C'est en devenant administratrice que l'acteur 6 a
découvert que le centre social, "ce n'était pas la mairie.
Fréquentant les trois centres sociaux de la commune, je me rends compte
de la diversité des publics et des actions." D'ailleurs, l'acteur 4
explique le nombre de centres sociaux sur la commune [trois] par "le fait
que la ville soit constituée de différents quartiers qui
justifient leur raison d'être."
1 Annexe 1 - Structuration institutionnelle,
hiérarchique et pédagogique de l'association de gestion -
Ainsi, le secrétaire général adjoint
confirme que "la commune n'a pas vocation à tout faire. Les centres
sociaux, par leur particularité territoriale, mettent en oeuvre des
politiques publiques d'action sociale contextuées, s'appuyant sur des
citoyens habitant les différents quartiers de Décines et ayant
des origines sociales et professionnelles diverses."
L'acteur 2 émet l'idée que le centre social est
"une utopie démocratique, constituée de différentes
opinions, qui permet à des bénévoles d'avoir du pouvoir et
de se sentir indispensables." L'acteur 6, en tant que
bénévole ,dit que le centre social est "pour les habitants,
par les habitants. C'est un lieu de rencontre convivial où il y a de la
vie de voisinage. La notion d'accueil est importante dans un centre
social." L'élu (acteur 3), pragmatique, assure que les premiers
éléments de légitimité de l'association, ce sont
"des adhérents, son offre et service, son rayonnement et son
ancrage."
L'acteur 1 développe ce point de vue municipal en
spécifiant ses critères concernant la légitimité de
l'association:
· le "fonctionnement des instances,
· le travail reconnu par la population,
· le nombre de personnes touchées,
· l'étendue du champ des
activités,
· le partage des principes et des grands idéaux
démocratiques,
· le travail commun dans la même
direction,
· le degré de confiance."
Cette élue souligne que l'association de gestion, dans sa
configuration actuelle, est "un primo- partenaire de la
municipalité."
Cependant, tout en affirmant l'importance de "la
mixité sociale des habitants et la place laissée à ceux-ci
dans le processus de décision", le chef de projet du DSU met
l'accent sur les limites de la représentativité des habitants. Il
rajoute : "Ce sont des bénévoles et on leur en demande
beaucoup." L'élu municipal (acteur 3) reprend étonnamment ce
thème : "Comment les instances de l'association sont parties
prenantes ?" Il avance que "l'action sociale ne peut pas seulement
être assurée par des bénévoles à cause de la
complexité de l'action sociale."
L'acteur 5, élu associatif, ne conteste pas cette
opinion, mais y porte un autre regard : "Ce qui fait la force de
Dolto-Montaberlet, c'est l'implication des bénévoles ; les gens
ne sont pas dilettantes." Il ajoute que la synergie
professionnels-bénévoles est essentielle ; de plus, "le
conseil d'administration de l'association est représentatif de la ville
de Décines, il est hétérogène." L'acteur 1
poursuit par cette formule : "C'est un melting-pot, il y a débat et
échange constant et c'est indispensable à la
démocratie." L'acteur 6 enchaîne : "Il y a brassage de la
population tout azimut, l'accueil est le même pour tous, il y a des
rencontres qui se font." L'acteur 4 ne dément pas : "Par sa
qualité d'accueil et d'ouverture à tous les publics et son souci
du respect des uns et des autres, le centre social développe le sens
civique."
Tout en ne s'opposant pas, les approches se nuancent car, en
énonçant que le centre social à un "rôle de
palpeur du quotidien et qu'il est catalyseur de l'initiative," le
directeur du CCAS rappelle que "ce sont des outils municipaux, des caisses
de résonance des politiques locales." L'élu municipal
(acteur 2) explique que c'est un "lieu d'apprentissage du réel de la
gestion d'une collectivité, c'est une école de citoyenneté
; cela permet d'aller au-delà et d'accéder au pouvoir
politique." Le chef de projet du DSU reconnaît, au centre social,
cette appréhension du terrain , "en raison de sa polyvalence et de
ses compétences de généraliste
pluridisciplinaire." Pour lui, "c'est une
délégation de gestion de service public sans que cela soit
dit."
Le secrétaire général adjoint
résume le point de vue municipal explicitement en indiquant que le
centre social est une structure particulière parce qu'associative ;
celle-ci "met en oeuvre une politique publique d'action sociale
partagée avec la commune." Il précise que "la
légitimité élective et la légitimité
participative sont deux formes de démocratie qui se complètent,
l'équilibre étant constamment à rechercher."
Néanmoins, il souligne que "le financement municipal n'est pas sans
influence."
L'acteur 4 se fait porte-parole de l'association en
spécifiant que l'intérêt du centre social est
"l'autonomie de sa politique d'action sociale, quelle que soit la couleur
politique de la municipalité", garantie par "l'ouverture du
conseil d'administration à toutes les opinions", sous couvert
"d'un pluri-financement qui limite les subordinations."
Une valeur commune énoncée,
déterminée par la traduction pratique à la
partager.
La démarcation d'intervention, entre la mairie et
l'association, s'inscrit dans la transformation du champ de l'action sociale
qui s'ouvre au développement social et aux domaines de l'insertion par
la formation, l'emploi, le logement, l'environnement, etc., mettant ainsi en
place des dispositifs partenariaux où se retrouvent des acteurs
collectifs et individuels des mondes politiques, administratifs, techniques et
associatifs.
Ces mondes ont une valeur commune, «le bien
public», dont les éléments de reconnaissance sont, d'un
côté, le sens civique ou, dit autrement, le sens de la
collectivité et, de l'autre, la participation solidaire des
habitants.
Pourtant, il se révèle que les rapports
partenariaux entre la municipalité et l'association de gestion
s'inscrivent dans des logiques institutionnelles distinctes par leurs
configurations d'origine. L'une, politique et administrative, est soumise
à des logiques de pouvoir et de règles ; l'autre, associative et
professionnelle, est astreinte à s'adapter aux compromis partenariaux et
à l'évolution du champ social.
Cette différenciation structurelle sous-tend,
d'évidence, le mode de relation entre les acteurs municipaux et
associatifs. C'est ainsi que, malgré les valeurs communes
affichées de reconnaissance de la démocratie participative comme
complément consubstantiel à la démocratie élective,
cette altérité organisationnelle laisse à penser que
c'est, dans cet écart, que le doute sur la loyauté du partenaire
subsiste.
Pourtant, ce qui peut s'avérer comme une limite
à la capacité d'intervention associative, semble se manifester,
au contraire, comme la spécificité du «Centre social»
à s'élaborer au sein de cette complexité.
C'est pourquoi, dans la dernière partie qui va suivre,
nous tenterons, à partir des approches dégagées par notre
problématique, d'ouvrir, à partir de notre hypothèse, des
axes de développement. Ceux-ci seront centrés sur des modes de
management, prenant en compte l'originalité dominante et
élémentaire de la pratique bénévole associative,
articulés à l'engagement salarial plus «classique» des
professionnels.
Ce faisant, nous aurons soin de mettre à jour la
dimension opérationnelle primordiale de la « traduction »,
clef de voûte stratégique de la condition partenariale de
l'association de gestion.