2. La crise asiatique de 1997 :
Le 2 juillet 1997, quand le baht
thaïlandais s'effondra, nulle ne savait qu'il s'agissait du
coût d'envoi de la crise économique la plus gigantesque depuis la
grande dépression : partie d'Asie, elle allait s'étendre en
Russie, en Amérique latine, et menacer le Monde entier.
[Stiglitz, 2002, P. 153].Cette phrase de Joseph STIGLITZ
montre bien l'ampleur de cette crise qui au départ était
considérée comme crise passagère, en faite c'était
une crise structurelle qui sera aggravée par les politiques
économiques appliquées inspirées des institutions de
Bretton Woods ( banque et le FMI).
Qu'est ce qui s'est vraiment passé alors? Quelles
étaient les principales causes de cette crise ? Les causes de la
crise asiatique qui partie de Thaïlande en juillet 1997, touchant
successivement la plupart des pays de la région ( Phillippine ,
Malaisie, Indonésie, Corée), et dans une moindre mesure , Taiwan,
Hong Kong et Singapour sont encore sujettes à débat.
Pour certains auteurs (voir Corsetti, Persenti et Roubini, 1998)
l'origine de la crise réside avant tout dans les
déséquilibres macroéconomiques et financiers et les
déficiences des politiques économiques de ce pays, même si
la propagation de la crise et ses conséquences économiques ont
été amplifiées par des comportements de panique. D'autres
auteurs (voir Radelet et Saches, 1998), tout en reconnaissant les faiblesses de
ces économies, insistent avant tout sur le changement de comportement
des investisseurs, et sur les politiques malencontreuses menées au
début de la crise, tant par le FMI que par les autorités
nationales [D. Cohen et R. Portes, 2003,P ; 109].
Ici, ces deux approches seront intégrées
simultanément, donc des indicateurs macroéconomiques et
microéconomique relevant des comportements des acteurs.Ces pays
touchés par la crise ont connu pendant plus de deux décennies des
performances économiques notables. Ils avaient
généralement des budgets équilibrés, des taux
d'intérêt modérés et des situations
macroéconomiques enviables. En revanche, des déséquilibres
de nature microéconomie s'étaient accumulés dans les
portefeuilles des créanciers des banques, dans la gestion de risque de
change, dans l'endettement de cours terme et dans le comportement des
investisseurs. L'arrivée de vagues de capitaux privés dans un
environnement financé libéralisé s'était traduite
par des bulles boursières et immobilières, notamment en
Thaïlande, ce changement intervient en mi-1997 et déclenche un
engrenage de perte de confiance des investisseurs, sorties de capitaux,
dépréciation monétaire, difficulté des entreprises
et endettés et généralisation de la crise
financière.
A partir du moment où ces enchaînements sont
déclenchés, il est difficile de les enrayer. Les
difficultés commencent en Thaïlande à la mi-juillet 1997 et
se propagent rapidement à d'autres pays voisins et de
développement similaire (Corée du Sud et Indonésie) par un
phénomène dit de « contagion ». Ces
nouvelles dimensions donnent aux crises un caractère de troisième
génération.[ Cartapanis ( 2003), Artur (2000)].
La crise se manifestait ainsi de la manière suivante. A
partir de 1996, la situation macroéconomique de la Thaïlande
commence à se dégrader : un ralentissement des exportations
dû à la récession japonaise, à
l'appréciation relative du Baht et à la concurrence des
productions chinoises. En outre, le marché boursier et le marché
immobilier ont commencé à se retourner nettement durant
l'année, fragilisant ainsi nombres d'institutions financières.
Des pressions à la baisse s'exercent sur le Baht
thaïlandais à partir du printemps 1997, notamment en raison des
opérations des résidents souhaitant couvrir leurs dettes
étrangères en devise. Pour les contenir, la
banque centrale de Thaïlande engage une grande partie de ses
réserves dans la vente à terme de dollars, augmentant encore
ainsi son exposition au risque en cas de dévaluation.Finalement
après l'annonce des pertes à venir de finance one, l'une des
principales institutions financières thaïlandaises, le gouvernement
laisse le bath flotter et se dévaluer rapidement. La banque
thaïlandaise a donc abandonné l'ancrage du Bath du dollar.
Très vite, les éléments imprévus
ou troublants se sont toutefois multipliés. Le plus frappant est le
dynamisme de la contagion régionale : la Malaisie a
abandonné son ancrage le 8 juillet, suivie par les Philippines le 11,
tandis que le même jour l'Indonésie élargissait ses marges
de fluctuation de 8% à 12%. Jusqu'à la fin de l'année, ces
monnaies subiront une dépréciation comprise entre 35% et plus de
80%, dans un contexte de reflux massif des capitaux internationaux hors la
région (cf tableau 7).
Ainsi le Baht descend aux enfers en quelques semaines,
plongeant de 25 B/ $ à 51B/ $ au pire de la crise. Le
Ringgit malaisien puis la rupiah indonésienne n'étaient pas non
plus épargné par la crise. En octobre, une attaque
spéculative massive a eu lieu sur le Hong-Kong dollars, mais elle est
contenue par des mesures draconiennes (élévation du taux
d'intérêt interbancaire au jour le jour à 300% au plus fort
de la semaine noire de mi-Octobre 1997).
La victime de Hong-Kong- dollars sera le Won
sud-coréen qui flotte à son tour.[ Jacques Gravereau et Jacques
Trauman, 2001, p. 179].
Ces deux auteurs poursuivent leur analyse. L'effet à
court terme de dépréciations monétaires aussi profondes
est double. D'abord, toutes les dettes en dollars et surtout les dettes
privées, deviennent insolvables, d'autant plus que leur structure est en
générale à très court terme, la moitié
d'entre elles ont une maturité d'environ un an seulement.
Ces dettes privées sont gigantesques : 100
milliards de dollars en Corée, 70 en Thaïlande, 56 en
Indonésie, 25 en Malaisie. La plupart de ces crédits bancaires
privés se trouvent en situation de créances douteuses, à
commencer par les banques locales dont on connaît la fragilité. Le
management du risque de crédit est partout pris en défaut.
Le second effet est de restaurer la confiance des
marchés financiers pour enrayer la chute. Ce qui relève de la
compétence des autorités politique.
Cette dépréciation serait l'origine des fuites
de capitaux massifs dans ces pays comme le montre le tableau 7.
Tableau 7 : Flux de capitaux privés dans cinq pays
asiatiques (Corée, Indonésie, Malaisie, Philippines,
Thaïlande, en milliards de dollars)
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1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
Titres et investisseurs directs
dont :
Investissements directs
Portefeuille
Créances bilatérales
dont :
Banques commerciales
Non-banques
Total flux nets de capitaux
|
12, 2
4,7
7,5
28,2
24
4,2
40,4
|
15,5
4,9
10,6
61,9
49,5
12,4
77,4
|
19,1
7
12,1
73,9
55,5
18,4
93
|
-4,5
7,2
-11,7
-7,6
- 21,3
13,7
-12,1
|
Source : Radelet et Sachs, 1998
A travers ce tableau, on remarque l'augmentation rapide des
entrées de capitaux entre 1994 et 1996, ainsi que la violence
extrême du retournement en 1997.
L'intensité du retournement, mesurée par les
variations des flux dans la balance des capitaux avant et après la crise
est de 105 milliards de dollars dont 77 milliards pour les seules banques
commerciales.
Dans cette crise, les facteurs du risque systématique
caractérisé par : l'afflux massif de capitaux
étrangers, systèmes financiers inaptes à la
libéralisation précipitée, ancrage des monnaies sur le
dollar sont tout réuni[M.Aglietta, 2001,p. 29].Elle ne va pas tarder
à respecter d'autres économies émergentes.Ainsi, en 1998,
la Russie d'abord en Août 1998 , puis le Brésil après, ont
été le champs de théâtre des crises
financières. On exposera ci -après la crise russe, un pays qui
non seulement occupe une position stratégique au niveau mondial mais
aussi offre un cadre d'analyse enrichissant par son passage à
l'économie de marché, dogme de l'institution internationale, le
FMI, chargé par son statut de garant da la stabilité du
système financier international.
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