Section II : Les résurgences multiples des
crises financières internationales depuis les années quatre
vingt dix.
Si la crise d'endettement des années 1980 trouve
principalement sa source dans les recyclages des pétrodollars, la
politique monétaire américaine et le second choc
pétrolier, les crises multiformes des années quatre vingt dix
s'expliquent en grande partie par la financiarisation à rythme
effréné de l'économie. D'une part, la volatilité
des mouvements de capitaux, l'encrage nominal, et le déséquilibre
macroéconomiques sont les éléments déclencheurs de
ces crises.
D'autre part, la montée en puissance des titres
obligataires et la venue en masse des nouveaux débiteurs et
créanciers a changé les structures d'endettement des PED.
I- Typologie des crises financières depuis les
années 1990 :
La libéralisation des mouvements de capitaux a
transformé l'économie mondiale en économie de rente. C'est
ainsi que la sphère financière exerce sa force sur
l'économie réelle. Mais comme le soulève
l'Américain GALBRAITH dans son oeuvre intitulé « Pour
une société meilleure, le capitalisme est instable
par nature surtout dans sa prime jeunesse.
Les crises mexicaines de 1994, asiatique de 1997, russe de
1998, Argentine de 2001 montrent l'instabilité de la sphère
financière, indice du limite du capitalisme financier
1 . La crise mexicaine de 1994 (crise
Tequilla) :
Depuis 1988, le Mexique avait engagé de profondes
réformes de l'économie et avait renoué avec des
perspectives de croissance dans un contexte de l'inflation et de taux de change
stable. Ils connaissaient des entrées de capitaux massifs, pour financer
à la fois des investissements à rendement attractifs et des
importations elles aussi croissante en volume[Daniel Cohen et Richard Portes,
2003, p. 108]
Cette situation s'est dégradée à partir
de 1994 lorsque l'horizon politique s'est détérioré, avec
respectivement la révolte des populations du Chiapas en janvier,
l'assassinat du candidat PRI à la présidence en mars, puis
l'assassinat du secrétaire général du PRI en septembre.
De ce fait, les investissements de portefeuille connurent un
net retournement à la fin un second semestre de 1994, chutant de 8,7
milliards de dollars à 1, 6 milliards ( cf. Tableau 6)
Tableau 6 : Quelques indicateurs du Mexique 1990-1994( en
milliards de dollars)
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1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
Importations
Balance courante
(en % du PNB)
Inv portefeuille
Inv Direct
|
63,5
-2,93
10,72
2,55
|
72,7
-4,87
13,34
4,74
|
86,1
-6,89
16,88
4,39
|
91,1
-5,98
29,48
4,39
|
108
-7,28
8,8
10,97
|
Graphique 2 : Quelques indicateurs du Mexique
(1990-1994)
( en milliards de dollars)
En même temps, l'accroissement du crédit avait
provoqué un effondrement de l'épargne privée dont le taux
était passé de 16% à 9% du PIB entre 1989 et 1993.
L'appréciation réelle de Peso et l'emballement de la demande
extérieure expliquent le creusement du déficit courant de 3%
à 8% pendant la même période. Dans ce contexte,
l'état eut plus de mal à financer ses besoins (paiements
d'intérêt, remboursement, déficits) sur le marché et
décide d'émettre des bons du trésor à court terme
(de 3 mois à un an) indexés sur le dollars ( tesobonas) à
un taux plus faible(20 %) étant donné que les anticipations de
dévaluation étaient encore quasi nulles. Ce faisant,
néanmoins, les autorités mexicaines s'exposaient largement au
risque de change, et ce d'autant que ces tesobonas étaient
détenus à 80% par des non-résidents.
Contre les pressions à la baisse sur le peso induite
par les retraits de capitaux, le gouvernement défendit sa monnaie en
puisant dans sa réserve de change, mais sans parvenir à restaurer
la confiance des investisseurs. Peu après les élections, le 20
décembre 1994, la nouvelle équipe au pouvoir décide de
dévaluer le peso de 15%. Cette décision, qui révèle
au monde l'ampleur de la crise financière de Mexique provoque une crise
de confiance et de sortie des capitaux. En quelques jours, après le 20
décembre 1994, les réserves de change furent ramenées de
29 à 6 milliards de dollars. Rapidement le peso chute de plus de 50 %
passant de 3,44 pesos à 7,66 pour un dollar et la bourse du Mexique
s'effondre.
Dès lors la crise de change débouchait sur la
possibilité d'une crise de dette auto-réalisatrice. Par effet de
contagion de nombreux autres pays en développement d'Amérique
latine subissent également des soties de capitaux. La crise s'aggrave
encore lorsque le congrès américain refuse d'approuver le soutien
financier de 40 milliards de dollars, envisagé par l'administration
CLINTON.
En réponse à un appel pressant du trésor
américain, le FMI accepte d'apporter au Mexique 18 milliards de
dollars en complément d'un prêt de 20 milliards de dollars par les
Etats-Unis [Patrick Lenain , 2004, p.37].
En tout, les montants financiers engagés par le plan du
sauvetage international furent sans précédent , 50 milliards de
dollar afin de garantir tous les créanciers étrangers.En contre
partie, le gouvernement mexicain annonce le programme d'ajustement
réduisant le déficit de la balance courante de 8 % à 1% du
PIB, en une seule année. Ce plan a fait reculer le PIB de 7% en 1995. Ce
qui montre l'ampleur sociale et l'inarticulation des politiques
économiques appliquées.
La crise mexicaine ne va pas tarder à répercuter
d'autres économies émergentes. Tel a été le cas en
juillet 1997 lorsque la crise asiatique s'éclate.
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