers, Source : CAF de Lyon, 1998.

Ce faisant, l'examen du tableau différencie deux publics d'usagers.

- L'un est en attente de services éducatifs à la famille (caractérisés par l'offre de modes de garde) et d'activités relevant de la sphère des

- loisirs. Le financement est dit de «droit commun», parce qu'institué dans des cadres contractuels, normatifs et nationaux, complété largement par la participation financière des usagers.

- L'autre subit une situation de vie (précarité sociale) qui nécessite la mise en place d'action de socialisation, dans le cadre des dispositifs relevant de la politique de la ville. Le financement est organisé et évalué localement et diversifié, par ses sources et par ses formes1. Il est quasi-exclusivement public.

En somme, la dualité des ressources associatives et publiques et son corollaire, l'effet d'hybridation, opère comme un levier social. Il révèle ainsi que l'association est en adéquation avec la mission première d'un centre social : être ouvert à l'ensemble de la population tout en étant particulièrement attentif à celle qui est le plus en difficulté.

Aussi, c'est bien cette valeur riche de lien social qui sous-tend la nécessité d'identifier l'action des bénévoles comme une ressource inséparable de cette mission.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon